Chapitre 48

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Sans surprise, les mots qui sortent de la bouche du Proviseur n'ont rien d'élogieux. Il nous compare tous trois à des enfants capricieux, qui ne savent pas s'amuser sans gâcher le plaisir des autres. Enfin, de manière un peu plus vulgaire peut-être. Il faut dire qu'à Fellpoint High, on accorde une importance toute particulière aux manifestations de ce genre. Aussi, je suppose que notre petit numéro l'a non seulement mis hors de lui, mais risque également de lui attirer les foudres des mères de famille qui estimeront que leur progéniture a été choquée par la scène. 

Lorsqu'il a finit son laïus, Monsieur Herbert nous intime de réfléchir à notre comportement, et de bien profiter de notre soirée, parce qu'après celle-ci, nos emplois du temps risquent d'être chargés. Sous entendu, je vais passer une bonne partie de mon temps libre en colle. Super, pile ce qu'il me manquait pour parfaire ce début d'année scolaire chaotique. Les yeux clos, je me pince l'arrête du nez alors que j'entend la porte arrière du gymnase claquer dans le dos du Proviseur qui nous laisse seuls.

- T'es fière de toi ? s'emporte Madison alors qu'elle tend la main pour me pousser contre le mur.

Cooper intervient pour la retenir, et cette fois, c'est à mon tour de m'emporter. Assez. Il est temps qu'elle arrête de jouer la victime, parce que, malgré ce qu'elle semble penser, elle n'est pas toute blanche dans cette affaire.

- Putain ! Mais tu t'entends un peu ? lâché-je, hors de moi. Tu vas sérieusement essayer de me faire passer pour la grande méchante de l'histoire ? 

Surpris par le ton venimeux que j'emploie et mon attitude menaçante, Cooper et Madison s'immobilisent, dans les bras l'un de l'autre. Et quand mon regard fait des allers-retours entre la taille de la petite blonde et les mains du grand brun posé sur ses hanches, il s'éloigne brusquement d'elle.

- Depuis la rentrée, tu me fais vivre un enfer, dis-je en faisant un pas vers elle, le regard noir. Les moqueries. Les photos. La danse. L'invasion de cafards...

A chaque nouveau rappel de ses méfaits, je plante un index dans son épaule. Et quand j'aborde le sujet qui me brûle la langue, je sens que mon ton change du tout au tout. Oubliée la gentille petite Jamie qui se laisse marcher dessus. Cette fois, je sors les crocs et la peste va en faire les frais.

- La fête ! La drogue dans mon verre ! La vidéo ! Et tu oses te plaindre parce que j'ai contre-attaqué ? Faut te faire soigner ma pauvre fille... lâché-je dégoûtée.

Madison lève les yeux au ciel, visiblement insensible à mon discours. Les bras croisés, elle laisse échapper un reniflement sonore et lâche finalement, dans une moue emplie de mépris:

- Mais bien sûr. C'est moi qui ai commencé... Je n'aurais rien fait si tu n'avais pas cherché à me voler mon mec. Et puis, je ne sais pas ce que tu insinues, mais je n'étais pas au courant de la fête à la fraternité, enfin pas avant d'avoir vu ton petit show le lendemain.

Je reste sans voix. Est-ce qu'elle dit vrai ? N'était-elle pas invitée, elle aussi, à la fête de Mike ? Nier les faits, ce n'est pas son genre. Madison a beaucoup de défauts, mais en règle générale, elle assume ses choix, surtout quand elle estime être dans son bon droit. Je jette un petit coup d'oeil à Cooper qui hausse les épaules, incertain. Madison profite de mon mutisme passager pour reprendre l'ascendant. Elle avance vers moi, l'air mauvais.

- Hein, pauvre petite Jamie, martyrisée par la grande méchante Madison... En attendant, le blog et les commentaires, je ne les ai pas inventés !

- Quoi... mais de quoi tu parles ?

- Euh... Elle est pas au courant que c'était moi, intervient Cooper, l'air embarrassé. 

A ces mots, le visage de la petite blonde se décompose. Elle passe de lui à moi, sans cesse, et finalement, elle fond en larmes avant de s'enfuir en courant. Et moi, je reste plantée là comme une idiote, avec l'étrange impression d'avoir loupé un épisode. 

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