Séoul, cette grande ville que je déteste. Pourtant, j'y vis depuis six ans maintenant. À cause de lui. Je n'aime pas cette agglomération. Il y a trop de gens, trop de voiture, trop de goudron, trop de tout. Avant, je vivais à Busan, il n'y avait pas moins, il y avait beaucoup trop de tout et beaucoup trop de trop, seulement, il y avait au moins cette mer apaisante à observer par la fenêtre de ma chambre, se bruit de vague qui berce l'esprit de millier d'aventure fantastique. Il y avait aussi mes parents, eux qui ne me comprennent pas, mais paradoxalement m'encourageaient dans la vie. Puis, là-bas, il y a des souvenirs impérissables qui réchauffent le cœur et l'esprit. Mais le temps des grandes écoles sont arrivées au programme, et il voulait aller étudier dans la grande capitale, alors, je l'ai suivi, comme il me l'a bien vite proposé, avec ses yeux qui sourient et son rire enfantin. Parce que seule, je savais ne pas y arriver, je savais que j'allais laisser tomber, rester dans mon lit, dans la vielle maison familiale en espérant fuir le monde le plus longtemps possible. J'avais besoin d'un épaule pour me guider, sur laquelle me tenir. Son épaule. Au final, j'ai juste retardé l'échéance inévitable. Parce que j'en arrive au même résultat. Je suis seul. Seul dans cette grande ville. Loin de chez moi, loin d'un environnement familier qui me rassure. Il a réalisé son rêve. Je ne dis pas que je ne souhaitais pas le voir réussir, mais peu à peu, il m'oublie. Et ce matin, c'est encore seule avec moi-même, dans cet appartement qu'on devait partager tout les deux, que je me prépare sans réel motivation. Mais tant pis, encore une fois, c'est seule que je quitte ce lieu, qui est chez moi sans vraiment l'être, le nez caché dans cette vielle écharpe pourpre délavé qui me suit depuis plusieurs années déjà, dernier rempart entre moi et le monde extérieur.
Ce matin, le bus n'est pas trop rempli, à mon plus grand bonheur, m'évitant le brouhaha incessant de mots entremêlés et incompréhensible ne donnant qu'un bourdonnement sourd et insupportable. Ça évite aussi l'incivilité de cette humanité qui par en vrille, de toutes ces personnes qui croient qu'on rentrerait mieux dans le véhicule en poussant d'un côté puis de l'autre comme si nos corps, tels des sardines vides de vie dans une boites de conserve, allaient s'aplatir, rétrécir, pour laisser une place qu'il n'y a pas, et qu'il n'y aura pas plus avec ce genre de comportement désagréable. Je peux ainsi m'asseoir au fond du car, prêt de la fenêtres gelés par les vents frais de l'hiver et du véhicule en déplacement, le front appuyé sur celle-ci en regardant le paysage morne défiler. Parce que même s'il n'est plus là, j'ai décidé de continuer à aller en cours, de ne pas rentrer la queue entre les jambes, pour reprendre ma fuite continuelle de la vie. J'essaye tant bien que mal de faire face, d'oublier ma peur, d'oublier qu'il m'a abandonné. Puis, je ne suis pas vraiment seul. Je connais trois filles à la fac. Il n'y a jamais eu cette complicité qu'il y avait avec mon meilleur ami, elles me font encore peur, c'est des connaissances plus que de réel amis. Tout simplement parce que je me sens pas prête à leur confier plus que nécessaire, parce que leurs présences à elles n'effacent pas la foule autour, comme lui le fait. Alors, en descendant de l'autobus, je ne suis pas du genre à sauter de joie en les voyant arriver, m'embarquant déjà dans les chemins du campus, parlant fort, trop fort. Chahutant, se bousculant. Elles ne sont pas méchantes, en soit, on s'entend bien, mais parfois, j'ai du mal à les supporter, à les comprendre, à suivre leur délires. Pourtant... pourtant je souris en leur présence, je ris parfois en les écoutants, ose par moment répondre à leur chamaillerie. Mais, il y a encore un vide, un gouffre, qui menace de m'emporter dans son sillage chaque jour un peu plus, alors que je vis une vie que je n'ai pas souhaité, et que je le vois à la télé, accompagné de ses nouveaux amis, adulé par de nombreuses fans, alors qu'il ne pense plus à sa vie d'avant, de là d'où il vient, de ceux qui a partagé sa vie si longtemps pourtant.
Su Yu remarque rapidement que je suis dans la lune, ce qui n'est pas bien étonnant, je pars rapidement dans mon petit monde imaginaire qu'est mon cerveau un peu trop souvent. Je le remarque quand une de ses grandes mains passe devant mes yeux. Su Yu est grande et pas très féminine dans sa morphologie, peu gâté par la vie. Elle n'est pas moche, ni disgracieuse, elle a juste un corps d'homme avec ses larges épaules, sa poitrine inexistante et son bassin peu développé. Elle a aussi de grand bras, qui font parfois peur quand ils viennent vous attraper à brûle pourpoint, pour une accolade ou parce que leur propriétaire à décidé de vous prendre pour un perchoir. La pauvre fille n'a pas arrangé les chose, décidant de couper ses jolis cheveux dans une coupe courte, comme l'une de ces idoles masculines coréennes, un peu trop dans le délire. Elle a même finit par teindre sa chevelure initialement brun typiquement coréen en blond platine. Pourtant, le tout est adoucie par le trait fin de son visage accentué par une fine couche de maquillage discret qui met en valeur son doux regard ténébreux et ses fines lèvres écarlates, ainsi que des tenues, elles, parfaitement féminine. D'ailleurs, elle porte à merveille l'uniforme de l'école, agrémenté ici ou là de petit bijoux harmonieux. Je souris, gêné de mettre fait prendre encore en train de rêvasser, fuyant le regard de mon ami.
« - Pardon, tu disais ?
- Je disais qu'il y avait un concert dans pas longtemps qui réunit plusieurs artistes, je voulais savoir si tu voulais venir avec nous ?
- Oh... non excusez-moi, mais les idoles et tout ces trucs ne m'intéressent pas. »
Il y a trop de monde dans des concerts, je n'aime pas la foule. Je supporte déjà mal les cours, parce qu'il y a beaucoup d'élèves par classe, c'est étouffant. Alors, j'évite ce genre de situation ailleurs. Puis je sais que si elle demande ça, c'est pour son groupe favori, un groupe que je ne veux pas voir, parce que c'est son groupe. Puis de toute façon, les idoles je m'en fiche. J'écoute de la musique sans vraiment faire attention à qui chante, tant que le rythme n'est pas mauvais, je ne suis pas dans leur délires.
« - C'est dommage, on aurait pu s'amuser toutes les quatre... je trouve dommage que tu n'écoutes pas plus sérieusement de la musique.
- Su Yu laisse là, elle a le droit de ne pas aimer. »
C'est Sae Ra qui me sauve, la plus calme des trois folles en face de moi. Je dis qu'elle est folle, mais en réalité, elle est un peu la maman du quatuor, s'inquiétant toujours pour un rien, et toujours une parole plein de sagesse dans le sac, alors qu'elle peut sortir dix conneries à la minutes d'un autre côté. Je l'aime bien Sae Ra. Elle est rassurante. Un peu invasif, mais pas méchante. Trop sensible, mais attachante. Je la remercie d'un signe de tête, alors qu'elle me sourit en entortillant ses longs cheveux noirs autour de ses doigts, un légers tics qu'elle a depuis des années, en tout cas, depuis que je la connais, elle a toujours fait ça. Ces yeux noisettes finissent par s'illuminer de malice d'un seul coups, lâchant alors ses mèches pour agiter ses mains dans tout les sens alors qu'elle prend la parole, ne pouvant s'empêcher de faire des gestes amples lorsqu'elle s'exprime.
« - On prendra plein de photo quand même, on pourra te montrer, comme ça, c'est comme si tu étais un peu avec nous.
- Merci, mais ne te sens pas obligé unnie...
- Mais non, elle a raison ! Puis comme ça on aura plein de trucs à te raconter.»
C'est à Mizuku de s'exprimer, alors qu'elle sautait sur place. La japonaise était souvent perturbatrice par son tempérament agité, légèrement hyperactive du haut de son mètre soixante et sa bouille d'enfant, comme figé dans un âge peu avancé, dans les traits d'une adolescente pré-pubère, alors qu'elle n'a qu'un an de moins que moi, soit vingt-deux ans. On va dire qu'elle est la plus petite du trio, on fait tous au moins une tête de plus qu'elle, ce qui la complexe un peu à vrai dire, elle aurait aimé être plus grande, mais on la rassure sur le fait que tout ce qui est petit est mignon. La faisant râler encore plus. Mais elle n'arrange pas vraiment les choses, alors que bien souvent elle rajoute à son uniforme des sweater trop grand, qui laisse à peine, voir pas du tout, voir ses petites mains, et ont presque la taille d'une robe, descendant à mis cuisse, donnant l'impression qu'elle aime se montrer comme petite dans un monde de géant. Elle finit par se calmer, soufflant pour reprendre un peu d'oxygène après son sport improviser, replaçant une de ses mèches rebelles dans sa chevelure rousse coiffé dans un chignon fait bien trop vite, alors qu'on aurait dit qu'un pétard avait exploser sur sa tête. Ses petites mains potelées viennent bien vite rajuster ses grandes lunettes rondes sur son nez, avant de nous signifier qu'il serait temps d'aller en cours, si on ne voulait pas se faire remarquer par un retard incongrue. Je la remercie intérieurement pour m'éviter ce supplice que d'être au centre de l'attention en passant la porte alors que le cours à déjà commencé. Heureusement, on est déjà placé quand les derniers étudiants entres dans la salle, et la prof finit de s'installer. Et c'est partie pour une nouvelle journée de calvaire.
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Vertige
FanfictionIl y a ce long fil, très fin, trop fin, étendu au-dessus du vide, ou l'on ne voit jamais la fin. On ne voit pas le fond du précipice non plus. Ça fait peur, ça tétanise, c'est effrayant. Ce fil, c'est simplement le chemin de la vie sur laquelle on é...