Elle tourna la tête brusquement vers lui. Il la regarda surpris.
- Depuis quand les rêves sont-ils un royaume digne d'attention pour la famille royale ?
Elle déglutit presque imperceptiblement.
- Veuillez excuser mon impolitesse, Votre Majesté, répondît-elle dans un calme feint.
Elle bouillonnait intérieurement. Comment osait-il ?
- Bien, maintenant que l'éducation de certaines personnes n'est plus à refaire peut être pouvons-nous revenir à notre discussion ?, clama le roi devant toute la cour en me regardant droit dans les yeux.
La jeune femme ferma les yeux une demi seconde pour enfouir sa colère qui menaçait. Elle les rouvrit et vit que toutes les personnes dans la salle la regardait. Même les esclaves. A part celle avec le chèche noir.
- Je disais donc, qu'à l'occasion du 19ème anniversaire du Commandant je lui offre dans ma grande bonté une esclave de chambre tout en suivant la tradition puisque selon celle-ci, l'héritière du trône doit se marier le jour de ses 20 ans et sa première esclave de chambre doit lui être offerte un an avant son mariage.
La jeune femme en laissa presque échapper un sifflement de dédain. Un mariage arrangé. Sans amour. Le reflet d'une envie de meurtre passa dans son regard. Tandis qu'une personne morte dans la plèbe passait inaperçue cela était bien différent quand il s'agissait du roi. Dommage. Une tête royale coupée aurait fait du bien à tout le monde. Elle attendit le verdict de son père qui était en train de choisir l'esclave en prenant son temps comme si le monde lui appartenait. Elle était nerveuse. Cela ne lui arrivait pas souvent.
Soudain, il appela l'esclave avec le chèche noir.
- Toi là-bas ! Quel est ton nom ? demanda-t-il.
L'esclave se fit pousser violemment en avant. Elle avança la tête baissée vers le sol. Puis elle s'arrêta brusquement.
Le silence se fit. L'esclave n'avait ni salué ni montré un quelconque signe de respect envers la famille royale. Elle ne releva pas les yeux. Ils étaient fixés sur le tapis rouge sang.
Mais surtout elle n'avait pas répondu au roi qui pourtant s'adressait à elle personnellement.
- Est-tu sourde esclave ? tonna-t-il.
- Non.
Le choc se lit sur le visage d'ordinaire impassible de l'homme. Sa fille afficha un micro sourire. Elle commençait à bien l'aimer cette esclave, après tout peut être qu'elle en ferait une amie si elle n'avait pas la tête coupée d'ici ce soir.
- Je me répète, quel est ton nom ?
Une fois de plus elle ne répondit pas. Sentant une tension grandissante, la Commandante se décida à intervenir pour empêcher le sang de cette jolie demoiselle de rejoindre le tapis.
- Pardonnez-moi Votre Majesté mais, ne dites-vous pas que lorsqu'une personne devient esclave elle perd son identité ? Sachant comment mes soldats peuvent être persuasifs, je pense que l'esclave devant nous a simplement retenu la leçon.
L'esclave ne leva même pas les yeux pour la remercier comme si elle voulait provoquer sa mort.
- Eh bien Esclave, tu es alors plus intelligente que les autres !
Un sourire goguenard pris place sur le visage de la jeune femme portant le chèche noir. Malgré sa tête baissée, personne pouvait affirmer ne pas le voir. Pourtant le roi fit comme si de rien n'était.
- Donc sommes-nous d'accord ? Je ne te prendrais qu'une seule femme aujourd'hui, marchand !
Celui-ci, heureux comme un dieu d'avoir satisfait son roi s'inclina bien bas saluant la Commandante rapidement avant de sortir. Alexandria se remit à fixer sa nouvelle esclave de chambre. Sa peau, sa silhouette, sa façon de se tenir, tout attirait irrémédiablement son regard sur elle. Malgré de lourdes menottes aux poignets et aux pieds, elle paraissait belle. De cette beauté qui coupe le souffle. Son corps était caché par un grand morceau de tissu ample élégamment attaché ne laissant voir ni ses chevilles ni ses poignets et pourtant les hommes ne pouvaient s'empêcher de la regarder. Alexandria la détaillait. Son regard dû se faire inquisiteur puisque l'Esclave leva la tête vers elle tout en gardant les paupières baissées de manière à ce que personne ne puisse voir ses yeux. Son visage de porcelaine prit une teinte plus colorée. Cela surprit la Commandante qui s'attendait à un regard noir.La soirée se finit enfin et Alexandria quitta la salle de sa démarche royale. L'Esclave la suivit les pieds délivrés de leur entrave par une servante. Les cliquetis des menottes aux poignets de la jeune femme résonnaient sur les murs des couloirs menant aux appartements de la Commandante. Ces bruits n'apaisaient pas Alexandria, elle avait l'impression de prendre la vie de quelqu'un, de la contraindre, bref tout ce qu'elle détestait.
Elle n'avait jamais eu d'esclave personnelle parce qu'elle n'en avait pas besoin, peut-être par amour propre aussi. Toujours est-il qu'elle était mal à l'aise d'être suivie par une personne qu'elle ne connaissait pas du tout et qui maintenant devait lui obéir au doigt et à l'œil.Arrivant dans ses appartements, elle indiqua à la nouvelle arrivée qu'elle dormirait dans une pièce collée à sa chambre séparées seulement par un rideau. Elle vit la tension de la jeune femme diminuer un peu. Pourquoi ? Elle ne le sut pas. Alexandria montra la chambre à l'Esclave qui fit un petit sourire.
- Je suis désolée de ne pas avoir un peu plus d'espace à offrir...
Pourquoi s'excusait-elle ? Elle était la Commandante, elle ne s'excusait pas. Jamais. Tout aussi surprise, l'Esclave se tourna vers elle.
- Ces excuses n'ont pas lieu d'être Commandante, je suppose que j'ai plus de place que la plupart des esclaves de ces tours.
Sa voix douce s'éleva tel un chant d'oiseau surprenant Alexandria qui resta muette. Les yeux de la jeune femme portant le chèche noir étaient toujours rivés sur le sol. Était-ce un signe de respect d'un pays voisin ? Était-elle simplement timide ? Ou était-ce un énième signe de rébellion ?
La tête couverte de noir s'inclina légèrement sur la droite comme pour attendre une réponse à une question sous-entendue. Alexandria était toujours figée telle une statue grecque. Elle secoua la tête, prit le soin de détourner les yeux de la jeune femme et répondit.
- C'est vrai mais vous avez sûrement un rôle plus important aux yeux de la cour. Vous serez avec moi tout le temps, vous saurez donc mes plus grands secrets. La dangerosité de cette place provoque certainement une élévation sociale. Beaucoup de personnes seraient prêtes à vous torturer et même à vous tuer pour savoir ne serait-ce que comment je prends mon bain.
Alexandria sourit.
- Mais ne vous inquiétez pas, votre protection est mon devoir d'honneur.
La chef des armées se rendit compte qu'elle avait vouvoyé l'esclave. Tout en l'observant, elle se demanda jusqu'où pouvait aller l'effet de son interlocutrice sur elle. Elle vit les lèvres de l'Esclave bouger mais n'entendit aucun son tant elle était concentrée sur ses pensées.
- Pourquoi m'avez-vous vouvoyée ? Je suis une esclave, je ne mérite donc aucune marque de respect, dit-elle d'un ton hargneux.
- Pardon ? Alexandria sortit de ses pensées.
- Je...non...rien laissez tomber.
- Êtes-vous en colère contre moi ou contre...ça ? demanda Alexandria en englobant de ses bras la pièce qui les entourait.
- Cela fait-il vraiment une différence ?
Alexandria se sentit blessée. Alors ainsi, elle n'était pas mieux que les autres. Il n'y avait donc aucune différence entre son père et elle ? Cependant son visage ne laissa rien paraître.
- Après tout vous avez peut-être raison.
La phrase claqua, mettant fin à toute discussion. Alexandria tourna le dos et s'éloigna rapidement coupant court toutes possibles prises de parole.Trop énervée pour dormir, elle alla s'installer au pied de son lit en tailleur avec le livre des légendes de son royaume.
« Les hommes aux yeux verts sont les descendants de la lignée royale du royaume des arbres, Trikru. Cette couleur représente le peuple et toute personne possédant les yeux verts doit être respectée des autres selon les coutumes du royaume.
Les hommes aux yeux bruns sont le peuple, qu'ils obéissent, travaillent et enfantent en paix. Le marron est la couleur du tronc des arbres, ils supportent le vert des monarques et l'élèvent.
Les hommes aux yeux bleus appartenaient au royaume d'Arkadia, le royaume du ciel. Ces hommes étaient blonds comme le blé prêt à être récolté. Ils avaient la technologie, la science, la médecine, la physique, les mathématiques. Mais surtout, ils vivaient en paix avec les pays voisins. Jamais ils n'enclenchaient de guerre et ils avaient décidé de ne construire aucune machine de guerre, aucune arme susceptible de blesser ou de tuer. La paix et l'harmonie était leur ligne de conduite. Et ils étaient respectés.
Seulement, un jour, le souverain Titus 1er, jaloux de la prospérité de ce royaume tandis que le sien coulait dans la misère, décida d'attaquer ce peuple pourtant sans ressource militaire. Les guerriers eurent pour ordre de tuer tout le monde, avec pour distinction la couleur des cheveux et celle des yeux. Ce fut le plus grand génocide jamais connu.
Le pays fut ravagé, les villes détruites. Dans un dernier élan et sur demande de leur roi bienveillant, les habitants d'Arkadia détruisirent toutes les objets technologiques pour éviter que le peuple des arbres les utilisent comme armes. La technologie, les notions de santé et de science furent oubliées. Il ne resta de ce royaume que la terre cultivable qui revint au royaume des arbres.
Depuis ce jour, les personnes aux yeux bleus et aux cheveux blonds sont la hantise du peuple des arbres car elles symbolisent la cruauté de leurs rois, leur cupidité et leur bêtise. Elles rappellent sans cesse que les deux royaumes auraient pu construire ensemble au lieu de détruire. »
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You're my evidence of love's existence (FanFiction)
FanfictionUn autre univers, une autre histoire. Une histoire de prince charmant avec une Commandante à la place du prince et pas vraiment le côté charmant... Injustement, Clarke se retrouve esclave de la Commandante tandis que la couleur de ses yeux et de ses...