C'est si triste, les pas qui résonnent dans le calme nocturne, dans la ville qui paisiblement termine son agitation perpétuelle pour ne devenir qu'une infinie mélodie de criquets, de rires alcoolisés et des branches qui bruissent au premier vent de l'été. C'est triste les poches pleines de souvenirs qui craquent dès qu'on fout les mains dedans, les cheveux qui savent pas où se foutre et qui balayent les joues, les sweat qu'on a pas lavés depuis trois jours alors qu'on transpire à foison, parce qu'on est trop occupé, trop occupé à penser, à vagabonder, à divaguer. C'est triste l'odeur des feux de camp au loin, le bruit de l'eau sous le viaduc, les cailloux sous mes converses, quand je longe le bord, que je m'accroche à la barrière, le corps secoué par les dix-huit mètres de vide que la gravité cherche à m'enlever. C'est triste l'image de ton corps dans ma tête, de ton rire dans mes oreilles, de tes pas qui résonnerait près des miens, des conneries dites ou imaginées, des sourires feints et abîmés, de tout c'que t'aurais dû voir mais que t'as ignoré, de tout c'que j'aurais pu vivre si je l'avais fermée.
Tout est triste quand on est seul.
Les après-midi le ukulélé à la main, les blagues de merde à la chaîne, les milliers de couplets et de refrains, les fous rires violents, les moments de haine; les fois où j'ai un peu mal et que tu trouverais quoi dire, les attentes de ton bus à n'en plus finir, tout ce qui me rappelle toi et qui ne veut pas cesser, pourtant je te jure j'essaye d'oublier.
Je ne t'aime pas je ne t'ai jamais aimé, enfin pas comme ça, pas comme on pourrait le penser. Je t'aimais de la manière la plus simple, avec toute l'amitié et le désintérêt dont j'étais capable, sans ne rien vouloir que ta présence et ton sourire aimable. C'était pas plus que cela, je ne voulais pas de toi, je voulais juste que tu sois là, que tu partages cet enfer de vie avec moi, un ice tea à la main, comme deux vieux loubards qui ont pris le même chemin.
Je ne sais pas ce qu'il y a derrière le viaduc, dans la forêt, et encore moins les soirs d'été, où il fait trop chaud pour ne pas s'y abriter quand on a nulle part d'autre où aller. Comme je ne sais pas ce qu'il y a derrière cet immense désespoir que je vis, plus intense depuis que t'es parti, plus violent aussi. Je ne sais pas où je vais, je ne sais pas ce que je fais.
Même les frites du kebab sont plus insipides, même les Pringles ont un autre goût. Un truc amer, un arrière goût de trahison.C'est tellement beau, même en cette douloureuse nuit, les tours de la ville, toujours un peu illuminées, les belles maisons et leurs jardins en étages, les douces collines de l'autre côté, les étoiles et la lune qui éclairent faiblement de leur lueur bien sage. D'ici on surplombe tout, les automobilistes qui pensent que la nuit leur appartient, les gamins comme toi qui se droguent pour oublier leur médiocrité, le faible courant de la rivière à cette période de l'année.
J'aime les énumérations, et pour l'instant j'essaye de les garder plutôt positive, parce que quand je m'y mets, je mets pas longtemps à violemment te tailler. Parce que tu as tellement de defauts sur lesquels j'ai fermé les yeux, tellement de méchants mots qui me sont passés au dessus; plus j'y pense plus je me sens bête, parce que honnêtement, en notre amitié j'y ai cru.
Il y a tant de raisons qui me poussent à écrire ce texte aujourd'hui, maintenant, comme ta voix qui tremble quand tu m'adresses la parole pour la première fois depuis des mois, ou ton petit sourire se voulant bienveillant quand je te réponds que je n'ai rien à foutre de ce que tu me racontes; ton hypocrisie permanente avec ces gens que tu insultais si aisément, ma main qui, pour le théâtre, s'écrase sur ton crâne en se contrôlant vainement.
J'ai si honte de ne pas pouvoir te regarder dans les yeux et te dire "je te hais", alors je le toussote à l'air, espérant qu'il porte mes mots lâches, et peut-être trop vrais pour être dit.Parce que je sais que le peu de gens qui vont lire ce truc vont se dire : eliah, toujours à se plaindre, encore un truc negatif où elle raconte sa vie merdique, et ils ne feront que corroborer ce que tu m'as craché au visage, ce pourquoi tu t'es barré.
Parce que j'en suis conscient.e tu sais, que je suis un véritable fardeau, que c'est difficile à vivre et à supporter, quelqu'un qui va pas bien, surtout quand pendant un moment il allait mieux. Je sais que je me suis trop déchargé sur toi, que j'aurais dû prendre sur moi, moins faire ma victime de la vie, apprendre à vivre avec la dépression plutôt que de me complaire dedans, comme tu l'as si bien dit. Et crois moi que si c'était aussi facile à dire qu'à regretter, j'aurais déjà arrêté.
Mais voila, j'y arrive toujours pas, et j'fais même maintenant des trucs pires; mais tu fais bien tes conneries de ton côté. Je n'ai fait que des erreurs, alors je te pardonne.
Peut-être qu'au fond c'est moi, LA PIRE PERSONNE.
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Cimetière verbal [RECUEIL DE TEXTES]
PoezjaCi-gisent mes textes morts trop tôt. Tous mes textes qui n'auront jamais de fin. Tous ceux dont la vie ne dépasse pas un unique chapitre. Tous ceux me permettant de me vider intérieurement. Tous ceux dont le style est plus que médiocre. Qu'ils repos...