Partie 15

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(PDV Keefe)

Je n'attendis pas longtemps avant de me rendre chez Sophie pour lui parler. En arrivant devant sa maison, je m'arrêtai un instant pour humer l'odeur du jasmin planté non loin. Cette senteur était certes agréable, mais pas autant que celle qui émanait de ma Télépathe favorite, un mélange de vanille et de cannelle. Oui, je suis très précis.

Levant les yeux, je croisai un instant les doigts pour la voir sur son balcon, ses mains si douces aux doigts si fins posés sur la rambarde, dans une robe blanche ou bleu-vert, simple mais jolie, ses cheveux emportés par le vent pour dégager son beau visage, le soleil se reflétant dans ses yeux à la couleur si particulière.

Partout où elle allait, la nature jouait élégamment avec toutes ses qualités physiques. Une lumière idéalement placée fait briller la cascade de ses cheveux dorés, un paysage se reflète dans ses yeux bruns, la brise fait danser ses mèches rebelles...

Il faut que j'arrête de penser à elle, il faut que j'arrête.

J'inspirai profondément. L'heure n'était pas aux compliments que je pouvais faire intérieurement à Sophie, mais à la façon dont nous pouvions tous deux percer le secret de cette fameuse nouvelle. J'avançai donc et je toquai à la porte.

Par chance, ce ne fut pas Grady qui m'ouvrit, mais Sophie elle-même. "Elle m'attendait" songea une partie de moi, émerveillée. "Arrête" me réprimanda une autre partie de ma conscience. "Elle n'en a que faire de toi. Elle préfère Fitz, tu te rappelles?"

J'avais envie de nier mais, malheureusement, je savais que c'était vrai. Et ça me brisait le coeur ; je commençais à le détester, cet abruti de Fitz, avec tout le mal qu'il lui faisait... je la voyais pleurer des fois, mais il revenait vers elle avec un cadeau et des excuses hypocrites, et son visage s'éclairait, puis elle le pardonnait, après tout ce qu'il lui faisait. Elle m'ignorait tout simplement, mais comment lui en vouloir? Moi, pauvre garçon invisible qui a vécu au beau milieu de la haute tour de Candleshade entre un père méprisant et une mère secrètement Invisible, je ne suis pas assez bien pour elle. Elle est trop merveilleuse.

-Keefe?

Je vis ses sourcils froncés, ce qui la rendait encore plus irrésistiblement belle. Je m'empressai alors de bégayer:

-Euh, oui, oui! Excuse-moi, j'étais perdu dans mes pensées.

-Ok, ce n'est pas grave. Viens, on va dans ma chambre.

En montant les escaliers, je sentais mes joues encore cramoisies. Pourquoi est-ce que je bégayais toujours en sa présence?  J'imaginais toujours les meilleures répliques à lui sortir, je m'entraînais seul, le soir, à lui parler... et pourtant, le moment venu, je perdais mes moyens.

Une fois arrivé, je m'assis sur un fauteuil tandis qu'elle restait sur son lit.

-Alors, tu as un plan pour en savoir plus? Me demanda-t-elle.

Évidemment que j'avais un plan! J'avais passé toute la nuit de la veille à y réfléchir. Hors de question de perdre la face en venant sans la moindre idée.

-Écoute, je pense que le mieux à faire, c'est déjà de ne pas montrer trop de méfiance, proposai-je. Nous rapprocher d'elle, en gros. Sinon, elle-même se méfiera de nous et cachera plus ses secrets. Alors que, si nous devenons ses amis...

-Je comprends, acquiesça Sophie. Et ensuite?

-Ensuite, j'ai une idée. On pourrait l'inviter à faire une partie de Conquête et la tenir à l'œil! Nous pourrions lui donner une information, qui ne nous trahirait pas bien sûr, mais qu'elle pourrait avoir envie de transmettre à ses supérieurs, si elle agit pour quelqu'un. Et là, nous la suivons discrètement et PAF! prise la main dans le sac. Enfin, sans nous montrer, tu vois.

Elle hocha la tête, visiblement d'accord avec moi. Une partie de Conquête, ça arrange toujours les choses.

Alors nous appelâmes Fitz par transmetteur pour lui proposer de venir à Everglen. Notre plan était en marche.

Une fille différenteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant