L'Herboriste - Les Thaumaturges I

Clandestins (4) - Renwyck

— Remballe tes affaires, vite ! le pressa Akhbar. Quelqu'un vient.

Renwyck sentit l'urgence dans sa voix. Il jeta ses quelques possessions dans sa besace tandis qu'Akhbar éteignait le feu. La forêt fut plongée dans l'obscurité.

— Partons vite !

Le druide fit quelques pas mais Renwyck ne le suivit pas tout de suite. Il oubliait quelque chose. Son herbier ! Le petit livre était là où il l'avait laissé, au pied de l'arbre, à quelques pas seulement. Il eut à peine le temps de se tourner dans cette direction qu'une main étrangère s'en saisit.

Dans la pénombre des bois, Renwyck eut du mal à discerner le nouvel arrivant. Il s'agissait d'un homme vêtu d'une cape. Renwyck sentit quelque chose de particulier, quelque chose qui lui rappelait sa mère ou même Akhbar.

— C'est un Magian, chuchota-t-il au druide qui avait rebroussé chemin pour venir se tenir à ses côtés.

Akhbar affichait une mine farouche teintée d'agacement. Renwyck le vit écarter discrètement les pieds pour se placer dans une position plus stable, plus ferme. Le druide souhaitait-il se battre ? Renwyck essaya d'évaluer ses forces. Le Secret ne lui serait d'aucune utilité. Il possédait du poivre et du piment de Challe qui, jetés aux yeux d'un assaillant, le handicaperait, mais il s'agissait d'épices chères que sa mère lui avait confiées. Il ne souhaitait pas les gâcher ainsi. Et de toute façon, il serait bien incapable de trouver les bons sachets en pleine nuit au fond de sa besace. Il nota en revanche plusieurs branches mortes sur le sol qui pourraient lui servir d'armes. Il était prêt.

L'homme prit la parole, d'une voix rogue :

— Tiens donc, s'étonna-t-il, qu'avons-nous là ? Un grimoire !

Renwyck fronça les sourcils.

— Rendez-moi mon herbier, lança-t-il.

L'homme le dévisagea. Une imposante barbe noire lui dévorait le visage. Ses yeux sombres allaient du visage de Renwyck à celui d'Akhbar puis au livre qu'il tenait fermement.

— Vous n'avez pas le droit de transporter des écrits sur le Secret, lâcha-t-il d'une voix dure. Si quelqu'un vous trouvait avec ça, vous pourriez avoir de gros ennuis. C'est arrivé il y a quelques jours à un couple dans l'arrière-pays.

Il finit par tendre à Renwyck son herbier. Ce geste brisa l'atmosphère de menace et de tension qui s'était emparée de la clairière. L'homme n'allait pas les agresser.

— Pardon si je vous ai fait peur, s'excusa-t-il d'un ton bourru. J'ai entendu une explosion, je me suis approché.

Il avança la main droite, paume tournée vers le ciel. Une flamme bleutée s'y matérialisa.

Renwyck ne put s'empêcher un mouvement de recul. Comment ? Le Secret permettait-il cela ? L'homme n'était pas un herboriste, cela ne faisait aucun doute. À la lueur de la flamme, Renwyck le distinguait mieux. Il était un peu plus jeune qu'Akhbar, de stature élancée. Il portait une simple cape de voyage jetée sur une qinya d'un bleu clair.

— Venez avec moi, dit-il, je me suis installé dans une petite caverne par là-bas. Nous pourrons nous y abriter pour la nuit.

Akhbar le jaugeait du regard. Il finit par acquiescer. Ils marchèrent quelques minutes en suivant la flammèche bleue avant d'atteindre l'endroit indiqué par le Magian. La cavité n'était pas profonde, mais ce serait suffisant pour s'abriter et faire un feu sans attirer les regards. Une pluie légère commençait à tomber.

Lorsqu'ils furent installés, ils allumèrent un feu et l'homme sortit quelques gâteaux secs qu'il leur offrit.

— Je me nomme Sigund, dit-il, je suis illusionniste.