XI

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     Aujourd'hui papa et maman sont tous les deux à la maison. Les journées tous ensemble sont très rares, alors nous avons décidé d'en profiter. C'est l'après-midi et le soleil domine le ciel. Il fait très chaud, mon papa et mon grand frère ont décidé d'aller se baigner. Ils ont de la chance, j'aimerais pouvoir les rejoindre. Seulement, j'ai peur de l'eau et puis, maman ne retrouve plus mes brassards. Du coup, je suis assise par terre, je joue avec les petites fleures blanches. Maman m'a appris à faire de jolies couronnes avec les pâquerettes.

« Luna, ma crevette, viens dans l'eau avec nous ! » s'écrit mon père.

    Je tourne ma tête et regarde les yeux vairons de mon géniteur. Après quelques secondes de réflexion, j'hoche la tête de gauche à droite pour seule réponse négative. Je crois que ma réponse n'est pas du goût de mon papa. Il sort doucement de la piscine et avance vers moi. Arrivé à ma hauteur, le soleil disparaît sous son ombre gargantuesque. Du haut de mes trois ans, je ne suis pas plus haute que trois toutes petites pommes, alors il s'abaisse et soutient mon regard.

« Crevette, n'est pas peur, je suis là rien ne pourra t'arriver. N'oublie pas, dans les bras de papa.. »
« Le monde est à moi ! » je finis sa phrase qui résonnait comme un hymne.

   Je me laisse porter par mon héros. Sa voix et ses encouragements retentissent dans mes oreilles.  Je ne sais pas si je peux y arriver, l'eau a toujours été l'une de mes plus grandes peur, avec les clowns.
 
     Nous sommes maintenant devant le lac artisanal, et mon corps tremble de toutes ses forces. Si je me noyais ? Si je coulais ? Si l'eau dans mes yeux me rendait aveugle ? Je ne veux pas y aller. De petites larmes commencent à dévaler mes joues rougies par la chaleur. Bien sûr, elles n'échappent pas à mon paternel qui me scrute avec inquiétude.

  « Tu me fais confiance ? » demande-t-il me scrutant d'avantage.
  « Oui papa mais j'ai peur, peut être que je vais couler .. »
  « Je te tiens crevette, je ne te laisserais pas tomber » sa voix rassurante parvient à me convaincre.

    Sans vraiment réaliser les événements autour de moi, je sens un liquide froid, un liquide que je connais trop bien, entourer mes petits pieds, mes petites jambes et mon petit ventre. Je m'accroche de toutes mes forces à mon papa. Il a dit qu'il ne me laisserait pas couler, alors je dois lui faire confiance. Doucement, nous nous enfonçons un peu plus, dans cette étendue bleuté. J'inspire et expire  tout l'air du monde à l'aide de mes poumons. Mes yeux sont clos mais tous mes autres sens sont à l'affût. Je perçois chaque  gouttes, chaque vibration, chaque mouvements de l'eau. Je ne vois pas mais tout est très clair dans ma tête. Mon père s'arrête et me demande calmement d'ouvrir mes paupières. J'exécute. D'abord éblouies par le soleil, mes yeux, semblables à ceux de mon géniteur, se referment automatiquement. Après plusieurs essais, mon regard s'accroche enfin aux éléments qui me font face. Nous avons traversé toute la longueur de la piscine. Je suis toujours scotchée à mon père mais mes muscles se détendent peu à peu. C'est très jolie, les arbres nous entourent, créant des coins d'ombres et des coins de lumière.

« Alors, tu vois, ce n'était pas si compliquer » dit-il enjoué.

   Je lui souris et sort de ma rêverie quand j'aperçois mon grand frère s'approcher de nous.

« Bas alors ! La princesse s'est  enfin décidée ! »ajoute-t-il en rigolant à gorge déployée.

   Je ne prend pas la peine de lui répondre et lui tire la langue. Mon geste est rapidement rejoint par les rires de tous.

Quelques perles bleues viennent s'abattre sur mon visage. Je relève la tête et regarde mon frère qui est entrain de m'arroser en fronçant les sourcils. Mon visage est mouillé, je le sens et je n'apprécie pas du tout cette sensation.

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   J'émerge de mon sommeil profond gênée par la sensation d'humidité qui plane sur mes joues. L'une de mes mains s'aventure près de l'endroit mouillé. Pendant mon sommeil, mes  larmes ont ravagé mon visage. J'essai de contrôler mon souffle court et  les torrents qui sortent de mes yeux sans autorisation. Je déteste pleurer, je me sens faible et impuissante. Je ne suis plus maître de moi même quand je pleure et je déteste ça.

   Après quelques minutes de lutte acharnée contre moi même, mes larmes commencent à arrêter de couler. Mon bras se lève dans un automatisme déstabilisant et permet à ma main d'attraper mon téléphone qui est posé près de moi. Ce rêve n'était pas arrivé par hasard. Je le sais, mais j'ai l'espoir de me tromper. Mon écran de verrouillage s'illumine et laisse apparaître tout un tas de notifications, de messages, d'informations, l'heure, ou encore la date. Dimanche 7 avril 2019. Le calcule n'a même plus besoin d'être effectuer dans ma tête. Voilà bel et bien dix ans que tu es partis, que mon papa nous a quitté. Ma gorge se sert et mes yeux s'humidifient. Je ne veux pas pleurer, il ne voudrait pas ça. Je le sais. Je dois être forte pour lui, je dois vivre pour lui. Je verrouille mon téléphone et l'abandonne sur le coin de mon lit.

   Après m'être préparer, je descend de ma chambre et part en direction du salon. Je veux savoir si il y a encore de la vie dans cette maison. Marche après marche, mon esprit ne cesse de penser aux yeux de mon père. Particularité dont j'ai hérité. Souvent, les compliments sur mes iris sont nombreux mais pourtant, je n'arrive pas à les aimer. Quand je me regarde dans le miroir, je ne vois que le vide qu'il a laissé. Aucun enfant ne mérite de grandir avec l'un de ses parents en moins. Aucun ne mérite de voir sa famille exploser. Aucun ne mérite de grandir trop vite.

  J'atteins la salle à vivre et remarque directement la silhouette allongée, ou plutôt écrasée sur le canapé. Ma mère, une bouteille à la main a sûrement dû se rappeler de la date elle aussi. Je ne fais rien, elle est capable de se gérer toute seule. Enfin à son âge, on est sensé en être capable. Tout aurait été différent si il été encore là. Si il était encore là pour nous guider, pour nous réunir, pour nous sauver.

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