Quand nous nous garons sur le parking derrière le Midnight, je remarque la voiture que je partage avec mon frère deux rangées plus loin. Je fronce les sourcils. Habituellement, Adam est-comme moi- un maître dans l'art du retard, et il n'est que vingt-deux heures quatre. Paul rigole.
- Je vois d'ici Alie insister pour qu'ils arrivent en avance. Elle aurait pété un plomb s'ils n'avaient pas attendu au moins vingt minutes avant l'heure du rendez-vous.
Je me demande comment il fait pour toujours deviner mes questions avant que je ne les pose. Je suppose qu'il me connaît à la perfection, c'est tout. Pourtant, même mon propre frère jumeau n'arrive pas à ce niveau. J'attrape mon sac posé à mes pieds et je sors de la voiture. Le contact avec l'extérieur se fait assez violemment. Un vent froid s'est levé, je regrette de n'avoir pas pris de veste. J'espère qu'il fera plus chaud dans le bar. Nous marchons en discutant du caractère directif d'Alie et de la manière qu'à mon frère de toujours l'écouter. Après avoir contourné l'établissement, la devanture se dessine devant nos yeux.Le Midnight est un bar plutôt ringard, recouvert de briques brunes et annoncé par un énorme logo lumineux violet. La seule raison pour laquelle nous allons là-bas pour nos sorties entre amis est que le patron ne fait pas de contrôle d'âge. Pour moi, cela n'a pas d'importance car mon traitement m'interdit la moindre prise d'alcool,mais pour les autres, c'est assez avantageux.
- Gagné !
Alie est là, avec mon frère. Il a une cigarette à peine commencée entre les doigts. Nous aimons bien fumer quand nous sortons le soir. C'est peut-être le goût de l'interdit, ou tout simplement parce que notre mère fumait quand elle était enceinte de nous. Toujours est-il que maintenant, nous avons toujours un paquet sur nous quand nous sortons. Paul et Alana échangent une poignée demain personnalisée et pratiquée depuis une dizaine d'année. Je ne me lasse pas de les voir faire car même si je connais leurs mouvements sur le bout des doigts, je sais que je serais incapable de les reproduire. Je vole la cigarette des mains d'Adam, non sans recevoir un regard blasé de sa part. Je me justifie en souriant.
- Je surveille l'état de tes précieux poumons.
-Elle est presque finie, laisse la moi !
- Justement, elle est presque finie, et tu n'auras pas à te déplacer jusqu'au cendrier.
Il cède et me regarde porter le bout jaune à mes lèvres. Je tire dessus. Le goût du tabac rentre dans ma bouche et la fumée emplit mes poumons. Je la recrache en l'air. Paul me regarde faire.
- Tu vas puer de la gueule.
- Permet moi de te corriger mon ami : mon haleine va se rapprocher de la tienne.
Nous échangeons un regard amusé. A ma gauche, Alie,qui pourtant est plutôt bavarde habituellement, ne dit rien. Elle grelotte. Je crois qu'elle regrette aussi de n'avoir pas pensé à prendre une veste. Je me dépêche de finir de fumer et je pars écraser mon mégot dans le cendrier. Adam se dirige vers la porte et nous la tient pendant que nous rentrons. Un vrai gentleman, cet homme. L'odeur de bière bon marché et de chaleur emplit mes narines. Je grimace en me souvenant que je finis toujours par m'y habituer. Une vieille musique des années quatre-vingt résonne contre les murs en bois de la grande salle. Je lève le doigt dans les airs, comme pour demander aux gens autour de se taire. Le titre reste sur le bout de la langue sans vouloir pour autant sortir.
- Donna Summer, Unconditional love.
Alana est un juke box vivant. Je pointe mon doigt vers elle et nous commençons à fredonner les paroles et à bouger les hanches tout en marchant entre les tables. Cette musique est terriblement ringarde, avec ses notes de synthé dépassées, mais elle nous est familière et nous aimons ça. Bon nombre des personnes dans le bar sont des élèves du lycée ou des habitués et nous saluons quelqu'un à chaque fois que nous faisons trois pas. C'est la condition à accepter quand on rejoint une équipe de sport : celle de ne plus tout à fait être anonymes dans une pièce remplie de lycéens. Il nous faut environ dix minutes pour atteindre le fond de la salle. Notre destination est une estrade avec un balcon accessible par quelques marches dissimulées sur la droite. En haut,c'est la salle de jeu. Trois tables de billard et cinq bornes d'arcades sont disponibles aux clients qui prennent une consommation.Notre coin habituel est caché derrière tout ce bazar. Dans l'angle entre le mur du fond et celui de gauche, il y a deux gros canapés recouverts de velours rouge et une table en chêne trop lourde pour la déplacer. Mon tibia qui s'est si souvent cogné dedans en est le principal témoin. Logan et Peter, des gars de l'équipe de foot,sont déjà là à nous attendre. Quand ils nous voient, il soulèvent leur verre de bière à moitié vide dans notre direction. Nous nous installons tous les quatre sur le canapé face au leur, Alana tout au fond, près du mur, Adam entre elle et moi, et Paul, qui ferme la marche. Le rembourrage presque mort de ce vieux meuble nous rend tou tpetit quand nous nous enfonçons dedans. Pourtant, coincée entre mes deux grands gardes du corps, je me sens forte et puissante. Le serveur arrive pour prendre nos commandes. Alie demande une bière aux fruits rouges, Adam et Paul la même chose que leurs coéquipiers,et j'opte pour un thé glacé. Quand je sors mon pilulier de mon sac,Peter sourit.
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Soixante Nuits
Random"Maddison ? Si Harry Potter était mort au milieu du bouquin, tu crois que Ginny Weasley aurait quand même eu sa fin heureuse ? Levant la tête de ses papiers de demande de passeport, elle fronça les sourcils et regarda son frère jumeau. - Bien sûr...