Chapitre 4. « Run run runaway, runaway baby, before I put my spell on you »

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Une semaine avait passé depuis notre virée aux urgences. Raphaël était resté quelques jours à l'hôpital en observation pour récupérer. Son traitement devait être réadapté et il devait voir son kiné et son pneumologue plus souvent. Il m'avait caché que la maladie avait encore évolué et j'étais encore très frustrée de n'avoir rien vu, moi qui lisait d'habitude en lui comme dans un livre ouvert. Je l'avais littéralement pourri et lui avais fait la gueule pendant deux jours.

Je sortis de cours à 14h, saluai mes amis et rentrai chez moi pour enfiler mes affaires de sport pour aller courir. Je n'avais eu ni entraînement ni séance de musculation aujourd'hui, et l'hyperactive que j'étais avait besoin de se dépenser.

Je courrais dans les rues de Paris, passant par des parcs lorsque j'en trouvais. Dijon me manquait pour la course à pied : je n'avais qu'à prendre un bus ou marcher un peu pour aller courir autour du lac ou en forêt, me dépasser dans des montées, des chemins boueux et tortueux, dans les cailloux par beau temps comme par mauvais temps. Ça sentait tellement bon, le silence de la forêt me plaisait énormément. Loin des conditions parisiennes, avec la pollution et le bruit des voitures.

Mais je ne regrettais pas pour autant d'avoir déménagé. En seulement quelques semaines j'avais beaucoup appris avec mes nouvelles coéquipières et mon nouvel entraîneur. Et même si mes amis me manquaient beaucoup, j'avais fait de belles rencontres à la fac.

Après dix kilomètres de course, je m'arrêtai dans une brasserie pour me prendre à boire et m'asseoir en terrasse : cela me requinquerait pour les dix kilomètres restant du chemin du retour.

Je regardais les voitures et les passants : il était 16h, certains rentraient du travail, d'autres allaient probablement chercher leurs enfants à l'école, tous avaient quelque chose à faire, une mission bien précise à ce moment de la journée.

C'est alors que, me sortant de ma réflexion, une silhouette vint me cacher la vue :

– Jamais tu t'habilles autrement qu'en tenue de sport ? me lança la silhouette.

Je n'arrivais pas à identifier la personne car elle était en contre-jour. Mais sa voix grave ne m'était pas inconnue et je me rappelai du gars à qui j'avais parlé devant les urgences l'autre soir.

Tout en plissant les yeux et en me servant de ma main comme d'une visière pour cacher le soleil qui m'éblouissait et m'empêchait de distinguer son visage, je répondis :

– Bouges, tu me caches de mes vitamines D.

Il s'écarta pour prendre une chaise et s'assit à côté de moi. Il souriait bêtement.

Sérieusement quelle était la probabilité pour que je le recroise par hasard dans la rue dans une ville aussi grande ? J'étais un peu agacée mais en même temps franchement surprise. Vraiment, quitte à me répéter : c'était quoi la probabilité ?

– Toujours aussi commode à ce que je vois !

Je ne répondis pas, continuant de fixer les voitures et les passants, faisant semblant d'ignorer son incruste.

Je n'avais rien contre lui, c'était par pure volonté de l'emmerder. Je n'étais pas mécontente de le revoir, il avait été très sympa l'autre soir et j'avais senti que quelque chose était bien passé entre nous. Mais ma fierté prenait le dessus et je ne voulais pas montrer que j'étais contente d'avoir la possibilité de lui reparler.

Mon silence n'eut pas l'air de le déranger pour autant puisqu'il continua :

– Ça va mieux depuis cette nuit à l'hosto' ? Je sais pas pourquoi t'y étais et je te demande pas de me le dire mais t'avais pas l'air ienb.

Jim MorrisonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant