Trois par trois. Et on marche. En quête du bonheur alors qu’on le possède déjà. Regarde vers le ciel enfant, et tu le verras. Tu vois cette couleur bleu? Tu vois cette légère brise? Tu entends ces oiseaux? Alors sois aussi heureux qu’eux. Cours, cours enfant. Arrête de marcher. Et sois seul, car un jour, tu le seras. Tu seras seul, face à tous tes défauts et tes obstacles. Alors, promets-moi qu’à ce moment, tu regarderas le ciel.
Maman, je l’ai regardé le ciel, mais il pleuvait. Je l’ai pas sentie cette brise maman, elle n’était que grêle. Je ne les entendais pas ces oiseaux, ils se cachaient de l’orage. Et j’étais seul, avec mes défauts et mes obstacles. Mais j’aurais aimé marcher, ralentir, arrêter de courir à la pluie. J’aurais aimé marcher deux par deux, avec toi maman. Suis-je heureux quand il pleut ?
Être deux n’empêche pas les malheurs. Une autre personne, c’est comme un baume sur une plaie ouverte, elle ne fait que l’attendrir. Et c’est ça que tu deviendras enfant, si jamais tu es pair. Faible. Alors regarde le ciel, même si pluie, même si orage. Affronte–le, synonyme de malheur. Car il passera, comme le mal qui tapisse ton cœur.
Maman, pourquoi nous ne sommes plus trois? Trottoirs délaissés, salle à manger démuni, vacances gâchées et cœur dégarni. Car famille était tantôt brise et oiseaux, joie, car il faisait toujours beau. Mort, décès, deuil. Rupture drastique avec un paradis, le nôtre. Où est papa? Regarde-t-il le même ciel que moi en ce moment?
Nous n’existe pas. Sois-toi, seul mais rempli d’une force qui te rend unique. Trottoirs heureux car répit. Salle à manger calme. Vacances annuelles et cœur nouveau. Non pas famille, mais solitaire. Rupture du temps, laisse entrer les oiseaux dans ton corps. Ils chanteront pour toi. Seuls eux peuvent aller vers le ciel, avec papa. Papa est comme toi, enfant. Il n’est pas trois. Mais il vit, il vit pour toi. Mort mais extrêmement vivant; la brise c’est lui.
Maman, la brise état froide aujourd’hui. Hiver. Est-ce froid, là où papa habite? Plus d’oiseaux en hiver. Froid. Avec ma tuque, je face mes défauts et mes obstacles, pour toi. Mais la mort de papa, c’est où? S’est-il battu? Était-il trop faible, était-ce son défaut? Il était toujours trois, c’est pour ça. Seul, tu es fort. N’est-ce pas? Mais si mort n’est qu’obstacle, pourquoi fait-il froid?
Froid, car sans équilibre, mort. Pas de froid sans chaud. Pas de famille sans solitude. Pas de mort sans obstacle. Pas d’hiver sans été. Pas de deuil sans renaissance. Pas de force sans faiblesse. Pas de froid sans chaud. Pas de froid sans chaud. Les oiseaux sont au chaud, enfant. Ils reviendront vite chanter, ne t’inquiète pas.
Ils reviendront. Dans un été nouveau. Lors que la brise paternelle me tendra son premier souffle. Premier, premier pour avoir deuxième. Et troisième. Puis-je être premier si je suis seul? Je ne m’inquiète pas! JE CHANTE MÊME. Bientôt, les oiseaux viendront chanter avec moi. Une chanson printanière, une chanson heureuse. Je suis heureux.
Tu seras toujours premier. Mon premier. Enfant qui était mien, mais tu possédais son nom. Quand il est décédé, tu ne m’étais plus. Tu demeures mon premier, dès ton premier souffle. Comme le souffle de la brise, chéri. Tu restes ma première pensée à l’aube. Unique souvenir d’un printemps éphémère. Il n’est plus. Tu es seul. Seul, mais heureux, avec les oiseaux. Passe un bel été enfant. Tu pourras me voir bientôt dans le ciel. Papa brise, moi chant. Je chanterai, jusqu’à ce que mes cordes vocales n’aient plus d’oxygène, dans la piscine. Et lorsque l’air m’emportera, ce sera papa, les bras ouverts.
Tu n’as pas su faire face à tes obstacles maman. Tu y as cédé. Et quand je t’ai retrouvée, noyée, au fond de la piscine. J’ai courus. Seul, en quête du bonheur que jadis je possédais. Seul, à traverser l’immense gouffre de mon cœur à grandes enjambées. La pluie se mélangeait à mes larmes amères, j’ai glissé sur le trottoir délaissé. Je me suis allongé par terre, dans le gouffre, impuissant. Car seul, le deuil s’installe. Souffrance imperméable. Elle ne s’est pas noyée dans l’énorme orage qui s’enivrait à l’horizon. Elle est restée. Il pleut maman. Les oiseaux ne sont pas là. Le ciel est gris, la brise est froide. Mon cœur l’est aussi. Tu es froide, froide, froide. Encore plus froide que je suis en ce moment, allongé dans mon océan sentimental. Je ne chanterai plus jamais.