Chapitre 0 : Prologue

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Il est 22h30, une pluie torrentielle, bien qu'habituelle, s'abat sur la ville. De rares éclairs parsèment le ciel, se reflétant dans les flaques qui se créent progressivement, glissant sur l'asphalte sous forme de petites rivières noires pour aller finalement se jeter dans les égouts. De vieux lampadaires éclairent timidement les rues, clignotant de temps à autres comme s'ils menaçaient de s'arrêter brusquement et de plonger les environs dans les ténèbres. Le bruit des gouttes est incessant, assourdissant. Assez fort pour cacher les bruits de pas d'un jeune adolescent qui marche mornement sous la pluie, le casque sur les oreilles, si bien que personne ne l'entend mais qu'il n'entend pas plus, l'eau frappant inlassablement sur les parois du casque et le son bien trop fort pour passer outre cet orage tonitruant. Il ne marche pas vite, ne paraissant pas se soucier du temps pourtant extrême, ne se demandant même pas pourquoi la rue paraissait si vide. De temps à autres, il tâte la poche de son manteau, passant ses doigts sur les contours de l'objet qui s'y trouve, comme si la peur de le perdre passait avant le besoin de se mettre à l'abri de la tempête. Un fort vent souffle, soulevant derrière lui une capuche qu'il n'a même pas prit la peine de mettre, faisant s'envoler les feuilles d'automne récemment tombées des vieux chênes bordant la route. Au moment où il passe à côté d'une stèle commémorative, dressée il y a maintenant plusieurs années pour les héros de la dernière guerre, un éclair zèbre le ciel, faisant légèrement lever la tête au garçon, mais laissant à peine voir son visage. Il rebaisse la tête, comme plongé dans ses pensées, palpant une fois de plus le contenu de sa poche. Une voiture passe, il s'arrête. Regarde autour de lui, puis repart, marchant soudainement plus vite, comme s'il venait de prendre conscience de quelque chose. Les bâtiments, hauts et collés les uns contre les autres, semblent menaçants sous la lumière faiblarde des luminaires qui peinent à dessiner l'ombre de ces imposants murs faits de béton et d'acier. La rue débouche soudainement sur une place, rendue lugubre par le temps diluvien, place qui serait sans doute un bel endroit s'il ne pleuvait pas tant, si les fleurs ne se noyaient pas dans un mélange de terre et d'eau, et si les bancs n'étaient pas couverts de mauvais graffitis. Le garçon longe les murs et s'engouffre dans une ruelle, à peine visible sous la faible luminosité. Il passe derrière les bâtiments, tourne au bout du chemin et grimpe par un escalier qui ressemble à une sortie de secours, mal accrochée, brinquebalante et rouillée. Elle mène à une fenêtre, qui semble ceci dit aussi servir de porte à l'appartement. Le jeune garçon l'ouvre prestement, se faufile à l'intérieur et la referme derrière lui, laissant la pluie se déchaîner sur d'autres que lui, si tant est que quelqu'un d'autre soit encore dehors par ce temps. Trempé, il lance négligemment sa veste sur un porte manteau, traversant l'endroit en faisant claquer ses chaussures mouillées sur le parquet. Sans prendre la peine d'allumer la lumière, connaissant probablement l'endroit comme sa poche, il enlève ses chaussures et s'affale sur son lit avec un long soupir. Passant la main sur son front pour faire remonter une mèche tombante, il regarde le plafond quelque minutes avant de se tourner sur le côté et, au bout de quelques minutes, à s'endormir, ne se souciant plus de l'eau frappant violemment contre le toit. Pourtant, à chaque fois que l'orage retentit, le flash qui l'accompagne illumine brièvement la pièce, et dans la poche de la veste qui pend, mal accrochée sur le mur, l'éclat d'un objet métallique révèle un objet pour le moins étrange...

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