Quel cauchemar.
Quel cauchemar, quel cauchemar.A peine descendue, ma mère me présente à nos invités.
"Monsieur le maire... je vous présente ma fille. Chloé. L'Artiste de la famille !"
On est d'accord qu'aucun "artiste" n'aime quand on dit ça devant lui ? Si ? Sérieux... C'est déjà arrivé ?
Je me force à sourire en essayant de ne pas croiser le regard de sa progéniture qui, elle, ne m'a pas quitté des yeux. Il a l'air gentil. "Môsieur le maire"... Il me fait penser à un bon gros nounours. Celui qu'on rêve tous d'avoir quand on est petit... Je lui serre poliment la main et il me dit avec un sourire :"Ravi d'enfin te rencontrer, Chloé ! J'ai beaucoup entendu parler de toi.
-De même, monsieur.
-Appelle-moi Frédéric.
-Très bien, Frédéric.
-Je te présente ma femme, Héléna."Je lui serre la main en souriant. Elle est belle. Je comprends mieux de qui tient Léa. Cette femme est magnifique. Grande, bien formée, elle semble gentille, polie et surtout... son sourire est éclatant. En la regardant intégralement, j'en profite pour admirer le chic avec lequel elle s'est habillée. Sa robe moulante, au dessus des genoux, brille d'un mauve discret. Elle est belle. Vraiment belle. Mais pas plus que...
"Et tu connais déjà mes filles, non ? continu le maire.
-E-Effectivement..."C'est Maeva qui s'avance la première. J'ai une remontée... Je retiens. Je ne détourne pas le regard. Elle me tend sa main dans un sourire satanique. La dernière fois qu'elle m'a serré la main, ça a été Hiroshima dans ma tête. Je ne sais pas si j'ai envie de revivre ça... Pour ma mère.
J'accepte la poignée de main qu'elle m'offre.
J'irais me laver les mains avant de manger.
Je retiens un cri de douleur.
Elle me dit :"Ça fait longtemps Cloclo ! Viens au centre commercial avec nous la prochaine fois !
-Eehh... Avec... plaisir...."Je me suis vomi dans la bouche.
Jamais je n'irais nulle part avec elle, c'est mort. Déjà elle est chez moi donc elle va se calMEEEERRR ! PUTAIN ELLE SERRE FORT LA P***!!!
Elle me lâche....
Je la hais.
Je la hais, je la hais, je la hais.
Comment des gens comme elle peuvent exister... C'est si contradictoire quand on voit..."Chloé."
...Elle...
"Léa..."
On se serre la main, sans grand enthousiasme. Elle semble si triste. Si déçue. Si... Vide. Ce n'est pas la Léa que je connais. Merde. Je ne me suis pas éloignée d'elle pour qu'elle me revienne si déprimée. C'était pour l'entretenir justement... Mais c'est moi qui...c'est ma faute...
On se lâche. J'ai froid. J'aurais aimé ne jamais perdre le contact. Elle est belle. Elle est magnifique. Mais... Elle ne sourit pas... Alors elle ne brille pas. Il n'y a pas l'éclat habituel qui émane d'elle.
Je me sens arrêtée dans mes inquiétudes à cause d'une main sur mon épaule. Je me retourne. Ma mère."Chloé, tu aurais pu faire un effort...
-Ha ? Qu'est-ce que tu veux dire ?
-Vestimentaire."Je me regarde. Effectivement. Ce n'est pas très adapté. Comme j'ai fais de la peinture cet après-midi, j'ai mis ma salopette trop grande. Elle a des tâches de couleurs un peu partout. Mes cheveux sont décoiffés. Mes mains sont sales. Je n'ai qu'un débardeur noir en dessous. C'est vrai que c'est un peu familier.
Mais je me vexe..."Déjà je suis là... ça devrait te suffire.
-HAHA ! HA OUI ! s'exclame Frédéric. Moi non plus à son âge je n'aimais pas les dîners de ce genre ! Votre fille est ravissante, ne la blâmez pas madame.
-Mais tout de même...! se défend ma mère.
-Ne disiez-vous pas, il y a quelques instants, que c'était l'Artiste de la famille ? Ça se confirme, non ?"