Une nouvelle secousse agita l'amas de gravats, et une lueur bleuâtre perça à travers la pellicule de plâtre, de verre et de poussière. L'amalgame de débris se fendit en son sommet, et Artémysia émergea des fragments de son ancienne demeure. Toussotant, crachotant, elle attrapa son bâton qui gisait sur le sol, et, une main sur les côtes, entreprit de reprendre son souffle, inspirant profondément l'air chargé de cendres et de poussière, de larmes et de peines.
Elle tourna son visage vers l'échantillon de ciel que laissait entrevoir le dôme éventré, et fléchit les genoux. Aidée par les vents brûlant qui soufflaient dans le palais, elle se propulsa dans les airs et atterrit avec souplesse sur les poutres brisées et les tuiles en miettes. Embrassant du regard la cité embrasée, elle porta une main à sa chevelure et défit sa tresse tirée à quatre épingles. Secouant sa tête de droite à gauche, ses épaisses et longues mèches noires cascadèrent le long de ses omoplates.
Puis, elle sauta à nouveau pour atterrir sur un toit adjacent. Se déplaçant ainsi de toiture en toiture, elle s'éloigna progressivement de ce qui fût sa prison, sa tour d'ivoire, cette frontière qui la séparait du bonheur et de la liberté, fuyant son passé, courant au devant d'un futur incertain.
Une euphorie nouvelle s'empara de la jeune femme alors qu'elle franchissait d'un bond les remparts de nacre. Atterrissant accroupie à l'extérieure de la ville, elle ne put retenir un rire, éclat, reflet d'un cœur libéré. Artémysia défit ses souliers, qu'elle abandonna sans regret au pied de la paroi. Et elle se mit alors à courir, bondissant au-dessus des talus et des épineux, foulant l'herbe humide de ses pieds nus.
Lorsqu'elle arriva en vue de la falaise, elle prit son élan, son sceptre dans la main gauche, accélérant la cadence, un sourire à la commissure des lèvres soutenant ses yeux plissés par la détermination. Et elle se jeta dans le vide, tête la première, les bras et son bâton tendus devant elle. Son corps pourfendit les vagues moussantes et une eau fraîche et salée pénétra chaque pore de sa peau. Elle traversa l'océan, poussée par la force des courants et jaillit de l'eau, telle un oiseau, pour se poser en douceur sur le continent.
Grisée par cette liberté nouvelle, rien ne semblait pouvoir l'arrêter, se mettre en travers de son chemin, s'interposer devant la jeune Magicienne. Courant à en perdre haleine au milieu des champs, elle ne ralentit que lorsque les lueurs de la ville se propagèrent dans son champ de vision. Alors, rabattant sa capuche devant son visage, elle camoufla son bâton sous sa cape.
Se faufilant dans les ruelles, elle sautillait sur les pavés, dansait sous le regard bienveillant des étoiles. Enfin, elle s'arrêta dans un dérapage, un éclat de rire au bord des lèvres, devant une bâtisse à la façade bleue reconnaissable entre mille. Artémysia tapa trois fois du pied sur la chaussée, puis deux fois, et à nouveau trois coups.
Presque aussitôt, le battant bascula avec fébrilité, et une lumière accrue se répandit sur le trottoir. Le jeune homme qui se tenait dans l'encadrement referma précipitamment la porte.
— Artémys !
— Lex ! fit la jeune femme, le cœur au bord des lèvres.
— Tu as réussi à t'enfuir ! s'écria-t-il.
— Ça... Ça ne s'est pas passé exactement comme prévu, balbutia la Stella.
— Peu importe, ce qui compte, c'est que tu sois là, désormais, saine et sauve.
La jeune femme détailla attentivement le visage de son interlocuteur, comme si elle eut peur de le voir disparaître sous ses yeux. Il s'avança dans sa direction, et ils s'embrassèrent, profitant de l'abris factice mais rassurant que leur offrait la quiétude du clair de Lune.
Artémysia savoura la douce chaleur qui se répandait lentement dans ses poumons. Elle inspira longuement un air nouveau, en songeant à l'avenir joyeux que son destin pourrait lui réserver. Mais rien n'est fini, se rabroua-t-elle. Non, rien n'est fini...
Car, qu'ils le veuillent ou non, les habitants de la Nuit venaient de pénétrer dans une toute autre facette de leur existence, bien plus sombre, bien plus profonde. Et alors que Céleste et ses camarades comptaient les étoiles, étendus au fond de fines barques de bois, perdus dans l'écume des vagues, loin au-dessous d'eux, dans une de ces contrées ignorées, perdues dans les limbes de l'inexistence, au milieu d'un désert de dunes rougeâtres incandescentes, une jeune fille s'éveillait, et inaugurait l'entrée en matière d'une aire nouvelle, tandis qu'une voix désincarnée s'élevait des ténèbres...
— Bienvenue parmi les Oubliés, Filæ Wonderline.
Et voilà ! J'ai encore du mal à y croire, et pourtant, nous sommes bel et bien arrivés au terme de cette aventure, après un an et demi d'écriture. Mon premier roman, ma première histoire, ma première petite protagoniste au duffle-coat violet pastel. J'ai de nombreuses choses à dire, et surtout de nombreuses personnes à remercier (dans une prochaine partie).Mais avant, j'aimerais vraiment avoir votre avis :
Qu'avez-vous pensé de cet épilogue ? De cette fin ?
Comment imaginez-vous la suite de l'histoire ?
Et surtout : qu'avez-vous pensé de cette histoire dans son intégralité ?
Avez-vous des remarques, conseils, etc... ?
Merci beaucoup et à bientôt !
Gaby
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Le syndrome des cœurs de pierre I - Pupille
Fantasy/!\ EN COURS DE RÉÉCRITURE Tome premier « Dans nos cœurs en perdition, L'amour s'est volatilisé. Mais en ces relents d'émotions, Même la haine n'a subsisté. Seule l'impassibilité souffle en cette terre, Où tous nos cœurs sont faits de pierre. » P...