Partie sans titre 16

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  Elle avait passé sa journée du samedi à somnoler sur son divan devant des films de série B en compagnie d'Agathe qui ronronnait plus que de raison. Le dimanche, elle s'était préparée, il était onze heures. Elle fermait la porte de chez elle, le bouquet de roses rouges à la main, elle prit le chemin de l'arrêt de car pour la conduire à son lieu de rendez-vous. En chemin, elle s'arrêtait un instant, persuadé d'être observé, elle se retournait et observait les alentours.

-Encore ton imagination Kérélys, marmonnait elle. Tous les ans, elle avait ce sentiment qui l'envahissait dès qu'elle empruntait cette route. Celui d'être épié, étudié minutieusement. Elle prenait place sur le banc pour attendre son bus. Elle aurait pu prendre sa voiture mais non, depuis bientôt quatre années, elle ne l'avait pas touché. Seul Josh un ami d'enfance la faisait rouler de temps en temps et malgré les réprimandes de ce dernier, elle ne pouvait pas reprendre le volant de cette voiture !

Dix minutes s'écoulèrent, son moyen de locomotion prenait place face à elle. Elle montait les quelques marches pour approcher le conducteur à qui elle tendait sa carte d'abonné. Le chauffeur connaissait bien Kérélys, il faisait partis des clients du bar et était un ami de ses parents.

-Bonjour Kérélys. Lui lançait-il amicalement.

-Bonjour Maxime, répondait elle en voulant paraître amicale, mais au fond d'elle, elle désirait que cette journée se termine, que cette date n'ait jamais existé. Elle prenait la direction des sièges du fond sous l'à-coup du car qui reprenait sa route. Elle avait sa place comme chaque année, le siège au fond à gauche celui qui est collé à la vitre....

Une bonne vingtaine de minutes s'écoulaient dans le silence, elle n'avait jamais cessé de porter son regard sur le paysage qui se jouait devant elle, tout était si différent à chaque fois. Le bus prit le chemin de son ancienne rue, celle de son enfance. Elle aperçut Mme Storm qui jardinait en gardant d'un œil avisé ses petits-enfants. Kérélys souriait à l'image qui se jouait devant elle. Elle aussi avait connu ce bonheur d'avoir une famille qui l'aimait, une famille qu'elle n'avait plus.

Son arrêt approchait, elle sentait la boule au creux de son estomac se forer une place, l'air chaud de l'été n'arrivait pas à la réchauffer, elle avait froid, cette froideur annuelle la glacant de l'intérieur était revenu. Elle inspirait encore en descendant les marches pour arpenter les quelques minutes qu'il lui restait à parcourir. Ses pas devenaient lents, sa main tenait avec fermeté les tiges des roses.

Ça y est, elle était face à la grille noire, elle cessait de marcher, regardant le sol avant de fermer les yeux pour chasser ses souvenirs qui la hantaient...

D'un geste tremblant, elle poussait cette barrière qui se mettait à grincer sous son déplacement. Les pieds de Kérélys rentraient en contact avec des cailloux qui venaient d'être ratissés. Elle tournait à droite puis à gauche, elle pourrait faire ce trajet les yeux fermés. Des échos de rires d'enfants parvenaient à ses oreilles, lui révélant l'insouciance de leurs jeunes âges. Enfin elle était arrivé, elle portait les roses face à elle, les humait en les serrant contre elle avant de les poser dans le vase.

-Joyeux anniversaire Kyle, déclarait-elle tout en laissant les larmes perler de ses yeux,  à la tombe face à elle !

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Il observait le chemin que prenait la jeune femme, il avait compris qu'elle ne lui révélerait pas sa véritable adresse et il n'en avait que faire car il connaissait le lieu exact de l'habitation de Kérélys. Il avait feint l'ignorance lorsqu'il l'avait reconduite chez elle. Préférant que cela vienne d'elle en personne. Quand elle lui avait avoué être conviée à un anniversaire, il avait sentis le mensonge dans sa voix... Le samedi soir, il était allé rendre visite à Maître Emmeris par sympathie comme souvent ils échangeaient les soirs où il n'y avait aucune soirées de prévues. A sa plus grande surprise, son ami était en compagnie de Flore, il avait entamé un début de conversation avec elle, prêchant le faux envers cette femme qui, au final avait sans le remarquer avouer à Sébastian que Kérélys partirait de chez elle aux alentours de onze heure du matin. Il avait pris congé de son ami pour rentrer chez lui...

Il patientait depuis plus de quarante-cinq minutes devant le cimetière. Une silhouette s'avançait entre les tombes, il reconnaissait Kérélys le visage baissé, le teint laiteux s'accentuait par la noirceur de ses cheveux. Il inspirait fortement en sortant de sa voiture, lui aussi connaissait bien ce lieu où il venait jamais, n'acceptant pas que la personne qui dort sous une pierre tombale soit morte ! Il était à la hauteur de la grille quand la jeune femme l'ouvrait pour sortir de cet endroit.

Il ne bougeait pas, son regard posé sur elle. Kérélys relevait sa tête et fut surprise de tomber sur Sébastian. Elle reculait de trois pas en portant sa main à son ventre.

-Mlle Blum, je vous croyais à un anniversaire ?

-Oui.. Enfin non il a été annulé à la dernière minute. Excusez-moi mais je dois rentrer chez moi. Crachait-elle en essayant de fuir.

-Kérélys ! ordonnait-il d'un ton ferme faisant stopper toutes avancées de la jeune femme qui se mettait à frissonner par le ton qu'il venait d'employer. Vous ais-je fais quelques choses de mal qui vaille la peine de me fuir ?

-Non, inspirait elle en se retournant pour lui faire face. Mais j'apprécierais que vous cessiez de me suivre !

-Vous suivre ?

-Oui, comme par enchantement Mr Harrington, vous venez au cimetière le même jour que moi ! déclarait-elle amèrement.

-Ma nièce est enterrée ici Mlle Blum ! Dois-je vous conduire à sa sépulture pour vous prouver que je ne mens pas ?

Kérélys relevait les yeux, gênée d'avoir cru qu'il la suivait elle essayait de se morfondre en excuse mais les tentatives qu'elle employait la faisaient sombrer encore plus.

-Cesser de vous excuser ! suppliait-il d'ennui. Laissez-moi vous reconduire chez vous ou peut être allez-vous me dire que vous êtes invitée à ... un départ en retraite ?

-Cela est très amusant Sébastian, non je ne suis pas conviée à un départ en retraite mais à une petite sauterie, dans la petite église de mon quartier. Si cela ne vous dérange pas de m'y conduire, je vous en remercie d'avance ! rétorquait-elle avec énervement en se dirigeant vers la voiture de col mao.

Le regard que lui lançait Sébastian était colérique. Il prenait place dans sa voiture en regardant Kérélys caresser le capot avant qu'elle ne rentre à son tour dans l'habitacle. Il verrouillait les portes sans quitter du regard la jeune femme qui plissait les yeux de colère.

-Que faites-vous ?

-Je vous kidnappe Mlle Blum, vous m'aviez promis de me revoir avant dimanche soir.... Et nous sommes dimanche donc vous êtes à moi pour le reste de la journée !

La rose dominante,                (pétale rouge)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant