Haïr c'est aimer si fort

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« Je reviens, je vais chercher de quoi dessaouler. Nous informa mon petit ami. »

Me voilà donc seule avec son meilleur ami. Nous n'étions maintenant que tous les trois, car à cette heure, les nombreux invités, dont je ne connaissais à peine la moitié, étaient rentrés chez eux. Ou vomissaient-ils encore leurs substances illicites dans le jardin. Ma tête sonnait et bourdonnait, les bruits devenaient presque désagréables comme une bataille sanglante, avant de s'échouer contre le néant de la fatigue. Ma tête tournait. L'alcool et la drogue ne faisaient vraiment pas bon ménage. Mes coudes posés sur mes cuisses, ma tête se laissant tomber dans mes mains pour me masser les tempes en feu, avec une affreuse grimace.

Le brun à mes côtés s'enfonça dans le canapé. Il était au bout, les jambes légèrement écartées comme s'il était le propriétaire. Celle parallèle au dossier du meuble de cuir était pliée au niveau du genou, l'autre pendait vers le sol. Je pouvais alors voir le tissu recouvrant son intimité. Il fallait que je reconnusse qu'il était très attirant dans cette position de mal dominant, bien que je ne le portasse pas dans mon cœur. A vrai dire, c'était à peine si l'on pouvait rester plus de deux minutes dans la même pièce. Mais nous faisions des efforts pour mon amoureux. Il n'était guère au courant de notre mésentente. Et puis, je devais avouer que l'alcool me rendait indifférente envers notre haine mutuelle. Ayant le regard perdu, j'examinais son visage. Dès notre première rencontre, je l'avais scruté de haut en bas et je l'avais trouvé rebutant. Peut-être m'étais-je mise cette idée dans la tête pour être sûre de ne ressentir aucun sentiment envers cet être. Puisqu'en ce début de matinée qui sonnait comme le couché pour les fêtards de notre genre, je le trouvais d'une fascination inouïe. Ses cheveux bruns retombaient parfaitement sur son front, ruisselant sur son teint mat, lui donnant un air à la fois enfantin et galopin. Ses joues amincies par le régime se liaient d'amitié avec ses yeux noisette. Son nez épaté semblait beaucoup plus sensuel, comme si sans lui, le jeune homme n'avait plus aucun charme. Par habitude, je l'aurais détesté, ce nez, tout chez cet homme était contraire aux normes de beauté. C'était une provocation de la nature, pour avoir donné des critères de perfection. Pour être honnête, la première fois que mon regard cruel s'était posée sur ce corps, j'avais cru voir là un enfant. Mais aujourd'hui, c'était différent. Aujourd'hui il était la parfaite représentation d'Adam, il était le mâle incarné.

Fixant ses lèvres rosies, je me surpris à mordre les miennes. De nombreuses images de celles-ci sur chaque parcelle de mon corps se jetèrent dans mon esprit, me faisant frémir.

Son corps m'avait l'air tout de même bien robuste, cela, je n'en avais jamais vraiment douté. Il était assez grand, même plus grand que son ami. Son âge, je ne le savais, je n'y avais fait attention, cela n'a aucune importance. Je m'étais efforcée d'avoir la tête ailleurs lorsque mon copain me narrait ce qu'il était. Je ne voulais le connaître, je ne voulais guère ressentir quelconque sentiment. Je ne voulais accepter que la haine. Une haine envers toute sa beauté. Une haine envers son âme. Mais maintenant je le savais, je ne voulais avoir l'envie de tromper celui que j'étais censée aimer de la plus grande puissance céleste. Mais cet amour, je l'avais dédié à cet homme et à personne d'autre.

Il releva le visage. Il me fixa. Je sentis alors mes désirs s'éveiller comme des bêtes en furie. Mon instinct brûla et une folie bestiale me rongea. Incapable de réaliser, ne serait-ce qu'un mouvement et n'ayant probablement point l'envie, je le laissais se rapprocher. Notre être social s'enflamma, notre nature primitive prit les devants. Un bruit me fit tourner la tête. Le surmoi cherchait une issue face à mes pulsions, il cherchait un remède à cette dangereuse folie. Mais il ne trouva qu'un blondinet, la tête enfouie dans ses bras, commençant à ronfler bruyamment comme pour étouffer nos crimes. Mon échappatoire s'envolait au pays des rêves et la brûlure de ma libido me causa une fièvre ardente et signa ma fin.

Cherry bomb || L.dhWhere stories live. Discover now