Loup veilleur

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Les cartes sont distribuées. Le maître du jeu est prêt, la partie peut commencer ! Ici, mon but n'est pas de gagner, mais de semer le plus possible le trouble. J'avoue, je veux la faire gagner, elle me verra peut-être enfin. On se retrouve ici tous les samedis soir depuis plusieurs mois maintenant. Je l'ai remarqué dès les premières parties, mais d'une timidité maladive, je n'ai pas osé lui parler. Donc j'ai opté pour une autre méthode. Veiller sur elle à chaque partie pour que peut-être elle me remarque. Chacun regarde sa carte et je me dépêche de les suivre. Je dois me concentrer. Je suis un loup, mais tant pis, je me la jouerai solo. La partie est bien avancée, aucun loup n'a pour l'instant été éliminé. Et le plus important est qu'elle soit encore en course. Les jeux se ressèrent, Cupidon est mort, mais il a entraîné un loup dans sa chute. Je me demande quel couple farfelu il a encore choisi. Pour l'instant, j'ai pu éviter d'être touché par sa flèche, mais il fera bientôt de moi sa prochaine victime. La voyante est morte tuée par ma meute. Mais le village semble vouloir ma tête au bout de leurs piques. Et soudain, elle me vient en aide, affirmant que j'ai été sa cible et qu'elle a dû me sauver. Malheur, elle vient de révéler son rôle : elle est la sorcière ! L'ont-ils compris ou la prennent-ils pour un des miens ? Au moins leur attention n'est plus portée sur moi, mais sur mon dernier loup. Il meurt, entraînant ma belle avec lui. La jalousie semble vouloir montrer le bout de son nez mais je l'en empêche. Je meurs finalement sous les coups du chasseur, faisant ainsi gagner les villageois. Je suis encore assise sur ma chaise, lorsqu'elle s'assoit à côté de moi. Elle me regarde longuement, en silence. Je suis déstabilisée et le rouge me monte aux joues.
« J'ai remarqué qu'à chaque partie, tu sembles veiller sur moi. Je crois avoir compris la raison donc je me demandais si je pouvais te demander ton numéro. »
Je n'arrive pas à lui répondre. Mon cerveau refuse de coopérer. Je l'observe fixement pendant de longues secondes, la mettant sûrement mal à l'aise. Et soudain tout refonctionne, je sors mon téléphone et lui tend. Elle me sourit, inscrit son numéro et me le repasse.
« Merci, mon petit loup, peut-être que l'on pourrait se voir, un autre jour. Pour discuter des différentes tactiques, bien entendu »
Sur ces mots, ses lèvres effleurent ma joue et elle part. Au pas de la porte, elle se retourne et me fait un clin d'œil. Je ne peux m'empêcher de sourire tout en rougissant. C'est la meilleure partie de loup-garous que je n'ai jamais fait !

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