Entre tes Griffes 1 (Publié Aux Éditions HLab)

38. Esprit de famille

Les garçons savent mettre de l'ambiance. Ils plaisantent sans arrêt. Ils sont plutôt drôles d'ailleurs. Ils se provoquent, se charrient et font le show. Je fais parfois les frais de leurs caractères facétieux. Mon poncho a animé une partie de leurs échanges. Ils peuvent dire ce qu'ils veulent, je l'adore et je suis trop heureuse d'avoir retrouvé mes vêtements. Mes couettes les inspirent aussi. Je me demande s'ils sont toujours comme ça ? En tout cas, leur bonne humeur est contagieuse. On rit beaucoup avec eux et ça fait du bien. Ils ne prennent vraiment rien au sérieux. Même pas le foot ! Ils ont beau être très différents les uns des autres, leurs liens semblent indéfectibles. Ils se comportent comme des frères. Terrence n'est jamais dans la démonstration. Tout le contraire de Zane qui en fait des tonnes. Sloan est le plus étrange des quatre. Peut-être parce que je le ne connais pas bien. Plus bougon, il observe la plupart du temps et lance subitement une remarque gênante, souvent en-dessous de la ceinture.

Assise à côté d'X, je ressens sa présence dans tout mon corps. Je ne sais plus trop comment me comporter avec lui depuis sa petite démonstration de force. Enfin petite n'est peut-être pas la meilleure façon de la qualifier. Je n'ai pas trop compris ce qu'il s'est vraiment passé dans cette douche. Qui est-il ? Qu'est-ce qu'il est exactement ? Il a pris de la masse, un peu comme Hulck lorsqu'il se transforme, avec en prime les griffes de Wolfverine, mais X est resté le même. Son visage, ses yeux n'ont jamais été aussi sincères qu'à cet instant précis. J'y ai lu toute sa fragilité. Comment peut-on être fragile en étant aussi fort ?

Dire qu'il m'a vue toute nue ! Et moi, j'en ai vu bien plus que je n'en demandais. X est hyper détendu. Je ne l'ai jamais vu aussi souriant. Il en est encore que plus craquant. Dès qu'il parle, ses acolytes le regardent avec une admiration, une forme de respect qui m'étonne toujours. C'est impressionnant. Lorsque June se lève pour aller chercher le dessert dans le four, les garçons ne cachent pas leur impatience. Ils sont excités comme des enfants.

—     Vous appréciez le dîner ?! demande June, telle une maman ravie de nourrir ses turbulents garçons.

Quand je me lève pour aider à débarrasser les assiettes, X pose sa main sur ma cuisse nue. C'est comme un électro choc.

—     On s'en occupe, dit-il en se levant. Ils se lèvent tous en même temps. Kim et moi nous rasseyons.

—     Qui veut du café ? demande June.

—     Il nous manquait des petites femmes à domicile, plaisante Zane.

—     Rêve pas, les femmes aux fourneaux, c'est fini depuis longtemps, répond-elle en déposant un énorme gâteau, fumant une odeur divinement appétissante sur le comptoir. June découpe de généreuses parts et demande subitement : c'est quoi votre secret les gars ?

Tout à coup, il y a comme un froid entre nous. Les garçons se ferment. La remarque de June est vécue comme une intrusion. En tout cas c'est l'impression qu'ils donnent.

—     Quel secret ? demande Terrence sorti de sa réserve.

Sans être plus perturbée que ça par leur réaction, June continue. 

—     Vous vivez ensemble, vous jouez ensemble, vous sortez ensemble, vous ne vous quittez jamais ? Vous en avez pas marre parfois de voir vos sales têtes ?!

Ils rient tous joyeusement et tapent sur la table. Ju les a bien eus. Je la reconnais bien là.

—     On ne fait pas tout ensemble, précise Sloan avec un air de conspirateur sur le visage. Il ne faut pas croire tout ce que t'entends.

On voit très bien à quoi il fait allusion.

—     On n'est pas compliqué, c'est tout. On ne se prend pas la tête et on prend du bon temps, continue Z.

—     Ouais, on peut dire que vous savez profiter de la vie, dis-je.

—     Vos soirées sont oufs, ajoute Kim.

—     On en organise une demain soir, lance Zane.

—     Vous organisez une fête ? dis-je surprise par leur désinvolture.

—     On ne va pas s'arrêter de vivre, intervient Sloan.

—     Ça ne nous empêche pas de prendre les événements au sérieux, coupe X.

—     Ce n'est pas une fête d'étudiants. Elle a lieu ici, précise Zane.

—     Mais vous ne serez pas de la partie, tranche X.

—     Ah et pour quelle raison ? dis-je sèchement.

—     Je meurs d'envie d'assister à une de vos soirées au château, implore Kim. Sloan a raison, on ne va pas s'arrêter de vivre. On ne restera pas longtemps.

—     On ne vous empêchera pas de draguer si c'est ce qui t'inquiète, j'ajoute en le fusillant du regard.

—     On sera trop occupés pour vous surveiller, dit-il d'une voix ferme et sans appel.

Pour qui il se prend encore pour nous donner des ordres ?

—     Oh, tu veux garder un œil sur lui, me taquine Zane, au cas où il serait tenté d'aller voir ailleurs.

—     Pourquoi ? Tu me consoleras si ça arrive ? Je rétorque de façon dédaigneuse.

—     Ça peut se faire, dit-il amusé. L'idée est plaisante.

Je lève les yeux au ciel. Les filles se marrent. X n'apprécie apparemment pas sa remarque.

—     Mais tu as neutralisé ce psychopathe, dis-je.

—     Je te l'ai déjà dit. Ce n'est pas le bon, s'énerve-t-il. Et tu as pu remarquer qu'il se passait dernièrement des événements pour le moins inquiétants ?!

—     Et en quoi ça te concerne ?! dis-je sans me démonter, énervée moi aussi.

—     Ouais, c'est vrai ça ! ajoute Ju qui n'apprécie pas sa façon de me parler et sent bien qu'ils nous cachent des choses. Et c'est quoi cette histoire de territoire ?!

—     Pourquoi ? Vous avez des réclamations à faire ?! tempête-t-il en se levant. Saskia, tu dors ici ! Je compte sur toi June pour lui faire comprendre qu'après avoir été violemment attaquée, elle devrait prendre les choses plus au sérieux.

X se contient, je vois bien qu'il n'a pas l'habitude d'être contesté.

—     De quoi il parle ? demande Ju.

—     Merci pour le dîner, conclut-il avant de prendre sa veste et de sortir.

L'ambiance s'est figée tout à coup.