- Point de vue de Basile -
Il n'y a presque pas un bruit si ce n'est le piaillement des oiseaux bien trop matinaux pour moi. Le bras que je tends sur ma droite ne trouve aucun obstacle et la brusque réalité d'être seul me rattrape. Ce n'est donc pas un énième mauvais rêve. C'est vrai.
Il n'est pas là.
- Basile, c'est moi ! T'es là ? T'es debout ?
La charmante et ravissante voix de Cléo résonne dans toute la maison et me sort de mon état de demi-sommeil, car avant même que je ne lui réponde, cette dernière se précipite à l'étage. Je l'entends venir. J'entends le plancher qui craque et j'entends ses pas d'éléphants dans le couloir.
- Ah te voilà !
- Bonjour à toi aussi. Que me vaut cette visite matinale au saut du lit ?
- Je passais faire une livraison dans le voisinage donc j'ai décidé de faire un arrêt.
- Quelle heure est-il au juste ?
- Six heures moins le quart ? Quelque chose dans le genre.
- Six heures moins... ? Seigneur. Et donc, tu as décidé de me tirer de mon sommeil à cette heure-ci ? Tu ne trouves pas que c'est un peu tôt Cléo ?
- Je suis venu avec les pains au chocolat ! Tu vois Basile, je connais ton petit côté ourson grognon au réveil donc je viens avec une offrande de paix.
- T'as de la chance. Tu peux aller préparer le café pendant...que j'enfile une tenue correcte ?
Je lui fais signe que j'ai le drap remonté sur moi pour cacher ma nudité nocturne que je ne tiens pas à lui dévoiler.
- Depuis quand tu as pris la liberté de dormir tout nu au juste ? Tu dors toujours en pyjama normalement, non ?
- Dehors Cléo.
- Au moins, j'aurai pu voir de quoi égayer ma journée.
- Allez ! Zou, zou !
- Même pas un petit aperçu ?
- Dehors !
Je l'entends éclater de rire à hauteur du couloir tandis que je me défais de ma couverture. C'est vrai...Je dors nu. Comme un vers. Je présume que c'est une habitude que j'ai prise depuis que je partage mon lit avec une certaine personne. Avoir un pyjama c'est trop de barrières et d'obstacles à franchir quand on veut se faire un petit plaisir.
Je suis resté un moment assis dans le lit, à me demander ce que j'allais faire de ma journée. Je devrais théoriquement me lever, aller m'occuper de la boutique pendant au moins toute la matinée et ensuite demander à Cléo de me conduire à l'hôpital pour rendre visite à Gabriel, mais étrangement, je n'ai pas le cœur à ça. À rien de tout ça. Une bonne partie de moi voudrait rester là, à ne rien faire, si ce n'est resté coucher toute la journée, allongé sous la couette à attendre que le temps passe. Mais je me connais, et ça non plus, je ne peux pas me le permettre. Ce n'est pas "moi" que de rester tout penaud à ne rien faire et j'ai clairement besoin d'un petit quelque chose pour m'occuper l'esprit, ne serait-ce qu'un minimum. Éviter de penser à tout ce qui arrive, tout ce qui se passe. J'ai pris pour acquis tellement de choses que j'en ai presque oublié ce que ça fait quand la vie vous prive d'absolument tout du jour au lendemain. Pourtant, je ne suis pas étranger à cette sensation de vide. Au fond, c'est comme retrouver une ancienne amie.
Entendant Cléo s'activer dans la cuisine, je me décide bien malgré moi à n'écouter que le peu de courage qu'il me reste et me lève avant d'attraper le premier pantalon et le premier tee-shirt que je trouve traînant ici et là, sur une chaise. Les petits commentaires du style "Ça ne te vas pas" ou "Ce pantalon te fais un de ces culs" me manque. C'est bizarre. Quand j'ai connu Gabriel, j'étais loin, même à des années lumières, de réaliser que j'allais autant m'attacher à lui. Au début, je faisais même tout pour que ça ne se passe pas. J'entretenais la relation de "bonne entente" que Jacqueline aimait, je lui répondais, on discutait un minimum, mais je ne pensais pas aller jusqu'à tomber amoureux de lui. Je m'étais promis que pour moi, ce genre de chose était finie. Comment aimer quand on ne s'aime déjà pas soi-même ? La question de mon existence. Qu'est-ce qu'il voyait en moi ? Pourquoi moi ? Et enfin...Pourquoi lui ? Gabriel avait tout du petit con excentrique, imbu de sa personne, se croyant tout permis. Tout en lui transpirait le "détestable" et pourtant, dès le départ, je l'ai trouvé marrant. C'était juste un gars paumé, ayant perdu ses repères et faisant de son mieux pour s'adapter...ou du moins il essayait. Quelque part, je le comprenais. Je veux dire, quelque temps auparavant j'étais dans la même situation que lui, donc je compatissais.
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Voyage au centre de ton cœur (BxB) - Tome 2 (PAUSE)
RomanceAlors que Gabriel a tout quitté pour poursuivre ses rêves, ces derniers se sont envolés juste sous son nez. Ne sachant plus quoi faire de sa vie et ne pouvant plus suivre le chemin qui lui était destiné, il décide alors d'une idée : Faire du village...