Gamins

Chapitre 11. Dérapage Contrôlé

——Violette——

— Ça te dit un ciné ? proposai-je.

À vrai dire, je n'avais plus vraiment d'inspiration pour faire sourire Deen, je savais qu'un très bon feel good movie était au cinéma ces derniers temps et je me disais que cela pouvait nous faire du bien à l'un comme à l'autre.

— J'ai l'impression d'être à un rencard d'ados là, grogna-t-il.

— Tout doux, c'est pas parce que je te propose un ciné que j'ai envie que tu me roules des pelles dans la pénombre.

Deen fit danser ses sourcils et m'adressa un sourire charmeur.

— C'est c'qu'elles disent toutes.

Mon Dieu, il venait de plaisanter.

J'allumais une cigarette en souriant, je ne parvenais pas vraiment à définir nos attitudes respectives. Il me semblait que Deen non plus, parfois j'avais l'impression de l'agacer, d'autres fois qu'il m'appréciait. Nous ne flirtions pas, mais sachant que c'était déjà arrivé, je ne pouvais m'empêcher de penser que les jeux de séduction n'étaient jamais vraiment loin.

— Va pour le ciné, j'y suis pas allé depuis une éternité.

J'écrasai ma clope à moitié fumée et plaquai ma planche sur le béton du quai. D'une impulsion, je m'élançai le long du bassin. Les lumières des immeubles et des péniches se reflétaient dans l'eau noire, c'était plutôt beau. Je fis un petit tour et revins vers Deen qui s'était levé pour jeter son joint.

Faisant mine de lui foncer dessus, je l'esquivai au dernier moment en riant de son air ahuri.

Un chapelet de jurons lui échappa et lorsque je me rapprochai une deuxième fois, plus doucement, ses mains se posèrent sur mes épaules pour m'arrêter.

Le dos plaqué contre son torse, sa barbe me chatouilla l'oreille et j'entendis sa voix grave me murmurer :

— Calme toi, la môme, tu me donnes le tournis.

Je me sentis un peu rougir et un frisson parcourut ma colonne vertébrale.

Mais je me repris bien vite, retournant ma planche pour lui faire face.

— T'essaie de faire quoi là ? demandai-je.

Il ne répondit pas et me fit simplement un petit clin d'œil.

— On y va ?

Fallait qu'il se calme le grand-père, c'était pas parce que j'avais vingt ans et peu d'expérience que je ne connaissais pas ce genre de petits jeux.

— Oui.

Je roulais tranquillement à côté de lui qui marchait les mains dans les poches. Le cinéma n'était pas loin.

— Suis moi, dis-je en arrivant devant, Ken m'a expliqué comment entrer sans payer ici.

Mais alors que je partais comme un feu follet, il me retint par la capuche de mon sweat et je manquai de m'étrangler.

— Ça va pas non ?

— Tu crois vraiment que je sais pas comment on rentre sans payer ? Ce cinoche on y a passé du temps avec Eff et Ivan, c'est nous qui avons appris aux mecs de Paris Sud à entrer ici.