Posé devant son pupitre, il n'était pas des plus à l'aise. Pour cause, il n'avait pas préparé de discours cette fois. Tant pis, de toute façon il ne les suivait jamais vraiment. S'il lisait une phrase complète, il ne savait même plus ce qu'il disait et pourquoi il le disait. Son audience voulait de l'authenticité alors il allait leurs en donner. Et tout compte fait, c'était certainement eux qui n'étaient pas préparé.
— Vous savez, je n'avais pas envie d'être ici en face de vous. Je n'avais pas envie de justifier des actes qui me paraissaient nécessaires. Je n'avais pas envie d'écouter les journalistes de sensation poser leurs questions sans connaître le sujet mais seulement pour vendre un format papier de leurs torchons. Je suis pourtant ici, devant vous. Nous avons fait du chemin, loin des dictatures capitalistes et de leurs propagandes sans fins. Nous avons rejeté tous les idéaux du passé, comprenant leurs limites. Ce n'est pas les idées d'un homme qu'il faut mettre en pratique sur tous mais ce sont bien les idées de tous qu'il faut mettre en pratique sur chacun. J'ai été élu sur des idées qui ne sont ni nouvelles ni originales. Des idées comme le partage, l'entraide, l'économie de la connaissance, l'épanouissement. C'est avec ces idées, ces motivations que vous m'avez élu. Ici, lors du vote, il n'y avait pas de média, pas de télé, pas d'ordinateur, pas de téléphone. Aucune forme de propagande n'était envisageable à ce moment. Dur pour les riches et puissants de nous manipuler sans images et sans sons. Sans cette constante omni présence d'un candidat, qui fera plus de plateau, plus de une et pour qui on s'assurera de ne laisser publier que les articles positifs. Combien d'années ? Combien d'années avons-nous passé à croire en des truands, des exploiteurs. Combien de fois avez-vous vue cette personne une fois au pouvoir perdre sa compréhension du bas peuple et l'exploiter au bénéfice des riches ?
J'entends les critiques. C'est juste qu'elle ne m'intéresse pas. Lorsqu'il est simple de pointer du doigt, il est toujours plus dur de tendre une main. Si vous voyez ce qui ne va pas proposez dont une solution plutôt qu'une dénonciation. On a bien vue les tenants et aboutissants de la critique et de l'argent profusion. Depuis combien de temps l'argent qui nous gouverne n'est-elle plus un bout de papier mais un chiffre derrière un ordinateur ? On vous a dit que vous étiez faignant parce que vous ne vouliez pas faire ce travail que personne ne voulait faire. On vous a dit que rien ne vous intéresse mais quand vous trouver votre intérêt on vous dit que ce n'est pas pour vous, on vous dit de rester à votre place ? Hé bien plus jamais de cela. Le pouvoir au peuple, par le peuple, pour le peuple ! Aujourd'hui, est la fin de l'ère de l'Homme et le début de l'ère de l'Humain !
Il n'était pas particulièrement fier de lui, malgré le nombre d'applaudissement, la foule était aussi agitée qu'à un concert de rock star des années 80. Il aurait voulu ajouter que son rôle était de connecter les citoyens entre eux et pas de dicter leurs conduites, il aurait voulu leurs dire à chacun de trouver leurs passions et de s'y adonner corps et âmes comme si leurs vies ne tenait qu'à sa, que leur but sur terre était plus important que leur simple présence. Mais il avait tendance à s'emporter, plus ses discours s'éterniser, plus ses pensées devenaient personnelles et son ton spirituel, tout cela au déficit de la compréhension commune. Les discours se devaient d'être bref, synthétique et relativement scientifique, sinon son audience ne le considérerait plus comme un dirigeant mais comme un gourou, il avait fait cette erreur par le passé, c'est cette erreur qui l'avait mené au il était et pourtant, plus jamais il ne la ferait.