Une fois m'est arrivé une mésaventure qui m'a donné envie de d'écrire ceci. J'étais *dans un lieu public* et j'ai sorti de mon sac pour je ne sais quelle raison un drapeau français que j'avais reçu pour mon anniversaire de la part d'une fille d'une petite dizaine d'années. Dessus était inscrit l'aphorisme d'une intelligence certaine : "A bat la France". Mal m'en a prit car une autorité supérieur vint me voir et me demanda de lui restituer l'objet du crime. Il y vit l'inscription et m'interrogea avec une pointe de condescendance et d'énervement pourquoi j'avais cela. Lui dire que c'était une blague ne suffit pas et l'on m'enguirlanda plus encore quand je protestai sur le fait de n'avoir qu'exprimer un avis (que je ne partage évidemment pas, cela va sans dire) - et encore, je n'ai pas montré le drapeau sur tous les toits, je l'ai juste sorti de mon sac. Quelle fut ma surprise quand j'appris que l'on ne me reprochai pas de montrer "À bas la France" (bien qu'on puisse en douter) mais que c'était écrit sur le drapeau français.
En effet, l'outrage à un quelconque symbole national est puni jusqu'à 1500€ d'amende selon le décret no 2010-835 du 21 juillet 2010 relatif à l'incrimination de l'outrage au drapeau tricolore : "est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe le fait, lorsqu'il est commis dans des conditions de nature à troubler l'ordre public et dans l'intention d'outrager le drapeau tricolore : 1° De détruire celui-ci, le détériorer ou l'utiliser de manière dégradante, dans un lieu public ou ouvert au public ; 2° Pour l'auteur de tels faits, même commis dans un lieu privé, de diffuser ou faire diffuser l'enregistrement d'images relatives à leur commission."
Cela dit, on peut se questionner sur le bien-fondé de cette interdiction, qui ne provient d'ailleurs pas d'une sombre décision d'un illuminé nationaliste pendant une quelconque révolution puisque ces questions ont été appliquées en 2010 et, pour l'hymne national, en 2003. La France, un pays prônant la liberté d'expression interdit la critique, soit-elle constructive, de ses symboles. Certes les avis exprimés par la brûlure d'un drapeau ou le sifflement d'un hymne ne sont pas très intelligents, et moi-même ne suis pas très fier de cette phrase sur ce drapeau, mais déjà il n'est pas exclu de voir apparaître conte ces symboles, des idées pertinentes (qui sont assez nombreuse). Celui qui le fait attend généralement un débat qu'il n'a pas s' il ne le demande pas par la force, il ne veut pas voir brûler le pays, sinon son avis n'a pas sa place dans ce débat et on se demande alors pourquoi l'état en prend compte, c'est un vrai caprice. C'est vrai que la dimension historique de ces symboles qui témoignent des progrès qu'a fait le pays sont importants mais les rendre intouchables, c'est symboliquement interdire ceux qui réfutent ces progrès ou qui en veulent plus, d'exprimer leur avis.
Au pire des cas, c'est une atteinte à la liberté des expressions de la part d'un état qui se veut irréprochable esquivant par la réprimande les débats, au mieux une tentative désespérée de se faire respecter par une toute petite minorité bruyante.
