HARAKA
De retour avec son café, l'inspecteur semblait déjà attendre avec impatience le reste de l'histoire.
« Alors? »
« Alors, la routine est embarquée. Chaque jour, je tombais un peu plus. Je n'étais pas fou. Elle était seulement tout ce que j'avais toujours désiré.
« J'ai longtemps cru être seul, malgré mon intégration. Lorsque venait le temps de quitter le soir, vers seize heures, je me sentais démuni, impuissant et rempli de solitude. Je retournai chez moi par autobus, faisant les frais de dizaines de regards haineux de citoyens qui m'accusaient des maux que j'avais fuis.
J'entendais des bruits de train. Ce bruit qui m'avait libéré et qui en avait libéré tant d'autres. Ce bruit qui m'avait égayé plus jeune. Et qui, maintenant, était un souvenir de malheur, de souffle étouffé. Il passait devant mon arrêt de bus, m'amenant avec lui dans des souvenirs qui me laissaient toujours cette envie de pleurer.
« Travailler était ma source de bonheur ultime. C'était les seuls moments où je la voyais. C'était ma seule raison, ma seule motivation, moi qui était de nouveau chez moi.
Les activités hebdomadaires me permettaient de me rapprocher d'elle en dehors du bureau, c'était ma meilleure chance d'être autre chose que le nouveau.
Souvent, le tout se résumait à une soirée de bowling qui se résumait à être fille contre garçon et qui finissait toujours avec un verre au bar d'à côté après une victoire immanquable des filles.
« Malgré toutes ces occasions, j'avais l'impression de tourner en rond. Je ne savais comment l'aborder et chacune de mes tentatives s'étaient soldées par un échec, pas qu'elle refusait, mais je finissais toujours par avoir peur.
Je me trouvais devant un mur. Le mur de ma peur. Et j'étais incapable de le briser.
Mais elle avait tout deviné. C'est elle qui l'a fait, c'est elle qui l'a brisé en m'invitant à prendre un café avec ses amis. Cette demande m'avait tellement rendu heureux que j'ai eu l'impression de lui donner peur par ma réponse brutale.
Enfin, elle voulait me voir autrement que comme un collègue.
« Je m'étais fait tout beau pour l'évènement. Ma hâte dépassait l'entendement. Ma chemise à carreaux de couleur bleu était même de la même teinte que mes bas. C'était mon premier rendez-vous depuis mon arrivée et ça faisait tellement longtemps que l'on aurait dit que j'étais un jeune garçon de quatorze ans lors de son premier rendez-vous. L'excitement me rendait plein de sueur, j'avais l'impression que l'odeur m'empestait à un point même où je croyais n'avoir même pas mis de déodorant, j'avais tellement été stressé par l'annonce qu'une acné d'anxiété m'était venue et je m'étais même raté lorsque je m'étais rasé. En me regardant dans le miroir, les cheveux un peu trop longs, trois boutons déjà vidés, deux petites blessures pas encore coagulées avec un reflet de sueur sur ma ligne du cou tout ce que je pouvais me dire c'est : Pathétique. J'étais à la limite du pathétisme.
Lorsque nous sommes arrivés, j'ai vu que plusieurs d'entre nous étaient de nationalités différentes. En fait, tout le monde avait invité quelqu'un en intégration, je trouvais ça tellement beau comme partage de culture et j'ai apprécié ma soirée comme l'une des meilleures.
J'avais été tellement maladroit, m'échappant même de la sauce sur le carreau blanc de ma chemise, versant accidentellement un peu de café sur sa jupe. Elle m'avait souri, m'a chuchoté que ce n'était pas grave sous les regards rieurs de ses amis. Ils avaient tous été très gentils, ils me posaient des questions sur mon boulot, sur mon pays natal et malgré que je cherchasse à rester vague, ils semblaient être heureux et me demandaient malgré tout pourquoi je n'étais pas resté là-bas.
Surtout qu'après le café, elle avait accepté de venir à mon appartement.
Rendu sur place, on a commencé par prendre un verre d'eau, assis sur mon divan. Elle me racontait un peu la vie de ses amis, mais malgré tout ce qu'elle a dit, mon attention était seulement centrée sur une chose : ses lèvres. À mesure qu'elles bougeaient, le monde semblait s'ouvrir en elle et chaque mouvement était une œuvre.
Je ne peux même pas dire qui a commencé le tout, tout ce que je me souviens, c'est lorsque j'ai repris conscience de la chose, mes lèvres étaient sur les siennes, les dévoraient, les savouraient et que la plupart de nos vêtements étaient sur le sol. Son corps semblait appelé désespérément mes mains et cet instant de luxure me permit de croire en la vie. Parce que c'est tout ce qu'il me restait d'elle. »
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Mes démons portent ton nom
No FicciónLe feu qui habite la vie, le feu qui habite l'amour, qui danse au milieu de la nuit, qui chante la fin de chaque jour. Chaque titre est un vers de poème et le texte dessous n'est que ce qui se situe normalement entre les lignes, cet espace blanc qui...