L'air est chargé de paillettes et de serpentins multicolores. La fête bat son plein et personne ne s'inquiète de la couleur singulière de la lune. Après tout, depuis la défaite du Kishin, l'astre est constamment plongé dans sa camisole noire. Ou alors, les feux d'artifices empêchent tout simplement quiconque d'observer le rouge sanglant du ciel. Je la quitte des yeux et m'engouffre dans la foule, esquivant les passants alcoolisés.
Je tourne dans une ruelle, espérant rencontrer moins de fréquentations mais c'est peine perdue. La petite allée est aussi bondée que la rue principale où déambulent fêtards, touristes et riverains costumés. Par moment, le rugissement d'un dragon me fait regarder par-dessus mon épaule. Et à chaque fois, je découvre un immense dragon de papier coloré qui ondule dans la rue en faisant crier de joie les gens.
Je serre les dents. Sérieusement, je ne comprends pas l'intérêt de faire hurler ces choses inutiles. Elles ne servent qu'à me déconcentrer. Sans parler de toutes ses odeurs de nourriture alléchantes qui flottent dans l'air et me rappelle que je n'ai rien avalé depuis des jours. Mon estomac grogne et je lui intime de se taire en me remettant en route.
- Tu devrais t'arrêter. Au moins pour manger un petit quelque chose.
La voix de Tsubaki me sort de ma concentration. Je soulève ma cape et fixe la dague attachée négligemment à ma hanche. Le visage de ma partenaire apparait dans le métal, les yeux cernés de noir.
- En mangeant, nous gagnons des forces. Et nous en avons besoin. Nous serons plus performants une fois rassasié.
- Mais nous aurons perdu un temps précieux. Je suis sur que je tiens une bonne piste, je ne veux pas la laisser filer cette fois.
Et je reprends mon chemin. Je tourne dans plusieurs rues, me concentrant sur les différentes ondes. Mais elles se brouillent vite. Trop vite. Je dois me rendre à l'évidence, je ne suis plus assez performant. Tsubaki a raison, comme toujours. Je m'engage dans une nouvelle rue, suffisamment calme et attrape la dague. Ma coéquipière comprend immédiatement et se retransforme devant moi. En se redressant, elle m'adresse un faible sourire et je me rends compte de mon égoïsme : elle aussi doit avoir faim.
Je lui adresse un signe de tête distrait et nous avançons vers un stand proposant de quoi nous sustenter. Je la laisse choisir pour nous deux pendant que je garde un œil sur les environs. Lorsqu'elle revient vers moi, les bras chargés de nourriture, je nous conduis d'un pas lourd vers le bord du canal où nous nous asseyons pour manger.
Nous ne parlons pas, trop occupés à engloutir la nourriture bienvenue, tout en regardant les bateaux décorés navigués sur l'eau noire. Tsubaki finit son repas la première. Chose plutôt normale étant donné que je mange trois fois plus qu'elle. Elle en profite donc pour se reposer un instant, les yeux fermés. Lorsqu'elle tombe doucement sur son épaule, je comprends qu'elle vient de s'endormir.
Je l'installe mieux, tête sur mes genoux, cherchant à me déculpabiliser de la pousser dans ses limites. Je plonge alors dans mes pensées, me déconnectant un instant du monde, oubliant tout ce qui nous avait amené ici et écoutant simplement la respiration calme et profonde de ma partenaire. Je me laisse porter par la brise légère de la soirée et par les clapotis de l'eau sur les pierres. Mes souvenirs reviennent, me montrant des scènes d'un passé révolu. Ce moment me brise le cœur à nouveau. Puisque je me rends compte que je ne me rappelle même plus la tonalité de son rire ou l'odeur de son parfum. Même son image, son visage que je connais depuis mes plus jeunes années, est flou. Et je sais qu'un jour, le temps emportera ce qu'il nous reste d'elle.
Je referme mon cœur, de peur de laisser les sentiments prendre le dessus. Ce n'est pas ce dont nous avons besoin pour le moment. Alors à la place, je ferme les yeux et glisse dans un sommeil léger, plus que bienvenu.
VOUS LISEZ
Game of Soul
FanfictionLe jeu a commencé. Le temps nous est compté. Nous courons après lui sans vraiment savoir si nous allons réussir. Le but du jeu est simple. La retrouver avant l'éclipse bleue. Seul problème, nous ne sommes pas les seuls à jouer... Après tout, qui ne...