Je cours dans la rue comme une dératée, et au bout de quelques secondes, je me demande si ça vaut vraiment le coup que je me déclenche un point de côté. Que je me dépêche ou non, ça n'effacera pas mon retard. Je redoute tellement la réaction de ma mère que j'ai complètement dessoûlé. En arrivant devant chez moi, je sors les clés de la poche de mon pantalon et avance jusqu'à la porte d'entrée à pas de loup. Avec un peu de chance, elle dort profondément.Je tourne la clé dans la serrure, lançant une petite prière aux cieux, et après être rentrée sur la pointe des pieds, je referme la porte avec autant de discrétion que je l'ai ouverte. Le salon est plongé dans le noir et je n'ose pas sortir mon téléphone pour allumer la lampe torche. Je progresse prudemment dans l'obscurité, espérant réussir à atteindre ma chambre sans rien heurter, mais tout à coup, je me prends les pieds dans un truc mou, plein de poils... et qui miaule.
— Chut, Big-Mac ! chuchoté-je en me baissant pour prendre mon chat dans mes bras. Tu vas réveiller ta mégère de grand-mère et maman va se faire engueuler. Tu n'as pas envie que maman se fasse engueuler, pas vrai ?
Les yeux verts de mon chat brillent dans la pénombre. Il m'observe d'un air de dire : file-moi à manger et je fermerai mon clapet. D'où l'origine de son nom. Ce chat est tellement un glouton, qu'il serait capable de manger tout et n'importe quoi. Alors qu'il avait à peine quatre mois, je l'ai surpris en train d'engloutir mon burger sur le comptoir de la cuisine.
— Désolée mon gros, je poursuis en l'enfermant avec moi dans ma chambre. Tu sais ce que le vétérinaire a dit, tu as du poids à perdre.
Lorsque je tends la main pour allumer l'interrupteur, Big-Mac en profite pour quitter mes bras. Je file dans ma salle de bains, me démaquille, me déshabille et prends un médicament pour prévenir ma gueule de bois avant de retourner dans ma chambre. Alors que je me glisse sous les draps, je sens une drôle d'odeur provenant de mon épaule droite. En repensant à l'épisode où Lucy m'a aspergée avec sa bière, je pousse un grognement agacé. Il est hors de question que je prenne une douche maintenant, ça risquerait de réveiller le dragon qui dort dans la chambre d'à côté.
Je retourne dans la salle de bains, prends un gant de toilette que j'humidifie, puis le frotte sur mon épaule. Je baille plusieurs fois devant le miroir, dormant à moitié, et quand je réalise que je suis en train de me décaper la peau, je jette le gant dans l'évier et repars me coucher. Je suis tellement fatiguée que je n'ai même pas la force d'aller éteindre la lumière. Petit à petit, je sens le sommeil me gagner, mais je suis obligée de rouvrir les yeux en entendant la vibration de mon téléphone. Au prix d'un effort colossal, je l'attrape sur ma table de chevet, et mon coeur fait un bond quand je lis le nom de l'expéditeur. Maman. La peur au ventre, j'ouvre le message.
J'espère que tu t'es bien amusée.
Ça veut dire, en d'autres termes, qu'elle va me faire regretter d'avoir passé un bon moment. La journée de demain n'a même pas commencée qu'elle s'annonce déjà animée. Mais au lieu de préparer un long discours d'excuse, je m'endors comme un loir.
*
**— Debout là-dedans ! Tu ne crois quand même pas que je vais te laisser faire la grasse matinée !
Ma mère ouvre les rideaux et la lueur aveuglante du soleil me fait grogner de protestation. Sans soulever les paupières, je couvre mon visage sous les draps pour essayer de me rendormir.
— J'ai dit : debout !
Elle attrape les deux bouts de ma couverture et la tire vers elle. J'essaie de la récupérer, mais elle m'en empêche en me donnant une claque sur les doigts. Maintenant que je n'ai plus de quoi me protéger, je cligne frénétiquement des paupières. Pendant un instant, j'ai l'impression que la lumière du jour m'a rendue aveugle, ce qui me fait lâcher un juron.
— Je veux que tu m'accompagnes à mon rendez-vous de ce matin, alors dépêche-toi.
Je me frotte les yeux, m'arrachant la moitié des cils.
— Pour quoi faire ?
— Pour être sûre que tu ne te rendormes pas.
Elle quitte ma chambre en sifflotant d'un air joyeux, ce qui me met doublement de mauvaise humeur.
— Je t'ai déjà dit que tu me faisais penser à l'horrible marâtre de Cendrillon ?
— Et toi, tu es tout le contraire d'une princesse ! hurle-t-elle depuis la salle à manger. Tu me feras le plaisir de ranger ce foutoir qui te sert de chambre !
En soupirant, je me lève et pars la rejoindre dans le salon. Je la regarde s'activer et courir en tous sens, ce qui est loin d'arranger ma migraine. Elle ne pourrait pas me donner un peu de son énergie ? Bordel, j'ignore comment je vais faire pour lutter contre la fatigue. Sadique comme elle est, elle serait capable de me coller les paupières avec du scotch pour me tenir éveillée.
— C'est quoi comme rendez-vous ?
— À ton avis ? Que fait ta mère dans la vie ?
Elle me jette un regard moqueur et recommence à s'activer dans le salon, ramassant au passage son sac en cuir qu'elle lance sur son épaule.
— Tu veux que je t'accompagne à ton cabinet dentaire ? Tu n'as pas plus horrible encore comme punition ?
Si j'entends ne serait-ce qu'une minute le bruit atroce et continu de la fraiseuse, je vais me taper la tête contre les murs.
— Ta punition ? répète-t-elle en riant. Oh, ma chérie. Ce n'est rien comparé à ce que je te réserve.
— Je ne sais pas ce que tu as prévu de me faire faire, mais ça ne peut pas être pire que de voir les amygdales de tes patients. Rien que d'y penser, ça me donne la gerbe. Et avec tout l'alcool que j'ai bu, ça peut sortir à tout moment. Pas sûr qu'ils apprécieront de voir le contenu de mon estomac.
Ma mère s'arrête au milieu du salon pour me regarder d'un air dégoûté. Oui ! Mon plan marche à merveille, je sens qu'elle est à deux doigts de renoncer à m'emmener sur son lieu de travail.
— Tu as beaucoup bu ?
— Ça va. Pas suffisamment pour me transporter d'urgence à l'hôpital, mais bien assez pour repeindre la tapisserie de ton cabinet avec mon vomi. Rouge cerise, ça te plaît comme couleur ?
— Tu m'épuises, Alayna. Pendant mon absence, je veux que tu me nettoies cette maison de fond en comble. À commencer par ta chambre. Tu as trois heures devant toi pour me faire briller cette baraque, alors ne perds pas une minute ! Il y a du boulot.
Je ris.
— Tu vois, quand je te dis que je suis Cendrillon, et toi, l'affreuse marâtre ! Je n'exagère pas.
Elle pousse un soupir avant de sortir de la maison. Enfin seule ! Je me jette sur le sofa, prête à me rendormir, mais des miaulements rauques me font rouvrir les yeux. Big-Mac traverse le salon en continuant de hurler à la mort et disparaît dans sa pièce préférée : la cuisine. Achevez-moi mon Dieu, s'il vous plaît. Je me relève avec peine et pars rejoindre cette créature du diable qui m'attend devant sa gamelle vide.
— Vous vous êtes concertés tous les deux pour me casser les noix aujourd'hui ?
La grosse boule de poils rousse miaule plus fort.
— Tais-toi, t'es casse pied ! dis-je en prenant ses croquettes allégées. Si tu n'étais pas aussi mignon, je t'aurais mis à la porte.
Je commence à peine à remplir sa gamelle qu'il se jette déjà dessus comme un goinfre. Je me recule pour le laisser manger et retourne dans ma chambre. En voyant l'heure affichée sur mon réveil, je souffle : neuf heures quinze. Ma mère rentre dans moins de trois heures. Si elle me retrouve en train de pioncer, elle va me tuer. J'ignore mon lit et commence à ranger mon bureau qui ne croule non pas sous les dossiers, mais sous la poussière. Après deux bonnes heures passées à récurer toute ma chambre et ma salle de bains, je décide de m'accorder une pause bien méritée. Je m'écroule à plat ventre sur mon lit et prends mon téléphone pour voir si je n'ai pas reçu un SMS de Lucy. Quand j'allume l'écran, je vois bien un nouveau message qui s'affiche, sauf qu'il ne vient pas de Lucy, mais d'un numéro non enregistré. Curieuse, je l'ouvre.
Salut, grande gueule.

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Bad Boy Crush
RomancePublié aux Editions Addictives 📚 disponible en format numérique et poche. Craquer pour le bad boy du lycée ? Hors de question ! Célian est sexy, séducteur, sombre, et sûr de lui. Toutes les filles du lycée craquent pour lui, et il ne se gêne pas p...