Chapitre 1: NEW-YORK - Partie I

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NAOMI

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NAOMI

Je me précipitai à travers les couloirs de l'aéroport, le cœur battant la chamade. Cette manie de tout faire à la dernière minute, c'était comme une drogue pour moi. Naomi, l'incarnation parfaite du cliché des Noirs toujours en retard. Essoufflée, j'aperçus enfin la porte A111, mais mon sang se glaça : l'embarquement était terminé.

Alors que je sentais le désespoir m'envahir, une hôtesse compatissante me regarda avec pitié. Ce qui suivit fut un véritable miracle : elle m'autorisa à monter dans l'avion juste avant le décollage. En cette période de fêtes, j'avais sacrifié mes dernières économies pour ce billet. Le rater aurait été une véritable tragédie.

Une fois installée près du hublot, je repensai à la voix enjouée de Jazzy m'ordonnant de sauter dans le premier avion pour New York. Ma meilleure amie avait conquis l'Amérique depuis son départ de France trois ans plus tôt. Elle s'était hissée au sommet du monde impitoyable de la mode, devenant un mannequin adulé aux États-Unis. Jazzy avait même décroché le Graal : défiler pour Victoria's Secret, un événement réservé aux plus grandes stars.

Jazzy était mon opposé parfait, ma moitié complémentaire. Sa peau d'ébène, son corps sculptural et son visage de poupée la rendaient irrésistible. Nos personnalités étaient aux antipodes, mais notre lien était indestructible. Notre amitié avait éclos dès le premier jour de lycée, deux adolescentes de seize ans, extraverties et folles à lier.

Quand mon téléphone s'était mis à vibrer, affichant son nom, j'avais d'abord hésité. Mais à la troisième tentative, j'avais cédé. Je la connaissais trop bien pour savoir qu'elle n'abandonnerait pas. Elle m'avait annoncé sa sélection pour le défilé, puis glissé qu'une de ses connaissances cherchait une rédactrice mode pour un prestigieux magazine. Elle m'avait recommandée.

J'avais d'abord refusé, trouvant cela injuste. Mais plus les jours passaient, plus l'envie de tout quitter pour tenter ma chance en Amérique me dévorait. À vingt-cinq ans, après deux ans dans un magazine pour femmes noires et métisses sans perspective d'évolution, et si c'était l'opportunité de ma vie ? Postuler chez Vogue ne serait plus qu'un rêve... Mon anglais, affiné lors d'un séjour à Londres, me permettrait de me débrouiller malgré mon accent à la française.

Rejoindre Jazzy avait souvent effleuré mon esprit, mais ma routine parisienne m'enfermait dans une cage dorée. C'est sur un coup de tête, un jour de mélancolie, que je décidai de sauter le pas.

Les décisions impulsives, c'était ma spécialité. Deux semaines plus tôt, j'avais mis fin à neuf ans d'amour avec Christian, mon unique amour, un avocat angolais brillant. Ce voyage tombait à point nommé, m'offrant l'évasion dont j'avais désespérément besoin.

Avant de démissionner, j'en avais parlé à ma mère. Fidèle à elle-même, elle avait d'abord hurlé, puis tenté de me dissuader, avant de s'incliner devant ma détermination. Le visa de travail américain, obtenu en un temps record grâce aux relations de Jazzy, avait scellé mon destin.

À peine avais-je eu le temps de dire adieu à Christian, parti précipitamment, laissant mes affaires dans notre appartement commun. Assise dans l'avion, je fermai les yeux, laissant le sommeil m'emporter vers mon nouveau destin, vers une histoire d'amour avec la vie que je n'aurais jamais osé imaginer.

PREMIER REGARDOù les histoires vivent. Découvrez maintenant