La vie, selon les normes de la civilisation, reprend ses droits. Au loin, les bruits vont en s'amplifiant, témoignage direct de l'agitation caractéristique de la nuit qui se termine laissant petit à petit la place à une nouvelle journée.
Bientôt, l'activité matinale s'amplifiera pour atteindre un degré d'activité dont seul l'humain possède le privilège, Marc et ses collègues passeront le flambeau aux hommes qui viendront les relever.
Les premières lueurs de l'aube, entre aperçues au travers les fenêtres grillagées lui annonçant la fin de sa pause de nuit et, sous peu, il rentrera se reposer.
Bien qu'il soit encore tôt, l'atmosphère, lourde, laisse présager une nouvelle journée caniculaire. La chaleur, d'abord douce et réconfortante, devenant au fil des heures, très vite étouffante, voire accablante, empêchant toute activité de s'effectuer normalement. Empêchant de dormir et de récupérer. Surtout de récupérer.
Cela fait maintenant vingt et un jours, qu'une vague de chaleur sans précédent, selon les climatologues, s'est abattue sur l'Europe occidentale. Vingt et un jours pendant lesquels la pluie se fait attendre, vingt et un jours et plusieurs centaines de décès dénombrés rien qu'en Europe, au moins cent cinquante en Belgique. Les plans d'urgence ont été décrétés avec leur litanie d'interdictions : interdiction de laver les voitures, d'arroser les plantes, de remplir les piscines mais aussi de se baigner dans les points d'eau publics et parcs aquatiques envahis par des myriades de bactéries.
Chaque jour, les journaux titrent, inlassablement, les dispositions vitales à accomplir, les causes sont recherchées, énoncées, supposées ... « la couche d'ozone », « l'émission de gaz d'échappement ». Des solutions, hypothétiques sont avancées et les constats, alarmistes fleurissent « les réserves d'eau potable s'épuisent », « l'apparition de maladies ancestrales telles le choléra et la peste sont à redouter », « de plus en plus de personnes admises dans les hôpitaux pour troubles du comportement », ... A cela s'ajoute une pénurie de bouteilles d'eau dans les supermarchés pris d'assaut. Les plans d'alerte au fog se multiplient.
Marc, comme les autres subit les affres météorologiques tout en luttant contre le manque de sommeil du à cette chaleur qui s'immisce dans les coins et recoins de chaque maison, s'installe dans toutes les pièces, pénètre dans les chambres et harcèle inlassablement les hommes qui, comme lui, tente de dormir.
Incorporé, par choix personnel, dans l'équipe nuit de l'unité psychiatrique d'un établissement pénitentiaire, il commence ses pauses à 21H30 et les termine vers 06H10.
Viens ensuite le rituel, immuable, auquel il s'astreint afin de conserver un semblant de rythme de vie : petit déjeuner arrosé de café à la taverne près de chez lui, se doucher et se raser, s'occuper de son chat, un persan crème, pour enfin se coucher vers 10H00 et essayer de prendre un maximum de repos. S'ensuit le lever vers 16H, la toilette, la préparation du repas du soir et quelques moments de détente. Mais depuis plusieurs jours, ce rituel est bouleversé par la chaleur. Les quelques moments de repos étant difficiles à gérer en plein après-midi alors que le soleil est à son zénith.
Au travail, la coutume veut que l'on commence son service par s'informer des derniers faits, des nouveaux arrivants, de l'évolution des autres, chaque cas étant commenté. Vient ensuite le contrôle visuel, l'appel, consistant à vérifier la présence physique de chaque individu. Après cela, l'équipe de l'après-midi, passe le relais aux hommes de la nuit. C'est à ce moment que Marc fait ce qui l'appelle « son tour », le premier passage reste un des moments privilégiés de son travail. Titulaire à l'annexe pour ses affinités envers ce milieu très spécial, Marc met un point d'honneur à connaître tous les « pensionnaires ». Le premier tour revêtant un caractère systématique avec ses bonjours et bonne nuits réciproques, les conversations feutrées, échangées au travers des guichets des portes ou au travers des grilles des cellules américaines. Hormis le centre, illuminé en permanence, le reste de l'unité est plongé dans la pénombre, et seule la clarté des phares ceinturant le mur d'enceinte apporte un semblant de lumière à l'intérieur du quartier. Les ombres des fenêtres grillagées se couchant sur le sol telles des tamis géants.
YOU ARE READING
Mise Hors Service
Mystery / ThrillerAu cœur d'une annexe psychiatrique, quartier d'une prison ou sont placés les détenus en observation ou considérés comme irresponsables, Marc, agent s'intéresse à un détenu ... disons ... particulier.