Sumire Koen ✧ au Parc des Violettes |IE|

⋅ Partie 10 ⋅

Centre Sportif du lac Kawaguchi - 16h45

Voilà donc un peu plus d'une demi-heure que Naho répondait enfin à la requête de Nosaka, qui consistait à jouer au football. Enfin, « jouer », c'était un bien grand mot. Il lui avait fait passer une série de tests, que Naho trouva aussi absurdes les uns que les autres : jongler, dribbler ou encore voler la balle. La lycéenne n'était pas d'un naturel maladroit, mais elle se trouvait bien ridicule à essayer de lui prendre le ballon sans perdre l'équilibre et donc se retrouver les quatre fers en l'air. Bien qu'elle ne pût s'empêcher de soupirer ou marmonner lorsqu'il trouvait un nouvel exercice à lui faire faire, elle obtempérait quand même.

— Pense à ta cravate, murmura-t-elle pour elle-même quand il proposa de faire des tacles. La cravate et c'est tout.

À quoi bon, de toute manière ? C'était un footballeur de niveau international et elle n'était qu'une petite joueuse du dimanche, qui n'avait tapé dans un ballon que quelques rares fois pour faire plaisir à son petit frère. Elle ne prendrait jamais la balle à Nosaka. Qu'attendait-il d'elle ? Et pourquoi tenait-il tant que ça à jouer contre elle ? Son sourire narquois lui donnait l'air de prendre un malin plaisir à la voir échouer. C'était du pur sadisme.

— C'est bon, t'as vu ce que tu voulais voir ? finit par demander Naho, à bout de souffle.

Cette dernière s'effondra sur le banc de touche avec la grâce d'un hippopotame – ce majestueux pachyderme. Elle avait la gorge en feu et les jambes en coton. Du revers de la main, elle essuya quelques gouttes de sueur qui avaient perlé sur son front.

— Oui, j'ai vu presque tout ce qui m'intéressait.

Tout en baissant les yeux sur la brune haletante, il arborait ce petit air suffisant qui la faisait enrager.

— Tu devrais marcher pour reprendre ton souffle, lui indiqua Nosaka.

Cette simple remarque lui valut un regard glacial de la part de Naho. Elle savait qu'il avait raison ; elle ne comptait plus le nombre de fois où son professeur d'éducation physique lui avait rabâché ce genre de phrases, et après tout, c'était un sportif professionnel qui savait de quoi il parlait. Pourtant, elle ne supportait pas qu'il lui dise ce qu'elle devait faire.

— Tu me fatigues, dit-elle alors qu'il s'asseyait près d'elle.
— Alors marche, ça te rendra ton souffle.
— Je vois pas pourquoi je marcherais, toi non plus, tu marches pas !
— Je suis pas à bout de souffle, moi.

Là-dessus, il tourna la tête vers elle, non sans esquisser un sourire moqueur. La lueur taquine de son regard tétanisa l'adolescente, si bien qu'elle oublia la réplique acerbe qu'elle s'apprêtait à lui renvoyer dans les dents.

— J-je... bredouilla-t-elle, prise de court, avant que la colère ne reprenne le dessus. Hum, ferme-la !

Déstabilisée, la brunette sauta sur ses pieds pour s'éloigner de lui et commença à faire les cent pas. Le footballeur la suivit des yeux un instant, pas le moins surpris du monde par ce revirement soudain, puis se leva lui aussi pour lui tendre une gourde d'eau fraîche. Si elle ne cacha pas sa surprise, elle l'accepta sans rechigner tant sa gorge était sèche.

— Merci, souffla-t-elle en détournant le regard.

L'eau qui éteignit le feu de sa gorge fut presque salvatrice. Elle vida la bouteille d'une traite, tournant le dos à Nosaka qui s'était découvert une nouvelle passion, à la dévisager sans vergogne. Ce garçon était vraiment malsain.

En silence, Naho revint vers le banc de touche pour y déposer sa gourde vide, avant de s'asseoir. Elle se passa les mains sur le visage et décoiffa ses cheveux déjà bien emmêlés, puis releva les yeux vers le footballeur debout devant elle.