Chapitre 2 - Marisol Amado

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Éloignée de sa famille pour l'année scolaire entière, Marisol ne regrettait absolument pas son choix de partir à l'étranger pour effectuer une année d'échange. Le fameux cursus Erasmus que tout le monde s'arrachait, pour voyager, faire le plein de bons souvenirs mais surtout redorer son dossier pour la suite du long chemin que représentaient les études universitaires. Elle avait eu sa place de justesse, tant les dossiers étaient nombreux. Ça s'était joué sur le fil, parce qu'elle avait séché un cours pour rendre au plus vite son inscription au secrétariat. Et elle ne s'en voulait pas quand elle voyait où elle en était aujourd'hui. Dernière place. Elle avait une chance inouïe !

Sa grand-mère maternelle était originaire de la France, ce pays si près et pourtant si différent du sien. Ce pays duquel elle tirait quelques origines dont elle se vantait auprès de ses camarades de classe. Elle, au moins, avait une histoire de famille riche en rebondissements. Ce qui n'était pas le cas de bon nombre de ses copines dont les proches avaient toujours vécu au cœur de l'Andalousie. Mais elle aimait sa ville et ce qu'elle pouvait leur offrir. Elle ne pouvait s'imaginer vivre dans un endroit où le soleil n'était pas au rendez-vous chaque jour. Elle avait un besoin vital de chaleur pour se sentir épanouie. Nana et Dayanara le comprenaient parfaitement.

Quel choc cela avait été d'arriver dans ce second pays, si cher à son cœur, par un horrible jour de pluie. Tristesse, monotonie, humidité, et ces températures ! Une véritable douche froide. Elle avait longtemps hésité avant de sortir le bout de son nez du car dans lequel elle avait fait de si longues heures de routes. Une épopée rocambolesque... Le voyage avait été si long qu'ils avaient dû dormir dans le véhicule, dans des conditions déplorables. Mais elle ne pouvait pas faire autrement. Ce trajet lui coûtait beaucoup moins cher qu'un autre mode de transport. Avec sa petite bourse étudiante, elle ne devait pas faire de folie.

Chanceuse parmi les mieux lotis du convoi, elle avait même obtenue une chambre dans une résidence étudiante dernier cri. Le mot d'ordre était l'autonomie. Un adulte était disponible en cas de besoin mais il ne s'immisçait jamais dans leurs affaires sans leur accord. Il vivait au rez-de-chaussée, un peu comme le gentil concierge chargé de veiller sur ses cousins éloignés. Monsieur Honpré était adorable avec eux. Elle ne manquait pas de le saluer à chaque fois qu'elle passait devant sa loge. Sa vie n'était pas bien compliquée : surveiller, nettoyer, rendre des comptes. Un boulot de rêve pour beaucoup, elle n'en doutait pas.

Chaque groupe vivant à un étage différent devait gérer son propre espace en communauté. Comme des grands. La cuisine, et tout ce qu'elle contenait, devait être entretenue et gérée par le groupe d'étudiant. Autant dire que le vol n'était pas de mise. Tout le monde était vigilant depuis le début. Avec le temps, au fil des amitiés qui se nouent, la bienveillance avait fait son apparition et l'entraide était devenue une évidence. Ils devaient apprendre à collaborer pour mieux s'en sortir. Une bonne leçon de citoyenneté. Une expérience qu'elle ne regrettait pas. Elle pouvait voir quand elle le souhaitait son amie Felicia et toutes deux avaient sympathisé avec d'autres étudiants étrangers. Elle aimait cet aspect des échanges universitaires. Pouvoir rencontrer des personnes vivant à des milliers de kilomètres de chez nous, et tisser des liens qui survivraient à la distance. Une belle occasion d'aller par la suite rendre visite à nos amis de fac ! De découvrir d'autres horizons.

Marisol aimait voyager. Elle regrettait que sa famille modeste n'ait pas les moyens de l'envoyer plus loin, plus longtemps. Mais elle ne leur en voulait pas. Ils faisaient déjà tant de sacrifices pour qu'elle puisse suivre ses études comme n'importe quelle étudiante de sa ville. Elle leur était reconnaissante ; elle ne voulait pas abuser d'eux. Elle arriverait bien assez tôt à voler de ses propres ailes, être indépendante. Viser l'autonomie, comme le voulait la devise de leur logement estudiantin. En parallèle de ses études, elle dépannait parfois quelques couples du voisinage en allant garder leurs enfants ou en les aidant à faire leurs devoirs. Elle aimait les enfants. La jeune fille admirait cette facilité qu'ils avaient de s'émerveiller d'un tout et d'un rien. Et quel challenge que d'essayer de comprendre les paroles marmonnées par de jeunes enfants quand on ne pratiquait le français que depuis quatre ans ! Elle se débrouillait assez bien mais avait encore quelques pépins, parfois. Il fallait bien que l'apprentissage se fasse un jour ou l'autre. Elle était sereine.

Virales InfernumOù les histoires vivent. Découvrez maintenant