𝐒𝐓𝐑𝐄𝐍𝐆𝐓𝐇

𝐧𝐢𝐧𝐭𝐡

Peu à peu, alors que j'ouvre lentement les yeux, mes souvenirs et tout ce qu'il s'est produit hier me reviennent en mémoire. J'ai l'impression de n'avoir jamais vécu ce moment... Pourtant, le mouchoir enfoncé dans ma narine gauche ainsi que le léger goût amer et métallique du sang résidant dans ma gorge peuvent en témoigner...

J'essaye de me redresser... mais sans succès. J'ai beaucoup utilisé mes muscles hier... Tellement que j'en ai des courbatures qui ne sont pas prêtes de me lâcher...

Ji Min.... Ji Min n'est plus là.
L'attention qu'il me portait... c'était si... satisfaisant ? Je me sentais importante en fait, bien plus que je ne l'ai jamais été en tout cas.

Jamais au grand jamais je lui dirais que je l'aime. Je n'ai aucune chance et puis, je ne suis certainement pas assez confiante. Rien que tenter ne serait-ce qu'entrouvrir les lèvres pour le saluer me semble impossible.

En primaire, on avait été en "couple"... mais j'estime que ça ne compte pas à un âge si innocent. Et maintenant... Pourquoi nous ne le sommes plus ? Eh bien... Je n'ai jamais vraiment compris pourquoi. Ça me dépasse de ne même pas réussir à me souvenir d'un mot, d'une situation... ou bien d'un simple souvenir concernant une quelconque séparation. Ceux qui occupent mon cerveau y prennent si peu de place que je finis par les oublier, peu à peu.

Tout ce dont je me rappelle, c'est qu'il a commencé à me détester au collège... et ses amis aussi. Pour mon frère, ça a été pareil... Ji Min ne m'aimait plus mais pour moi, ça n'a jamais changé. Le destin souhaite clairement que je l'aime à en souffrir... Oui, c'est exactement ça !

Mais moi, je ne veux pas l'aimer ! Il est idiot, méchant, détestable même ! Et pourtant... il a ce truc qui me fait rougir et qui m'attire à lui tel un aimant.

Quelques fois, ça arrive : Je me perds dans son regard, admirative de ses pupilles aussi sombres que la nuit. Puis il finit par me remarquer puis me dévisager de la pire des manières ce qui, en général, me fait baisser la tête et me fait sentir honteuse...
Ça arrive quelques fois, oui...

J'ai essayé de ne plus l'aimer, de le détester jusqu'au dégoût mais... et si c'était impossible ? Pourquoi est-ce que je me sens si détruite quand il s'adresse à moi de manière violente et si détendue quand tout va bien et qu'il rit avec les autres ? Je ne sais pas.
Mais encore, si ça n'était que ça... Sauf que, comme je vous l'ai dit, la vie ne me fait jamais de cadeaux. Et il aurait été si simple que Yoso ne me fasse pas tant cogiter quand il apparaît devant moi... C'est tout bonnement con parce que je ne l'ai vu que très peu mais... Je ne sais pas... Ça n'est peut-être que du désir en fait.

À vrai dire, je n'ai jamais autant interrogé mon coeur de toute ma vie. Yoso m'intrigue tellement et... il est si gentil lui...

Finalement, c'est peut-être lui que je préfère ? De toute manière, m'imaginer avec Ji Min serait du grand délire... Ça ne vaut même pas la peine d'espérer que tout ce bordel émotionnel peut s'avérer réciproque...

Une femme rentre dans la pièce où je me trouve et ce n'est qu'à ce moment là que j'ouvre assez les yeux pour me rendre compte que je suis en fait à l'infirmerie.

"-Eh bien mademoiselle ! Nous nous croisons beaucoup en ce moment !", lance la responsable du petit endroit d'un ton bien trop enjoué pour apaiser ma mauvaise humeur déjà palpable.

Alors qu'elle se retourne pour ouvrir les petits rideaux qui privent l'endroit de toute luminosité, je marmonne dans ma barbe :

"-...C'est clair que si un morceau de sucre pouvait faire son effet sur un corps affaiblit, je ne serais jamais revenue et à mon plus grand bonheur d'ailleurs..."