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- Athéna, me questionna l'homme en blouse blanche face à moi, depuis combien de temps es-tu aménorrhée ?

Je l'attendais cette question. Je savais très bien qu'elle allait arriver mais clairement je ne me sentais pas prête à y répondre. Puis devoir dire ça à une personne du sexe opposé ne m'aidait pas non plus. C'était gênant. Dans un sens je ne me plaignais pas trop de ne pas avoir à supporter le fameux cadeau mensuel de dame nature, ça avait un certain côté pratique et confortable. Mais dans le fond, ça me faisait mal. La douleur mentale était bien là, la maladie me bouffait ma féminité, mais que faire ? Reprendre du poids afin d'être de nouveau réglée ? Il en était hors de question. Mon poids était déjà bien trop élevé à mon goût pour accepter de voir se chiffre augmenter. Et puis, cela voudrait dire devoir manger... Beaucoup manger. Chose dont j'étais incapable.

- Je ne sais pas..., soufflai-je.

Le médecin me regarda avant d'hocher la tête d'un air désapprobateur. Il avait très bien compris que je le prenais là pour le dernier des cons, et savait tout autant que moi que j'avais compté les mois passés depuis mes dernières règles. Quatre mois. Cela faisait quatre mois que cela n'était pas arrivé. Et bien que je le sache, l'envie de lui communiquer l'information n'était toujours pas là.

- Écoutes Athéna, commença-t-il en se redressant, je sais très bien que tu le sais. Ne pas me le dire ne te sers à rien, ce n'est pas cela qui va nous empêcher de t'aider. Je me braquai à l'entente du verbe « aider », mais le laissa tout de même continuer son petit speech de docteur parfait. Je ne peux pas te forcer à me le dire, la décision t'appartient. Après tout, c'est ton problème si tu préfères t'enfoncer.

S'il pensait vraiment me tirer les vers du nez d'une telle manière, il était bien loin d'avoir raison. Tout ce qu'il faisait dans l'immédiat c'était m'agacer fortement, comme tous les putains de médecins qui me faisaient chier ici. Ils pensaient tous avoir LA solution à mon problème, mais ne comprenaient pas que je ne voulais pas de leur solution. Tout ce que je veux c'est rentrer chez moi, et reprendre ma vie comme avant. Rien de plus. Est-ce trop demandé ? Trop demandé de mener la vie qui me chante ?

- Je n'ai nullement demandé votre aide, Monsieur., déclarai-je d'un ton froid. Tout ce que je veux, et vous demande, c'est de me laisser rentrer chez moi et faire ce qu'il me plaît de ma vie. Laissez-moi vivre, bordel de merde !

Le regard que l'homme m'adressa après ma réponse à sa provocation m'indiqua qu'il ne l'avait pas bien pris. Tant pis pour lui, je n'en avais rien à foutre. Après tout, il n'en avait rien à foutre de ce que moi je pouvais penser, alors pourquoi me tracasserais-je de son avis et ses états d'âme ?

- Écoutez mademoiselle, reprit-il d'un air sérieux, j'ai bien compris que vous ne souhaitiez pas sortir de là. Le truc c'est que c'est de notre devoir de vous aider, si nous ne le faisions pas ça serait considérer comme de la non assistance à personne en danger. Certes à l'heure actuelle votre vie n'est pas en danger, mais je ne peux pas certifier que ça en soit de même d'ici disons un à deux mois. Je ne peux pas vous forcer à vouloir vous en sortir, la décision n'appartient qu'à vous, mais je ne peux pas vous laisser repartir comme si de rien était alors que vous n'allez pas bien.

Suite à ses paroles, un blanc s'installa dans la salle. Je n'osais plus ouvrir ma bouche. Pour quoi dire ? Il n'y a plus rien à dire, rien du tout. Je baisse la tête et regarde mes bras. Ceux-si sont maintenant recouverts d'un duvet de poils. Du laguno, un autre symptôme qui leur a mis la puce à l'oreille sur ce qui n'allait pas chez moi. Aménorrhée, laguno, incapable de tenir un poids constant... Ils n'avaient plus aucun doute c'était certain, mais aucun ne m'avait encore dit le mot. Aucun. Était-ce une méthode thérapeutique qu'ils avaient décidé de tester avec moi, en choisissant de ne pas me dire clairement ma pathologie ? Aucune idée, tout ce que je peux dire c'est que c'était vraiment nul et inutile.

- Athéna, fit le médecin me sortant donc de mes pensées, je vous le demande une dernière fois : pouvez-vous me dire depuis combien de temps êtes-vous aménorrhée ?

Je mordu mes lèvres violemment tout en jouant avec mes ongles en piteux état. Les pauvres qui auparavant étaient toujours bien entretenus cassaient maintenant tel du verre à la moindre occasion. C'était certainement la seule chose que je regrettais d'avant. Inspirant grandement, je relâcha ma lèvre avant de regarder le plafond en expirant. Puisqu'il était décidé à me faire chier, j'allais lui dire. Cependant il ne fallait pas qu'il s'attende à mieux de ma part, c'était déjà beaucoup pour moi de lui avouer ça.

- Cela fait quatre mois que je suis aménorrhée., déclarai-je d'un ton cinglant. C'est bon vous êtes content maintenant ?

Et avant même qu'il ne puisse répondre je me leva de la chaise, ne manquant pas de la faire crisser sur le sol et sorti de la pièce en claquant la pièce derrière moi.

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⏰ Dernière mise à jour : Nov 15, 2019 ⏰

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