𝐓𝐑𝐀𝐂𝐊 𝐈𝐈

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Les feuilles mortes étaient malmenées par le climat orageux; 
La pluie s'abattait incessamment; 
Le vent soufflait sans répit; 
Le ciel était grisâtre; 
Le soleil était masqué

Un masque, semblable à celui qu'elle portait.
Qu'elle se contraignait à conserver. 
Un magnifique sourire. 
Une splendide personnalité. 
Une somptueuse beauté.

Dissimulant une profonde tristesse; 
Accablée par ce sentiment non partagé. 
Ce ressenti d'inachevé. 
Chagrinée par cette indifférence. 
Affligée par cette impuissance.
Déprimée par cette jalousie.

Cette jalousie à son égard. 
Cette personne captivant son bonheur;
Aggravant son malheur. 
Une détresse inaudible. 
Une frustration égoïste.

La douleur prenant le dessus; 
D'une pauvre âme corrompue. 
Un masque fissuré; 
Proche de l'éclat.

« Kanzaki-san? »

L'intéressée dirigea son brillant regard sur la créature locutrice. Un doux sourire, sonnant faux, se traça sur ses fines lèvres pâles.

« Qu'y a-t-il, Koro-sensei?
- J'ai remarqué que tes poèmes sont de plus en plus maussades ces derniers temps, quelque chose ne va pas? »

Son cœur rata un battement tandis que ses yeux s'écarquillaient doucement. Yukiko porta sa main à sa poitrine, puis répondit sur le même ton.

« On ne contrôle pas son inspiration, Sensei. » expliqua-t-elle, toujours aussi faussement.

Le professeur hocha doucement la tête, peu convaincu par la réponse de la jeune fille. Depuis quelques temps déjà, il avait remarqué cette lueur qui trônait dans son regard ambré; ce dernier, trahissant à présent son impatience.

« C'est tout ce que vous vouliez me demander? »

Koro se décala, laissant ainsi l'espace à la brune pour sortir de leur salle de classe. Il savait qu'il était, maintenant, inutile d'insister.

« Oui. Couvre-toi bien, Kanzaki-san, il ne s'arrête pas de pleuvoir. »

Sur ces sages mots, l'adolescente sortit de la pièce en adressant un dernier sourire à son bienfaiteur.

Des faux-semblants, dissimulant son amertume.
Des sourires, déguisant sa douleur.
Des rires, couvrant son irritation. 
Un masque, porté à la perfection.

Des émotions insensées. 
Des sentiments incontrôlés. 
Sans cesse pourchassée; 
Coursée par cette dure réalité.

Comme l'avait fait remarqué le professeur, la pluie se déferlait brutalement sur la colline, humidifiant sans arrêt la végétation; aucun de doute, Novembre était bel et bien là.

Kanzaki s'arrêta à la chambranle de la porte principale, fixant calmement le ciel s'assombrir tant les nuages étaient obscurs et nombreux.

« Yukiko-chan! Tu veux qu'on descende la colline ensemble? » résonna gaiement une voix provenant de derrière.

La brune se retourna, un sourire radieux illuminant son fin visage. Elle avait presqu'immédiatement reconnu la voix de celle qui l'appelait; cette douce mélodie appartenait à sa meilleure amie, Kayano.

« Bien sûre, Kaede-chan! acquiesça la jeune fille, tandis que la naine se plaçait près d'elle.
- Je n'avais pas prévu qu'il pleuve autant, et je n'ai pas de quoi me couvrir... »

Suite à cet aveu, la littéraire rit doucement. Elle ouvrit son parapluie et sortit du vieux bâtiment grinçant, bien vite suivie de la verte qui lui emboîta le pas.

Les deux camarades descendaient calmement la colline orangée par la saison, les feuilles mortes éparpillées sur le béton des marches craquant sous leurs pas.
Le vent soufflait fortement, et le tonnerre ne tarderait sans doute pas à gronder.

Ce fut finalement la plus âgée qui brisa le silence, alors que ses orbes dorés fixaient interrogativement sa compagne.

« Tu m'as l'air bien joyeuse, il s'est passé quelque chose? » demanda-t-elle, munie de son éternel et bienveillant sourire.

Kayano hoqueta alors que son teint virait au rouge. Ses lèvres commencèrent à trembler, des sons incompréhensibles en sortant.

Comprenant la cause de cette réaction, le visage de Yukiko s'assombrit tandis qu'elle cessait sa descente.

« E-en fait...Nagisa a...Il a accepté d'aller avec moi au karaoké, ce weekend! » réussit finalement à articuler l'accro au flan.

La brune sourit en coin.

« ...Je vois. » murmura-t-elle alors que son regard déviait vers le ciel couvert.

« Hii! » cria pitoyablement Kayano en s'agrippant à la manche de la poète alors que l'orage éclatait.

Cette dernière sentit tout son être se réchauffer à ce soudain contact, alors que ses joues s'empourpraient faiblement, l'air hagard.

Son amie dû mettre quelques instants avant de se remettre de sa frayeur, tant sa surprise était grande.

« ...Ça va? » demanda Kanzaki au bout d'un moment d'une voix hachée qui trahissait son hésitation.

L'adolescente remua positivement la tête, néanmoins toujours crispée par les événements passés; elle tenait encore fermement le bras de la plus vielle, comme à la recherche d'un abri où se cacher.

La brune la regardait éperdument, se disant qu'elle aurait tant rêvé que le temps s'en soit arrêté à cet instant, ne serait-ce que pour profiter...

Se délecter de cette chaleur éprouvée. 
Une flamme d'agrément animée. 
Avivée par cette sensation désirée.

Qu'importaient les sentiments insensés,
Qu'importe si les problèmes s'abattaient,
Qu'importe si le masque s'abîmait, 
Car sous ce masque, si joliment porté

Elle souriait entre les mains de l'être aimé.

see you tomorrow  ૢ  暗殺Où les histoires vivent. Découvrez maintenant