CHAPITRE VINGT-TROIS

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PDV REX.

- Rex ! Rex, bon dieu, tu es là ! Réponds-moi ! Ça va ?! Rex, réponds !

Mon esprit est à des kilomètres de là. Je suis transi de froid et incapable de dire quoi que ce soit. Ma gorge est asséchée par l'alcool, les pleurs et la fumée des cigarettes que je n'ai pas arrêté de consumer. Je ne suis qu'une ombre. En entrouvrant les yeux je l'aperçois au-dessus de moi. Je ne veux pas le voir, je ne veux pas l'entendre. Lorsqu'il tente de me redresser, d'apercevoir mon visage, je me mets à gémir. Je ne peux pas bouger. Il parvint malgré tout à me mettre sur le dos puis à me déplacer pour me laisser en position assise, appuyé contre le petit muret qui me sépare du bord. Il tente d'étendre mes jambes mais je lutte au maximum pour qu'il ne le fasse pas.

- Non ... non ... non, je geins dans un bruit rauque et pourtant presque inaudible.

Je crois qu'il comprend puisqu'il n'insiste pas. Mes yeux sont collés et me piquent. Je n'ai plus suffisamment d'eau dans mon corps ... sinon je serais encore en train de pleurer. En relevant la tête je vois son regard arrêté sur mon pantalon. Anéanti par la honte, je tente de me recroqueviller à nouveau.

Je me suis pissé dessus. Une fois, ou peut-être deux. L'embarras total. Je pue l'ammoniaque, je baigne dans ma pisse. Mes cheveux sont sales et emmêlés. Alastair fait un geste vers moi mais je l'arrête. Il tente de parler et je lève le petit doigt pour lui intimer de se taire. Ma tête heurte le béton lorsqu'elle tombe en arrière. Du sang coule de mes lèvres tant elles sont sèches. Je ne cesse de les mordre.

- Rex, tu peux pas rester comme ça, il faut qu'on rentre.

- Laisse-moi. Va crever.

Mes mots sont crus et durs. Il ne se rend pas compte du mal qu'il m'a fait. Il ne sait pas. Il ne comprend pas. Il pose malgré tout son manteau sur mes épaules et je n'ai pas la force de le jeter au loin. Mon corps en a besoin et je m'y blottis. Irrationnellement, lorsqu'il s'assoie à côté de moi et qu'il tente de me prendre dans ses bras, je n'ai pas la force de l'envoyer chier. Ce n'est pas l'envie qui manque, pourtant. Je me laisse alors bercer et réconforter par ce garçon que j'aime et qui me fait souffrir. J'ai autant envie de le blesser que de l'embrasser. Il est là, désormais, et sa chaleur se propage dans mon corps. Quelque part, je me sens apaisé qu'il ait fini par me trouver et méchamment en colère qu'il ait mis tant de temps. Je balance entre deux extrêmes sans savoir où me fixer.

- Je suis terriblement désolé Rex, commence-t-il.

- Tais-toi. S'il te plait.

- Mais je...

- Ta gueule putain !

Je m'étouffe après avoir haussé la voix. Malgré tout, il vient de raviver la douleur que je croyais avoir éteinte. Après m'être enfui, j'ai dévalisé un vendeur ouvert vingt-quatre heures sur vingt-quatre. J'ai acheté de l'alcool alors que c'est normalement interdit. J'ai pris un autre paquet de cigarettes. Sur mon chemin, j'ai croisé un dealer qui se rendait en boite. Je lui ai acheté de la drogue dure avec le peu de liquide qu'il me restait. J'ai piqué mon avant-bras avec cette technique apprise en cours. J'ai plané un temps avant de chuter. La descente a été dure, brutale, peut-être même que ce fut l'étape la plus dure de cette trop longue nuit.

Pourtant, je ne suis pas mort, cette nuit. Je suis encore trop vivant pour ressentir ce qu'il se passe. La trahison d'Alastair. Les souvenirs de ce bar, de ce qu'il s'y est passé. J'aurais préféré mourir d'une dose létale.

- T'es qu'une putain de grosse merde. Le plus con des enculés de ses morts, je crache sans même savoir ce que je dis.

La haine se déverse dans mes paroles. Cette fois, c'est lui qui pleure. Il se détache de moi. Ses yeux habituellement si purs sont blessés. Profondément. Son regard est encore plus déchirant que la fois où je l'ai frappé. J'ai touché quelque chose et je suis heureux de le savoir souffrir autant que ce je souffre en ce moment. Cependant, mon cœur se déchire également à cette vue. Je crois que je l'aime si intensément que le blesser me heurte aussi. Je n'ai jamais exposé mon cœur à un tel combat. Même mes sentiments pour Aedan n'étaient pas aussi forts. Putain, que ça fait mal.

Vulnérable (Tome2 AVIFic - BxB)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant