Chapitre VII.

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PAUL

Léonard est resté dormir à la maison le soir où j'ai fais ma crise de nerfs. Mes parents lui ont expliqué que c'était fréquent, que je n'étais pas bipolaire ni même lunatique, mais tellement sensible pour vivre dans ce monde qu'il m'arrivait de craquer. Que je ne parlais pas de moi mais que ça viendrait, qu'il me fallait du temps, que je me sente en confiance.
C'est des conneries tout ça. Je suis juste trop faible. Et ça, ce n'est pas la faute du monde.
Nous avons dormi tous les deux dans ma chambre, il n'a pas voulu partir, il avait voulu attendre que je me calme, mais ce n'est qu'à 23 heures que j'avais séché mes larmes, et depuis je n'avais pas prononcé un mot. Ça devait être terriblement chiant pour lui.
Il m'avait empêché de me faire du mal, comme à chaque fois que je faisais une crise. Il s'était allongé près de moi, qui regardait le mur d'en face, en position foetale. J'avais essayé de lui tourner le dos mais il s'était alors agenouillé près de moi. Ses yeux émeraude ne quittant pas les miens. Il ne cessait de répéter "je suis là Paul. Ça va aller. Je te le promet". J'avais fini par m'endormir. Épuisé d'avoir tant pleuré. Le lendemain, lorsque je m'étais réveillé, j'avais retrouvé Léonard à ma droite, dormant le plus possible contre le mur afin de me laisser de la place. J'ai souris.
Mes yeux étaient douloureux et lourds à cause des larmes de la veille. Mais pour une fois, j'avais bien dormi.

Ça faisait une semaine que ça s'était passé. Et nous nous retrouvions chez lui, comme presque tous les soirs après les cours. Personne ne savait que nous nous parlions. Personne ne savait que nous devenions vraiment proches. Je crois que je pouvais qualifier Léonard comme mon ami. Mais pas le meilleur, parce que Valentin serait toujours au dessus de lui. Les cours s'enchaînaient, les journées aussi. Esther m'avait pardonné, elle avait dit qu'elle s'était emporté. Elle aussi elle avait longtemps eu droit au discours mélodramatique de mes parents à mon entrée au collège. Je ne sais pas vraiment à quoi est dû ce mutisme et cette absence de ressentir le besoin de dévoiler mes sentiments. Mais c'était arrivé doucement, au début du collège. Et je n'avais plus vraiment été le même après ça.

-Léonard. On se parle presque tout le temps et pourtant on connait rien l'un de l'autre. Viens on se pose des questions et on apprend à se connaître!

Il a rigolé. De ce rire doux et amer à la fois. Ce rire que j'aimais bien entendre parce qu'il me donnait l'impression de pouvoir guérir ma tête et mon coeur.

-Ok si tu veux. Mais on est plus des gamins
-On s'en fou. Au moins on se connaîtra!

Il a sourit. Je crois que ça l'intriguait de me voir si heureux à nouveau. Mais en fait c'est spécial. Lorsque j'explose, c'est une fois tous les 6 mois et c'est que j'ai vraiment trop accumulé. Malheureusement, c'est tombé sur Léonard cette fois.

-Ok je commence. Du coup heu ta couleur préférée?
-Le bleu et le jaune et toi?
-Rouge. Ton film préféré?
-Breakfast club et toi?
-Je n'ai pas vraiment de film préféré. Sinon, ta musique favorite?
-Aftermath et toi?
-Blizzard de Fauve

J'ai hoché la tête. Puis j'ai posé la question suivante.

-Ton plat préféré?
-Les pâtes bolognaises
-Ok ça nous fait un point commun!

Il a encore sourit. Un sourire qui pourrait vraiment réparer des coeurs et en briser d'autres.

-Ta date de naissance?
-Le 15 Juillet. Et toi?
-Le 18 Mai 
-Ton ex copine était comment?
-Il était chatain clair avec des yeux bleus. J'aimais bien le prendre dans mes bras. Et toi?
-J'ai jamais vraiment eu de véritable relation. Juste des filles de passage qui partaient toutes au bout du premier mois. Des filles qui ne tombaient jamais amoureuses. Mais la dernière en date c'était Zélia. Elle était blonde avec de très beaux yeux noisettes. Elle embrassait bien et son parfum sentait bon
-Bon on arrête là. Ce serait triste de se connaître d'un coup! Je veux qu'on garde nos petits secrets pour plus tard. Il m'a fait un clin d'oeil et est parti chercher de l'eau.

Lorsqu'il avait dormi chez moi et dîné avec mes parents, je n'avais pas perçu cela comme une nouvelle tentative pour m'embêter. Non, cette fois là je l'avais perçu comme une tentative de sauvetage.

-Léo? Je voudrais savoir, tu m'apprécies?
-J'ai dis qu'on arrêtait avec les questions Paul

Il a sourit en coin, s'est avachi contre le dossier de sa chaise de bureau et m'a regardé dans les yeux.

-Bien sûr que je t'apprécie. Sinon tu ne serais pas chez moi là maintenant. Et toi?

Je ne sais pas quoi répondre. D'un côté j'éprouve une haine énorme contre lui. Et de l'autre, je l'aime bien, il est toujours là pour moi et on rigole plutôt bien. Mais je ne pouvais pas lui dire que je l'aimais bien, il aurait pris la confiance et n'aurait jamais cessé de m'embêter à cause de ça. Mais je ne voulais pas dire que je le détestais non plus parce que je ne sais pas si c'était encore vrai.
Il attendait ma réponse dans le silence. Il sait que c'est dur pour moi de dire ce que je ressens. Il le sait. Il sait que c'est un énorme travail sur moi même que je dois faire.

Il m'a longuement regardé. Je me suis senti déstabilisé. Déboussolé d'être observé de ses grands yeux verts absolument sublimes. Ses pupilles se sont agrandies, ses yeux se sont mit à pétiller. Il s'est humidifiée la lèvre inférieure et a encore attendu ma réponse. J'ai commencé à jouer avec mes mains comme chaque fois que je suis nerveux. Je me sens déstabilisé en le regardant dans les yeux, mais en même temps, je n'arrive pas à briser ce jeu de regard qui nous unit. Il s'est agenouillé face à moi. Étant un peu plus grand que moi, il ne m'a toujours pas quitté des yeux. Il a relevé mon menton quand j'ai enfin eu le cran de briser notre unique contact.
Il a pris mon visage en coupe, s'est doucement et dangereusement approché de mon visage. Ses yeux dévient sur mes lèvres. Mon coeur s'est mit à battre plus vite.
Je suis content d'être assis car je ne suis pas sûr que mes jambes auraient résisté.
Il s'est arrêté à deux centimètres de mon visage. M'a regardé dans les yeux. A ensuite regardé mes lèvres. Puis, sa main droite est venue se poser dans mon cou. Je suis sûr qu'il peut sentir mon rythme cardiaque s'intensifier. Sa deuxième main s'est posé sur ma joue. Et il a enfin rompu la distance qui nous séparait encore. J'aurais pu reculer. Mais j'étais tétanisé. Je ne sais pas quoi faire.
Ses lèvres ont doucement trouvés les miennes, j'ai fermé les yeux pour profiter de cet instant magique. Il les a d'abord frôlé avant de s'éloigner légèrement. Ce premier contact me fit ressentir une petite décharge électrique dans la totalité de mon corps. Les battements de mon coeur resonnent dans ma tête jusqu'au bout de mes doigts. Il est revenu chercher mes lèvres. Les a embrassé. Est reparti et m'a embrassé plus fort. Ses lèvres douces se pressant contre les miennes. J'ai entrouvert les lèvres et sa langue a dansé avec la mienne dans un ballet vertigineusement délicieux. Ses mains se pressent contre ma peau. Enfin maître de moi même, j'ai posé mes mains contre sa nuque afin de sentir encore plus ses lèvres contre les miennes. Nos yeux ne se quittent pas, c'est à peine si nous osons cligner des yeux. Et si c'était un rêve et qu'en un battement de cils tout disparaissait?
Il sourit contre mes lèvres. Me mordille la peau de ma lèvre inférieure. Ses yeux n'ont pas quitté les miens comme s'il me demandait l'autorisation silencieuse de m'embrasser encore et qu'il attendait mon accord.
Il n'a pas enlevé ses mains de ma peau lorsqu'il s'est reculé à bout de souffle. Il n'a pas non plus dit un mot. J'étais essoufflé, incapable de calmer mon coeur, je ne sais plus quoi penser maintenant. Encore moins qu'avant. Avait il fait ça pour me déstabiliser? Pour me faire parler? Me défiait il de cette façon pour voir si j'étais capable de ressentir?

-Je ne sais pas si je t'apprécie ou si je te déteste Léonard. Tout est trop flou

Il a compris car il a posé son front contre le mien. Et a murmuré

-Je suis là, je serais toujours là

Précipitamment, je suis parti. Ne sachant pas comment faire. Ne sachant pas quoi faire. Je l'ai laissé devant son lit, me regardant partir. Un silence gênant s'étant installé entre nous. Il n'aurait jamais du faire ça. Je n'aurais jamais dû faire ça. Nous n'aurions pas dû.

Même Paul et Léonard rêvent d'amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant