Vulnérable (Tome2 AVIFic - BxB)

CHAPITRE ONZE

PDV REX.

La nuit de samedi a été mouvementée. Je ne pensais pas lui déclarer mon amour de cette façon, surtout pas après avoir envoyé son colocataire à l'hôpital. Apparemment il est parti aux urgences quand on est rentré. Pour tout vous dire, je n'en ai strictement rien à foutre. Il l'a cherché et bien mérité.

Les mots sont sortis avant que je ne puisse les maitriser. J'avais le besoin de lui dire, à ce moment précis. Alors pourquoi reculer ? Il était inutile d'attendre et de faire toute une mise en scène, peut-être foireuse. Ce qui compte, c'est qu'il le sache.

Mine de rien, je n'arrête pas d'y repenser. Je sais qu'il a été touché et très ému, je l'ai lu dans ses yeux et je l'ai senti dans ses gestes. Pourtant, quelque chose me chiffonne. Pas seulement parce que je vais devoir me sortir les doigts du cul et parler à Aedan. Forcément, ça joue sur mon mental, c'est présent au fond de chacune de mes pensées. Sauf que ce n'est pas la raison de cette pression interne que je ressens. En vérité, l'idée d'avoir dit « je t'aime » à Alastair a été une étape puissante pour moi. J'ai officialisé les choses, je me suis réellement engagé, chose que je n'avais plus fait depuis longtemps. C'est une phase que je ne pensais passer à nouveau. J'en suis fier, bien sûr, surtout parce que je sais que mes sentiments ne sont pas à sens unique. Seulement, j'aurais aimé me déclarer d'une autre manière. C'est uniquement cela qui me tracasse, alors que ça ne devrait pas. Après tout, Alastair avait seulement besoin de l'entendre. Il se fiche éperdument de la façon dont je l'ai dit. C'est simplement dans ma tête, que ça coince.

On a passé toute la journée de dimanche au fond du lit à regarder des films. Est-ce que nous étions attentifs ? Je ne crois pas. Alastair réfléchit à ce qu'il va se passer à propos de Cole. Et moi, je dresse mentalement le déroulement de ma discussion qui doit arriver avec Aedan. Le docteur Madden est fort dans son petit jeu. Il a réussi à m'ancrer dans la tête de me confronter à lui, de mettre ma fierté de côté pour avancer. C'est pour mon bien, c'est vrai. Seulement, je suis terrorisé. Je ne sais pas quoi lui dire, je ne vois même pas quel serait le but de la discussion. « Oh tiens salut, tu te souviens de moi ? Figure-toi que ce que tu as fait a bloqué ma vie sentimentale et que je commence à peine à sortir du cercle dans lequel tu m'as plongé. » Il faut avouer que c'est un peu nul, comme entrée en matière. Si ça se trouve, en plus, il ne se souvient même pas de moi - mais j'en serais terriblement vexé si tel était le cas - donc peut-être que je me prends le chou pour pas grand-chose. Dans tous les cas, il faut que je lui parle. Ne serait-ce que pour ma santé mentale. Mon cerveau ne s'est pas reposé une minute depuis qu'il est entré dans cette salle de conférence.

Cela se ressent énormément, d'ailleurs, j'en ai bien conscience. J'ai pris mes distances avec Alastair en revenant comme une fleur aux moments où je me sentais un peu mieux. Ce n'est pas très gentil de ma part, d'autant plus qu'il me tend les bras dès que j'en ressens le besoin. Je le délaisse alors qu'il fait tout pour m'être agréable. L'ingratitude fait visiblement partie de moi et je ne sais pas comment changer ça. J'espère donc que demain me sera bénéfique.

- J'ai une idée, je lui lance soudain.

Je sais pertinemment qu'il n'est pas du tout concentré sur le film, mais il met quelques secondes avant de détacher son regard de l'écran. Je tends la main vers lui et il enroule nos doigts sous la couette. Son visage est interrogateur.

- On est en train de se prendre la tête pour des trucs nuls. Alors on devrait faire un pacte pour se forcer à ne plus rester des plombes à réfléchir.

- Et tu veux faire ça comment ? me demande-t-il.

Il est sceptique et c'est normal. Après tout, l'idée n'est même pas claire. Quand je tente de l'expliquer, j'en suis incapable. C'est pourtant limpide dans mon esprit, mais l'exprimer de vive voix, c'est une autre histoire.