Même Paul et Léonard rêvent d'amour

Chapitre XIII.

PAUL

-Alors tu vas me dire que c'est Léonard qui a fait le premier pas?

Je souris en le regardant.

-Oui
-C'est pas du tout son genre rigole Val

Je ne répond pas et me mord la joue en me remémorant la scène. Lorsqu'il m'avait embrassé et que j'avais rigolé pendant dix minutes après et qu'il s'était vexé. Que j'avais rejoint Esther et qu'on avait dansé toute la soirée. Elle avait tenté d'embrasser Léonard, il l'avait doucement repoussé.
Et il avait dit:
-Désolé Esther... Tu es très jolie, très gentille mais je ne peux pas faire ça. Mon coeur bat déjà pour quelqu'un d'autre

J'avais ouvert la bouche avant de la refermer. Je ne trouvais rien à dire. Alors moi, avec mes trois verres de rhum ou de vodka j'sais pas j'ai cru avoir mal compris. Quand j'ai rendu mes boyaux aux toilettes, Esther est arrivée en larmes. Me disant que c'était un connard, et maintenant, je ne pouvais plus lui dire que moi aussi je le détestais. Parce que je ne savais pas.

-Paul croyait que c'était une blague
-Tu n'as pas été explicite aussi
-C'était à toi de comprendre
-Je pouvais pas le savoir!

Il se met à sourire, de ce sourire qui fait chavirer mon coeur et qui réchauffe mon corps tout entier. Il est mon soleil.

En cours nous restons distants, mais lorsque nous sommes seuls c'est différent. Il me prend constamment dans ses bras, comme s'il avait peur que je parte. Léonard est différent de celui que j'ai toujours cru connaître. Il est doux, simple, gentil, drôle enfin ça ça reste à prouver, c'est peut être l'odeur de son parfum qui me tape trop sur la tête. Je crois que je suis vraiment tombé amoureux de Léonard. Et je ne sais pas à partir de quand. Si c'était pendant la première soirée chez Esther, si c'était pendant le repas chez lui, si c'était quand il m'a embrassé devant tout le lycée, ou si c'est durant notre première nuit ensemble. Je ne sais pas. Mais peu m'importe, il est avec moi maintenant, et je ne ressens plus une seule once de haine envers lui, je peux le dire même, je l'aime.

-Si tu pouvais mais tu avais trop peur de ce que ça impliquait! Répond Val.

Il a aujourd'hui décidé d'être mon juge.

-Ah c'est vrai qui pourrait résister à Léonard monsieur je suis parfait et je fais de la natation pour impressionner les filles avec mes gros biceps!
-Les pêcheurs ont des gros bras aussi à force de remonter les filets!

Esther qui tente de prendre ma défense. Elle a exactement le même humour que Léonard. Ça en devient déroutant. Les choses ont changées si vite... Nous nous sommes rapprochés si vite.

-Elle a raison Esther, y a des pêcheurs sexys. Quoi que l'odeur du thon en permanence non merci! Hurle Azenor
-Vous avez fini?
-Tu sais que qui aime bien chatie bien Paul énonce Val en me donnant une petite tape dans le dos.

Léo est assis à ma gauche. Val à ma droite. Les filles en face.

-Mais comment ça a pu arriver vous deux sérieusement? Genre vous êtes hyper différents! Azenor fronce les sourcils un petit sourire aux lèvres. Évidemment elle veut tout savoir.

-Est ce qu'on t'en pose des questions sur ton copain fantôme Az'? Sourit mon nageur
-Roh ça va! Pour une fois que tu es amoureux on peut bien poser des questions! C'est vrai quoi y a deux ans tu connaissais même pas son prénom!
-Je suis frustré. Je connaissais le tien
-Tout le monde connait mon prénom. Mais une chose est sûre c'est que les rencontres les plus inattendues deviennent les plus belles! Deux ans, c'est loin maintenant, faut juste penser au présent. Et mon présent il est près de toi
-Faites quelque chose ramenez nous le Léonard d'avant! Crie Esther d'une même voix avec Azenor.

Elles devraient être amies, elles se ressemblent beaucoup. Point commun numéro un: Léonard a involontairement brisé leur cœur.
Lorsque la sonnerie retentit pour que nous allions en cours, nous sommes tous deux soulagés de pouvoir passer au dessus des questions qui commençaient à devenir gênantes.
Lorsque la journée se termine, je passe comme d'habitude à la piscine. Les gradins sont devenus une seconde maison. J'y passe la plupart de mon temps à regarder Léo s'entraîner. J'ai l'impression d'être dans un de ces mauvais films américains où l'intello tombe amoureuse du quaterback hyper populaire de l'équipe de foot. Cette fille qu'on retrouve cheerleader à la fin du film parce qu'elle voulait encourager son copain. Qu'elle est complètement folle d'amour et que le badboy s'est rangé pour être avec celle qu'il aime alors qu'à l'origine ce n'était qu'un pari stupide avec des amis pour la devierger.
Je soupire. J'ai l'impression de devenir une de ces filles. Le soucis c'est que je ne me vois pas spécialement avec une jupe et des pompons dans les mains. Je ne me vois pas non plus hurler chaque lettre de l'alphabet qui forme le nom de l'équipe du lycée.
Le truc, c'est que y a pas d'équipe de natation au lycée, on est pas aux états unis. Mais au bout de la Terre. Et à Brest, tout reste figer le temps d'une année. Rien ne change vraiment jamais. Tout semble conservé dans de la cire pour ne jamais bouger. La Bretagne a ce don étrange de ne pas faire bouger les choses, d'attirer ses habitants comme un aimant afin de les faire rester ici pour toujours.
Peut être qu'aux états unis d'autres garçons comme Léo et moi pensent que leur ville est figé, que rien d'autre n'existe quand ils s'embrassent. Peut être qu'ils s'appellent Jules, Connor, Brad ou Matt. Peut être qu'ils se posent aussi la question "est ce qu'en ce moment un autre Léonard est en train d'embrasser un autre Paul?". Ce qui est certain, c'est que Léo m'a appris une chose. On ne choisit pas de qui on tombe amoureux, on ne choisit pas comment et où ça se passera. Les seules choses qu'ils nous restent à faire c'est de préserver et cultiver cet amour comme une rose qu'on ne voudrait jamais voir mourir.
S'il n'avait pas collé son visage mouillé et froid contre le mien, je crois que l'amour m'aurait emmené encore plus loin. Mais il a su attraper ma main pour que je reste avec lui. Si on doit un jour se battre, alors faites qu'il soit toujours près de moi.