Chapitre LXXVII : À l'étale du flot

107 14 7
                                    

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou mettre en ligne une autre image.


La nuit tombait sur le ludus Aemilia. Boudicca gémissait dans un coin. Des ronflements légers ou plus sonores habillaient le silence. Aeshma se leva. Doucement. Pas parce qu'elle craignait de réveiller ses camarades, mais parce qu'elle se sentait percluse. Ses deux chutes de cheval lui avaient réduit les os en bouillie. Elle trouvait incroyable de ne souffrir d'aucune fracture. D'aucune déchirure, d'aucun grave traumatisme. Un gladiateur l'avait écrasée lors de sa première chute et, gênée par Marpessa, elle s'était mal receptionnée lors de la deuxième. Les coups d'épée qu'elle avait pu recevoir, lui causait moins de douleur que ses épaules, ses côtes, ses hanches et toute la surface de sa peau couverte d'hématomes. Si elle n'avait pas gagné son surnom de Gladiatrice Bleue à cause de ses peintures, elle l'aurait gagné à cause de ses bleus.

Marpessa.

Aeshma sentait encore la chaleur de son front dans la paume de sa main, la chaleur de sa tête posée contre elle avec abandon.

Elle avait besoin de respirer.

Elle monta sur les terrasses. Elles étaient interdites d'accès aux gladiateurs.

— Où vas-tu ? l'arrêta un garde.

Tidutanus.

— Laisse-moi, Tidutanus, grogna Aeshma. J'ai besoin d'air.

Va dans la cour.

J'ai besoin d'espace.

Aeshma...

Tu as peur que je fasse le mur ?

Non. Mais les terrasses...

Ouais, blablabla... le coupa Aeshma.

Les terrasses.

Aeshma avait goût immodéré pour les terrasses. Un besoin de solitude ? Une colère à calmer ? Et la petite Parthe se réfugiait sur les terrasses. Elle pouvait y rester des heures, elle y dormait parfois. Comme d'autres quand les nuits d'été étaient trop chaudes à Sidé parce que Herennius autorisait les gladiateurs à dormir sur les terrasse des bâtiments intérieurs, tout comme, implicitement cette fois-ci, il autorisait Aeshma à s'isoler sur une terrasse.

N'importe quelle terrasse. Et Téos n'y avait jamais rien trouvé à redire.

Une habitude à laquelle elle s'adonnait depuis très longtemps. Elle lui avait valu des punitions quand elle était novice, au début. Pas seulement parce qu'elle se rendait sur des terrasses. Il n'y avait pas de terrasses quand ils voyageaient à travers les forêts et les plaines, Aeshma trouvait toujours quand même à s'isoler. Au pied d'un arbre, dans le creux d'un rocher, sur le bord d'une rivière.

Dans un lieu ouvert.

Elle choisissait toujours un lieu loin du regard des autres, mais Tidutanus avait fini par remarquer que ce n'était pas le seul critère qui déterminait le choix de la jeune gladiatrice. Aeshma veillait toujours à ce que le lieu fut ouvert, que ses yeux pussent se perdre dans la contemplation d'un paysage, de l'eau d'une rivière qui coulait, des étoiles suspendues au firmament. Et si l'horizon se dérobait, elle s'allongeait, et son regard s'abîmait dans le mouvement du vent sous les frondaisons des arbres.

Le sable rougeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant