Hors du ring

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Si les vestiaires pouvaient parler...

– Le salaud ! Je vais l'éplucher comme un oignon, lui poinçonner le lilas jusqu'à ce qu'il crie grâce !

Ça, c'est moi. Tout dans la subtilité. Amandine Suce-ma-p... (merci à mon ex pour ce cadeau si raffiné), la trentaine et des poussières, petit tas de chair et de colère, farfouillant dans les affaires de son colocataire.

Mon coloc, cet enfoiré, n'a rien trouvé de plus amusant que de changer la serrure de MON appartement pendant mon absence. Mauvaise surprise découverte en rentrant du boulot. Ma société travaille avec plusieurs boîtes importantes. Bien qu'ayant récemment acquis un statut d'associé principal, il m'arrive encore d'assurer le remplacement d'un collègue défaillant. Ceinture noire en taekwondo, il ne fait pas bon me croiser lors d'une ronde.

– Aïeuuu !

Mouais, pour l'instant, le redoutable agent de la sécurité qui avale un rottweiler à chaque p'tit déj vient de se couper avec un objet indéterminé. Malgré la tonne d'anti-douleurs prise en fin de service pour soulager une cheville abîmée, je sens l'entaille avec un peu trop d'intensité. Bizarre de voir des éléphants roses en sentant le moindre bobo.

Une poignée de capotes s'échappe de mes doigts.

– Qu'est-ce que...

Plongeant dans le sac, tête comprise, je trouve un portefeuille ; Frédéric X, face de tueur et aussi brun que mon viking de coloc est blond. Il eut été dommage d'exploser les boules de mon futur mec sur un malentendu.

Oui, oui, futur mec. Même si ces derniers temps, je me venge de son indifférence en m'envoyant en l'air avec tout ce qui se dresse sur mon passage. Oui, ça se dresse, pour mon plus grand plaisir ! Plus ça va, plus j'ai besoin de me perdre dans ces relations éphémères. Mais ces dérivatifs ne font effet que le temps d'un orgasme.

Voilà maintenant huit mois qu'il a emménagé et il ne fait rien qu'à m'allumer, c'est trop injuste ! Comment décrire autrement le fait de se balader à moitié nu lorsque je suis en manque ? Je le veux, il m'obsède totalement, alors il doit me renvoyer la politesse ! Nous sommes faits l'un pour l'autre, c'est une évidence. Il a un physique de bombe, un humour très particulier mais c'est le seul qui me fasse couiner de rire ou de rage (et secrètement d'amour).

Enfin pour le moment, je suis crevée et n'ai qu'une envie ; rentrer chez moi, prendre une douche et déclarer ma flamme à mon oreiller. Raison pour laquelle je me retrouve au milieu des vestiaires d'un club de boxe en train de chercher son trousseau, et ce, avant l'heure du premier café. Il faudra d'ailleurs que je lui parle de la sécurité de son club ; les souris qui parviennent à s'y faufiler n'ont pas vraiment la taille standard.

Un coup d'œil circulaire me permet de repérer un sac identique au premier. Cette fois, le permis de conduire confirme l'identité du traître. Première surprise, son portefeuille contient une photo de nous deux enlacés – en tout bien tout honneur – tels de bons potes en vacances. J'écarte les piles de vêtements laissées sur le banc central et m'installe pour fouiller plus à mon aise. J'en extrais son portable et affiche l'image d'accueil. Le gros plan d'une paire de fesses m'égratigne la rétine. Je reconnais la culotte, à défaut de remettre mon côté pile. C'était un samedi, jour de lessive, où j'attendais devant le hublot que la machine ait fini de tourner.

– À quoi joue-t-il, bon sang ?

Pour un peu, on pourrait me prendre pour sa nana, alors que c'est le premier à me repousser quand je deviens trop entreprenante ! Estomaquée, je finis par ranger le téléphone pour mieux sortir son trousseau de clés. Voiture et appartement. J'en connais un qui va faire du stop pour aller au boulot tout à l'heure... J'espère qu'il a bien profité de sa blague.

Hors du ringOù les histoires vivent. Découvrez maintenant