Chapitre 1

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Ça vous arrive de rêver ?

Cette question peut vous sembler étrange, voir absurde. Cependant je suis sérieux.

Plutôt, ça vous arrive de rêver la même chose, continuellement ?

Vous savez, ce genre de rêve où l'on voudrait s'enfuir, mais pour une raison qui nous échappe, nous n'arrivons pas à courir, nous sommes trop lents.

Ce genre de rêve où, quand on se réveille, on pense que c'est réel.

Ce genre de rêve où, on a besoin de quelques minutes pour nous dire :

«Ce n'était qu'un rêve»

Ça vous est déjà arrivé de rêver comme ça ?

Moi oui.

Mais ce n'est pas un rêve. C'est un cauchemar.

Un cauchemar que je ne pourrais jamais oublier. Jamais je ne pourrais me dire :

«Ce n'était qu'un cauchemar»

Je ne pourrais jamais, parce que ce n'était pas qu'un cauchemar. C'était réel.

Je l'ai vécu.

Mais de quoi ai-je bien pu cauchemarder me demanderiez vous.

Je pourrais bien vous le raconter, mais je ne m'en souviens plus. Ça me faisait trop mal.

Comment ? Il fait le même cauchemar toutes les nuits et il ne s'en souvient pas ? Comment peut-il affirmer qu'il l'a vécu dans ce cas ? Comment peut-il dire une chose pareil, alors que, quelques instants avant il affirmait le contraire ?

J'entends vos questions, et je vais vous répondre.

Mais avant cela il faut que je dorme. Il faut que je fasse l'effort de me souvenir. De me souvenir de quelque chose que j'ai voulu oublier. Que j'ai oublié.

Cela tombe bien, j'allais me coucher.

Il doit être minuit (Je ne me couches plus si tôt depuis).

Je m'installe dans mon lit.

Enfin, c'est un bien grand mot pour désigner ce sur quoi je m'allonge.

Un sol, des planches, de la paille, des feuilles mortes, des chiffons, un sac de couchage, moi.

C'est très primaire. Pour être honnête, dormir dans un igloo était plus confortable.

Il faisait chaud, je n'avais pas autant mal au dos, je n'étais pas seul, je m'y sentais bien.

Je tirais la couverture, ou plutôt le pled, sur moi.

J'étais donc seul ici, dans cette pièce, froide, sombre et lugubre.

Quelle idée de dormir là ? me demanderiez vous.

C'est que je n'avais pas le choix. C'était ça ou rien. C'était ça ou crever à cause des radiations.

J'étais fatigué. Mes cernes étaient creusées. Mon teint était blafard. Je ressemblais à un mort. Mon corps était faible.

J'étais faible.

Mes yeux se ferment.

De l'eau salée. Ça me rappelle mes nombreux voyages.

Mes yeux s'ouvrent. Il y a du brouillard et de l'eau salée.

Je passe mes mains sur mes yeux. Le brouillard est parti, le goût salée est resté.

Vingt Mille Lieues sous Terre Où les histoires vivent. Découvrez maintenant