Mutter

2. Nostalgie

Je suis enfin arrivé à mon endroit préféré, le parc Yeouido. Chaque printemps je m'y rend, je m'assois sur ce même banc pour contempler les cerisiers japonais. Quand les pétales quittent leurs branches, elles volent dans les airs avec la brise du vent et c'est pour moi, une des plus belles choses en ce monde. Cette délicatesse et cette poésie émanant de ces arbres, me remplie le cœur. Pendant un instant, mon esprit, et mon âme se laissent porter au gré des voltigeuses pétales. Je me laisse alors allé de plus belle et me décide à fermer les yeux. Je sens le vent me chatouiller la peau et mes cheveux vert menthe se mouvoir dans la brise. Dans mes oreilles passent une de mes musiques favorites. La mélodie me berce et tout mon corps se détend. Je pourrais rester ainsi une éternité si je le pouvais. 

Après plusieurs minutes, j'ouvre doucement les yeux et aperçois au loin un femme et un petit garçon, ce dernier a de longs cheveux noirs et un grand pull blanc sur le dos. Le petit rit à chaque mots prononcés par la femme que je suppose être sa mère. Il tient un ballon rouge de sa mains gauche, et de l'autre celle de sa maman. Cette vision me touche en plein cœur, je dois bien l'admettre. Je repense alors moi aussi à ma génitrice, retenant pourtant au maximum mes émotions, une larme s'échappe finalement contre mon gré. J'amène mon index à mon dessous d'œil et me décide à poursuive ma route dans le parc.Je suis souvent mélancolique et ça depuis mon plus jeune âge. J'ai toujours été un garçon introverti, rêveur et même lunaire. Je suis celui qui ne parle pas ou peu. Celui qui se fond dans la masse pour ne pas attirer l'attention. Je suis ce garçon arrogant pour certains, ce garçon timide pour d'autres. À vrai dire, je n'ai simplement pas envie de me mélanger aux autres, la solitude me plaît et le bruit me dérange. Et je me dis qu'après tout, qui pourrait comprendre une personne comme moi.

Cela va faire bientôt un an et demi que je travaille dans une usine d'agroalimentaire, tout ça pour dire que je suis payé une misère pour emballer d'infâmes nuggets de poulet dans des boîtes en carton. Les conditions de travail y sont médiocres et l'amabilité du personnel est digne d'un cimetière. C'est un boulot ingrat, mais je ne peux m'en prendre qu'à moi-même après tout. Il faut dire que je n'ai jamais été une flèche à l'école, du moins je ne m'y intéressais pas vraiment. La seule matière qui avait et qui a d'ailleurs toujours de la valeur à mes yeux était les sciences humaines. J'y voyais un réel intérêt, car j'avais l'impression en l'espace de quelques heures, de comprendre qui j'étais vraiment ainsi que les conditions de mon existence. Mais cela n'était pas suffisant pour obtenir une moyenne suffisante pour accéder aux facultés que je visais autrefois. Mais à présent, je me suis fait une raison, je suis un sal gosse qui n'a pas voulu travailler et qui en paye aujourd'hui les conséquences. Heureusement, en dehors de ce sal boulot, j'ai un meilleur ami sur qui compter, Yunjae. Un vrai rayon de soleil qui en un sourire, peut vous illuminer une journée. Je ne sais sincèrement pas comment j'aurai tenu jusque-là sans lui. Nous sommes complémentaires, l'un ne peut tenir sans l'autre et cet équilibre perdure depuis près de dix ans. Nous avons grandi ensemble et malgré tout, notre lien ne s'est jamais essoufflé malgré les difficultés et les nombreuses embûches que nous avons pu rencontrer par le passé. Je suis fier de notre amitié et fier de cette personne rayonnante qu'est mon meilleur ami.