Chapitre vingt-huit: Toutes les fleurs finissent par faner

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Maintenant que Pyyron gisait dans les bras de son fils, Kalâam pouvait régner en paix. Il n'avait plus besoin de se cacher derrière la figure mollassonne de la marionnette qu'il traînait depuis des années. La couronne de l'homme roula jusqu'à ses pieds, alors il s'en saisit pour la poser sur sa tête. Se dévoilait enfin le véritable visage du Mal. Les plans diaboliques prenaient sens peu à peu.

Kalâam supervisait Pyyron depuis son arrivée au pouvoir. Il lui avait murmuré à l'oreille chaque geste et chaque parole afin que tout se déroule selon ses désirs. Éliminer les exomages était pour lui un moyen de s'assurer que les plus puissants ne puissent pas s'unir contre lui. Pour que personne ne puisse le vaincre, pas même les êtres envoyés par les Prophètes.

Voici un monde qu'Ego ne pourrait sauver. Qu'était donc un dieu, sinon un espoir affaibli par le temps ? De quoi se rassurer en laissant sa vie – et ce dont on pense ne pas être à la hauteur – entre les mains d'un être qu'on ne connaît point.

La dépouille fut traînée hors de la cellule malgré les cris déchirants d'Elek qui faiblissait comme la flamme d'une bougie qui se meurt.

Sorenn se retenait de hurler. Le visage entre les paumes, la tête entre les genoux, il tremblait. La peur le dévorait par les tripes et s'immisçait dans les moindres recoins de son corps en lambeaux. Sa vie – leur vie – ne pouvait finir ainsi. Il existait forcément une issue.

Alors qu'il se lamentait, il se souvint. Il se souvint de la princesse Soraya et de tous ces rêves dont elle avait été le fil conducteur. Il se souvint de cette abominable soirée où les soldats s'emparèrent du palais et sa première rencontre avec le Maître des Glaces. L'image d'Allaka'zam lui revint en mémoire. Le détenteur du Prisme ne pouvait échouer.

« Rien ni personne ne pourra te blesser. »

Il se redressa, prit son courage à deux mains et fut bien vite sur ses deux pieds, affrontant la douleur qui lui tiraillait l'estomac. Sa tête le faisait encore terriblement souffrir. Il luttait contre le tambour à l'intérieur de son crâne et la brûlure à l'intérieur de son cœur. Les Insurgés se mirent à le huer. Mort au traître ! Il ne méritait plus l'uniforme qu'il portait.

« Ça sera à toi de réussir là où ton frère ne pourra s'en sortir seul. »

Qu'importe ce que pensaient les autres. Sorenn devait agir. Ils se turent dès l'instant où il retira son collier ; cet enfant possédait le cristal légendaire. Ce cristal que tant d'êtres convoitaient depuis la nuit des temps. Sirius déglutit. Le pouvoir de son compagnon se manifestait enfin. Ce soir, ils fêteraient leur victoire.

— Le Prisme ! Il a le Prisme d'Absalem !

Kalâam fut pris d'un sursaut. L'arme qu'il tenait dans la main ne possédait plus d'énergie pour tuer le gamin. Il hurla à ses gardes de l'anéantir, bien conscient de la puissance de ce tout petit, minuscule objet.

Mais les soldats restèrent de marbre. Eux aussi avaient choisi leur camp.

L'adolescent se tenait droit, impassible. Il brandit l'artefact sous les regards de ses amis. Les prisonniers ne respiraient plus sous la pression des évènements. Allez, Sorenn. C'est ta dernière chance. Tu peux le faire.

Une lumière d'une pureté inégalée commença à envahir la pièce, rebondit sur les murs en faisant briller leurs crevasses humides. Elle émanait de la pierre et enveloppait le jeune héros qui resplendissait de mille couleurs. Ses pieds se détachèrent du sol. Sur sa peau apparurent d'innombrables marques étincelantes.

— Disparais, Kalâam !

Le Maître des Glaces tenta de se protéger de ses bras pour encaisser le coup.

PANDORA-IV [Les enfants de Kirisben]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant