My exception (mxm) EN CORRECTION

Chapitre 1

DAMIEN

Aujourd'hui est le premier jour du reste de ta vie.

C'est assis dans le bus qui me conduit vers mon nouveau travail que je me répète en boucle ce proverbe optimiste. Qu'on ne s'y trompe pas, je n'ai pris ni drogue ni aucune petite pilule pour parvenir à penser une chose pareille alors que je vais effectuer mon premier jour. Je ne suis pas aussi confiant qu'on pourrait le croire. Pas du tout, même. En vérité, mon estomac est en train de convulser tellement je stresse. C'est juste que, ce matin, j'ai décidé de devenir un adepte de la méthode Coué. Si je radote que tout va bien se passer, ça sera forcément le cas.

— Tu parles Charles, je marmonne.

Du coin de l'œil, je vois que le type assis à ma droite me jette un bref regard. Bah quoi, on ne peut plus causer tout seul tranquillement ? J'ai lu un jour que les personnes qui se parlent à elles-mêmes ont un QI plus élevé que la moyenne. Ce qui signifie par conséquent que je suis quelqu'un de très intelligent. Cela dit, j'ai trouvé cette info sur le net, sur cette page Facebook qui affirme aussi que les hommes atteints de calvitie et les femmes aux grosses fesses sont également plus intelligents que la moyenne. Si je dois être honnête, autant admettre que ce genre d'infos existe surtout pour rassurer la populace. Genre : « t'inquiètes, ce qui te complexe est en réalité ce qui te rend génial. »

Un poil amer, je ricane. Le gars à côté de moi se tourne à nouveau furtivement vers moi. J'ai envie de lui demander de me ficher la paix ou à l'inverse de lui raconter ma vie, pour me soulager d'un poids et qu'il comprenne que ce lundi matin, j'ai plus que jamais le droit d'agir bizarrement. Car si aujourd'hui est le premier jour du reste de ma vie et que ma vie continue sur sa lancée, ça ne promet rien de très amusant. Allez Damien, calme-toi. Ça va le faire. De moins en moins convaincu par l'efficacité de la méthode Coué, je secoue la tête et serre les mâchoires ainsi que mes poings sur mes genoux. Saleté d'anxiété.

Je continue de serrer les dents quand le bus passe devant le café que Steph et moi avons tenu ensemble durant trois ans. Autant dire que ce n'est pas ça qui va me détendre. Quand Stéphanie m'a plaqué, elle m'a bien vite suggéré de quitter notre business. Mais comme ce café, c'était son idée, je lui ai proposé que ça soit plutôt moi qui parte. Si elle m'abandonnait, je n'avais aucune envie de continuer à bosser seul dans un endroit qui me rappellerait chaque jour l'échec de notre couple. D'autant plus que j'ai dû rester vivre dans notre appartement puisqu'il s'agit du seul héritage que mon père m'a laissé.

En toute franchise, j'ignore ce que j'ai fait pour mériter qu'elle s'en aille. Quand je lui ai posé la question, voici ce qu'elle m'a répondu : « Rien du tout, justement ». Ça c'est bien une réponse de femme ! On était bien, tous les deux. Un bonheur tranquille, jamais troublé par une seule dispute. Ce qui, si j'ai bien compris où elle voulait en venir dans tous les reproches qu'elle m'a craché à la figure, fait partie de ce qui l'a dérangeait dans notre relation. Je crois même qu'elle m'a balancé un truc du style « moi qui pensais que tu avais du sang d'écossais dans les veines ». Quelle foutaise ! Tous les roux ne sont pas écossais, bon Dieu, et puis j'aimerais qu'on m'explique en quoi c'est un problème d'être un mec qui ne cherche pas les embrouilles. Il y a déjà suffisamment de raison dans le monde pour être stressé, pourquoi en rajouter en se prenant la tête dans notre vie privée ? De plus, en quoi être écossais aurait changé la donne ? On est au vingt-et-unième siècle : les highlanders, c'est fini tout ça. Je vous jure, les nanas. Constatant que mon pseudo optimisme est désormais mort et enterré, je tapote nerveusement mon poing sur mes genoux.

— Sérieux, je siffle entre mes dents.

Le type assis à ma droite me regarde à nouveau. N'y résistant plus, je me tourne brusquement vers lui.