15. Après choc

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                Levi tentait en vain de recouvrer un semblant de calme. Son cœur battait de manière désordonnée au point où il crut un instant que l'organe allait s'échapper de sa poitrine. Il n'était plus qu'un amas de chair régit par l'adrénaline.

La joue du lieutenant le lançait furieusement. On avait rarement eu le culot et la force de lui porter un coup et il y voyait un terrible affront. La menace était réelle et il ne pouvait simplement plus en douter. Une certitude le frappa durement, encore plus méchamment qu'Eren.

—Levi ?

Il ignora la voix d'Hanji, tout était blanc autour de lui et un vertige l'assaillit. Le policier lâcha le corps du garçon pour de bon et le médecin vint le placer correctement sur le matelas. Elle demandit encore, insistante :

—Levi ?

—Ouais, quoi ?

—Ca va ?

Levi se retourna vers la jeune femme, l'accusant d'un regard glacial. Il n'était pas d'humeur à répondre à sa curiosité maladive. Hors de question de la laisser jouer les savants fous !

—T'embête pas pour moi. J'aurai un bleu au pire, c'est pas la fin du monde !

La violence de ses propos ne toucha pas Hanji, le temps forgeait l'habitude pour elle qui connaissait le lieutenant depuis de longues années. Cette froideur résultait d'une volonté de masquer un trouble profond. Elle ressentait la même chose, la même peur vivace et la même incompréhension.

—Je n'y comprends rien non plus.

—Ca change de d'habitude, ça ! railla-t-il, acerbe.

Levi se sentait perdu, comme si toutes ses certitudes venaient de tomber face à lui. Echec et mat. Il ne savait pas quoi faire et cela ne lui était plus arrivé depuis bien longtemps. Ce garçon qui dormait si paisiblement représentait une menace immense pour toutes les personnes proches de lui. Pour le personnel hospitalier, pour les membres de la police et même pour tous les habitants de la ville, simples civils. Un joli minois paisible ... Qui pourrait croire qu'il y a quelques minutes seulement, il se battait comme un animal ?

—On fait quoi ? s'enquit Hanji, sérieusement.

La respiration de son homologue se bloqua subitement dans sa poitrine. La même interrogation défilait dans son esprit embrouillé depuis plusieurs minutes. Que pouvait-il faire à ce stade ? Le policier se devait de donner son rapport avant midi, alors avait-il vraiment le choix ?

—J'en sais rien. J'en sais vraiment rien.

Le médecin, pourtant avide des anomalies de son métier, semblait presque effrayée. Comme si ce garçon se trouvait au-dessus même de son imagination, de tout ce qu'elle pouvait bien espérer.

—J'imagine que tu brûles de lui faire passer tout un tas d'examens.

—C'est déjà fait, énonça-t-elle, sans même décrocher un sourire.

—Tu te fous de moi ?

—C'était pour l'enquête ...

Elle tentait vainement de se justifier mais son baratin ne fonctionnait pas avec Levi. Il la connaissait trop bien pour cela ! Il la gratifia d'un nouveau regard menaçant avant de l'interroger :

—Et alors ? Qu'elles sont les résultats ?

—Rien de convainquant. Il n'a rien de particulièrement étrange ou qui pourrait laisser penser à une anomalie.

—Tch !

Les choses se compliquaient, encore et encore. Le lieutenant était las ! Las d'avoir passé la nuit à chercher l'identité d'Eren pour que tout se déchire en un instant.

—On fait quoi maintenant ? répéta Hanji, insistant sur chaque parole.

—Putain, te transforme pas en Petra ! Qu'est-ce que j'en sais moi ? C'est pas mon boulot ça, on sait même pas ce qu'il a ce gamin. Me pose pas ce genre de questions alors que c'est toi qui devrais avoir la réponse !

La jeune femme déglutit, Levi était bien dur dans son jugement. Qui pouvait deviner la nature exacte du Mal qui rongeait le patient ? Elle murmura, plus perdue que jamais :

—Il est dangereux.

Elle porta un regard à la blessure qui se formait sur la joue de son homologue, sans oser y amener la main. Ce dernier accusa un regard pour Eren, pour ce garçon endormi et inconscient de la conversation présente. Oui, cet être représentait un danger certain pour bien des gens. Le savait-il seulement ?

—Oui, il l'est. Je ne pense pas que quelqu'un autre que moi pourrait le maîtriser.

Malgré le manque de discernement de ces propos, Hanji opina. Il n'avait pas tord, au fond et le nier représentait une erreur en soi.

—Qu'est-ce qu'il s'est passé avant qu'il ne devienne ...

—Fou ?

—On va dire ça, oui.

—Rien, je lui posais des questions. C'est tout.

En vérité, Levi peinait à se souvenir des détails exacts de ce face-à-face. Les éléments se perdaient au profit d'un moment bref de lutte. Lutte contre cette rage bestiale. Cette haine animale et complètement incontrôlable. Le lieutenant n'arrivait pas à oublier ce regard, cette lueur de folie dans ces grands yeux émeraude. Et puis la peur dans ces dernières, la terreur et un appel au secours d'une intensité inégalée. Comme si le véritable Eren avait supplié son ainé de le sauver, de le libérer de cette emprise destructrice.

Comment y rester parfaitement indifférent ? L'homme avait tenté la manœuvre, allant jusqu'à se persuader d'un quelconque détachement. Il lâcha, du bout des lèvres :

—Je lui ai montré les documents que je t'ai fait lire.

Hanji s'étouffa brutalement avec sa salive. Elle toussa bruyamment avant de demander, son intérêt visiblement ravivé :

—Tu penses que c'est lié ?

—Peut-être, accorda simplement Levi, haussant les épaules pour souligner sa désinvolte.

Elle secoua vigoureusement sa tête de gauche à droite, incrédule. Son homologue en profita pour mettre de l'ordre dans ses idées afin de déclarer, dans le plus grand calme :

—N'en parle à personne pour le moment.

—Je ne peux pas faire ça !

—Tu vas le faire, je t'en donne l'ordre. Il n'y a rien qui a changé alors pourquoi est-ce que tu refuserais ?

Elle serra les dents face à cette perspective. Froissée puisqu'elle n'avait pas réellement le choix, vexée parce qu'il n'avait pas tord, encore une fois.

Pour une fois, Levis se décidait à ne pas jouer cavalier seul. Comme s'il le pouvait réellement ! Il n'appréciait pas vraiment le fait de devoir compter sur quelqu'un, encore moins sur Hanji.

—Je m'occupe de tenir Erwin au courant, Petra passera sûrement dans la journée et on avisera après. Tu ne dis rien à personne, sinon ça sera la panique. Compris, la folle ?

—Compris, dit le médecin, sans toutefois être en accord avec les moyens employés. 


Chapitre court et pas d'une importance capitale du point de vu de l'intrigue :)

Le seizième chapitre se nommera "Nouvelles priorités" :3

Le sang des Innocents [Ereri]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant