Eternity [Poets Of The Fall] Français/English

[FR] 8 - Distance (Lift)

Olli marchait entre ses deux amis, légèrement derrière. Les images de la journée repassaient en boucle dans sa tête. Venait-il de rêver ? Tout s'était enchaîné si vite, si parfaitement, comme si c'était écrit, comme s'ils n'avaient pris la décision de s'éloigner que la veille, sans qu'une vraie distance n'aie le temps de s'installe rentre eux. Bien sûr, ils avaient pris chacun quelques années, et pourtant, rien n'avait changé. Ils semblaient même d'autant plus heureux, attirés l'un par l'autre, confiants. Et ce baiser que Jari lui avait donné valait tout l'or du monde. Il avait terrassé tous les doutes du guitaristes. Ils étaient tous les deux prêts pour tout ça, sans que rien ne les en empêche, surtout pas eux-mêmes. Mais, loin des yeux noisette du batteur, brillants derrière les verres de ses lunettes, ceux du blond se remplissaient encore doucement de doutes. Après tout, si tout avait jusqu'ici été parfait, ils n'avaient eu que peu de temps tous les deux. Et s'ils ne se connaissaient plus si bien qu'il l'espérait ? Si rien de tout cela n'était destiné à fonctionner réellement ? Olli était habitué à compartimenter son esprit, éloignant de sa conscience ses soucis pour se forcer à rester focalisé sur les bonnes images, positives et bienheureuses. Il prit soudain conscience que, depuis qu'ils avaient quitté le studio, un silence religieux s'était installé. Si Marko et Jaska étaient curieux - il l'avait senti dans leurs regards - aucun d'eux ne voulait prendre le risque de le brusquer. Timidement, parce qu'il n'avait pas pour habitude de se livrer, le guitariste brisa ce calme.

« - Merci, sincèrement, merci. Marko, sans toi et Kapu je n'aurai jamais pu. Et Jaska, je sais que te parler ce matin a fait du bien à Jari, sans Jani et toi, lui non plus ne m'aurait pas parlé. Je ne sais pas si j'aurais pu tenir plus de temps en vivant ainsi. »

Le guitariste brun lança un grand sourire à Olli tandis que le chanteur lui posa doucement une main dans le dos, l'espace de quelques secondes. Le blond, plus assuré à présent, se sentit en mesure de poursuivre.

« - Et merci de ne pas nous avoir posé de questions même si on les voyait dans vos regards ! Ria-t-il. Je sais bien ce qui vous taraude, et oui, on se parle à nouveau, comme avant. Il s'arrêta un instant, pensif. Ca faisait tellement longtemps, presque jusqu'à en oublier cette sensation au creux du ventre. Presque à en oublier le pourquoi du comment on en était arrivé là, à se voir en aveugles, interdits par nos propres soins d'être proches. Comme si ces dix dernières années avaient existé sans exister vraiment, si ce n'est dans l'assurance de nos gestes. »

Olli avait dit ces derniers mots plus doucement, presque dans un murmure. Un sourire se dessina sur son visage. Il n'avait rien de la mélancolie de ses sourires de la décennie passée. Il était authentique, sincère, précieux, heureux. Le blond ferma les yeux, entendant encore distinctement les mots de Jari résonner dans son esprit, et ses propres paroles lui répondre sans même qu'il ne réfléchisse à ce qu'il disait, trop occupé à parler avec son cœur. Il sentit de nouveau ses mâchoires presque douloureuses à force de sourire, de sourire en voyant le batteur, heureux. Il sentit de nouveau la main du brun sur son cou. Il sentit de nouveau le goût des lèvres si douces de Jari pressées contre les siennes. Olli leva ses paupières, en continuant de marcher près de ses amis qui souriaient, eux-aussi. Ils avaient compris qu'en l'espace de quelques heures, deux de leurs plus chers amis avaient retrouvé la pièce qui manquait à leurs vies, à leur bonheur, enfin complets.

« - Il m'avait tellement manqué, mais je suis heureux de voir qu'entre nous, rien n'a changé. C'est toujours tellement naturel, tellement évident. Reprit-il.