Bonsoir...

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La nuit était tombée depuis quelques heures, recouvrant Gotham d'un épais drap noir d'où luisait parfois des halos de lumière tamisées de réverbères disséminés ça et là des trottoirs. Comme n'importe quelle ville, elle possédait de petits recoins malfamés qui, le soleil aux bras de Morphée, s'éveillaient et donnaient des spectacles aussi lugubres que dangereux.

Là-bas, il fallait mieux ne pas prêter l'oreille aux légers gémissements d'agonies aux fins fonds des ruelles ou encore, croiser le regard d'un homme suspect plus d'une seconde si on tenait à ne pas s'empêtrer dans le vice. Peu de gens s'aventuraient dans ce genre de quartier par peur de terminer la gorge tranchée, puis jeté dans un caniveau après avoir été entièrement pillé.

Cela dit, le très apprécié Agent Kyle n'avait pas l'air de craindre ne serait-ce que l'odeur nauséeuse de pisse émanant de l'endroit. À vrai dire, c'était plutôt lui que les malfrats craignaient. La légère lumière de la lune caressait son visage à la mine sérieuse et pâle de manière à ce que le moindre passant ressente une tension effroyable simplement en le regardant. Ajouté à cela, l'absence d'inquiétude dans son regard sombre qui avait l'air d'avoir vu les pires atrocités du monde et une démarche d'une tranquillité déconcertante dans un environnement pourtant si hostile. Même les autres agents de son département se demandaient s'ils auraient eu la moindre chance contre lui s'il avait été un criminel.

   Il s'avançait vers le seul endroit générant musique, éclats de voies et ivrogne pantelant, soit, un immense casino tape à l'œil. C'était un bien petit mot lorsqu'on voyait les deux énormes pilonnes couleurs or érigés devant le bâtiment.
Le groom au sourire las lui ouvrit la porte sur une salle tout aussi spectaculaire que l'extérieur. Il y avait là un nombre incalculable de personnes de la haute société, un sol dont les carreaux formaient des motifs de cartes cirés à souhait, plusieurs escaliers de bois rouges menant à l'étage et bien évidemment, des jeux d'argents de toutes sortes emplissant toutes la pièce.

—Je vous sers, Sir ? Souffla une voix derrière lui, assez forte tout de même pour qu'il l'entende parmi les cris de joies des joueurs.

Le lieutenant se retourna donc vers un homme grisonnant debout derrière un bar où s'affalait la fine crème de soûlard ayant noyé leurs échecs répétés. Il hocha simplement la tête en prenant place tandis que l'homme s'armait de sa serviette avant de s'attaquer au nettoyage d'un verre en cristal:

—Votre patron est-il ici ? Demanda le brun en s'emparant d'une des cacahuètes dans un panier à proximité.

Le vieil homme secoua la tête et posa le récipient devant son client:

––Un Martini s'il vous plaît. Demanda-t-il en soupirant.

Le barman se retrouva très facilement dans la panoplie de bouteilles pour en extraire le cocktail et verser le liquide incolore:

—Si j'étais vous j'essaierai de ne pas trop m'approcher de ce genre d'endroit, lança-t-il sans lâcher sa besogne du regard.

—Vous y travaillez pourtant, lança Wayne en posant les yeux sur son interlocuteur.

Il fit légèrement glisser sa commande vers le policier en souriant tristement:

—On fait ce qu'on peut avec ses dettes. Avoua-t-il avec mélancolie.

Compatissant, le lieutenant fouilla quelques secondes la poche de son manteau et en sortit plusieurs billets qu'il posa sur le comptoir en souriant amicalement:

—Bruce Kyle.

À la fois surpris et heureux de recevoir autant d'argent pour un simple pourboire, il ne put que se présenter à son tour pour renvoyer la politesse:

—Alfred Pennyworth... M-merci monsieur.

Au moment où Bruce pensait jouer les modestes, un coup de feu retentit à l'entrée du casino, brisant l'atmosphère festif. La musique s'arrêta tel un disque rayé, les joueurs se figèrent, sachant pertinemment qui allait faire son entrée. La porte principale s'ouvrît à la volée sous un éclat de rire qui fit étrangement baisser les yeux de tous. Le corps du groom gisant au sol dans son propre sang paraissait derrière le corps frêle de son bourreau vêtu d'un costume violet, un long manteau pingouin bleu nuit décoré d'une petite fleur rose sur le flanc droit:

—Quel genre de sourire c'était ça ? Marmonna le nouveau venu encore hilare armé d'un revolver.

    Le brun serra la mâchoire, il était enfin devant lui, devant l'homme qui faisait trembler la mafia et avait réussi à détourner les plus fiables des agents de polices. Il ne bougea pas de sa place, buvant son Martini tout en le détaillant du coin de l'œil.
C'était un homme, qui malgré ses cheveux douteusement verdâtres, avait l'air de tenir à son image, son visage laiteux était poudré avec dextérité, ses sourcils finement taillés et le plus déconcertant, ses lèvres pincées étaient fardées d'un rouge à lèvre carmin qui forcerait n'importe qui à les regarder. Bruce se répugna à le trouver beau. Les yeux émeraude du Joker balayèrent la salle alors qu'il tapotait sa joue avec le goulot de l'arme en réfléchissant à haute voix:

—Qui...ira... en prison...à ma place ?

Ses lèvres s'étirèrent et il sautilla subitement vers un homme assez grassouillet au beau milieu d'une partie de poker. Le cuir de ses gants caressa le double menton tremblotant de sa victime alors qu'il posait le revolver contre son ventre en ricanant:

—Cours Forest. Ordonna-t-il au creux de son oreille.

L'homme tomba de sa chaise sous la précipitation puis se releva avec le visage d'un homme aux portes de la mort et s'enfuit probablement vers un commissariat. Le Joker ricana et attrapa le verre d'une femme assise à la table du fuyard pour le boire cu-sec:

—D'où sort ce silence ? Il me casse les tympans... Soupira-t-il ennuyé, Amusez vous!

Il n'eut pas à le demander deux fois, tous reprirent leurs paris et la musique emplit à nouveau la pièce mais l'atmosphère restait oppressante à sa présence. Obnubilé par le meurtrier Bruce ne remarqua pas qu'il se dirigeait vers lui avec le regard emplit de curiosité et le sourire éternellement scotché à ses lèvres:

—Un nouveau visage ? Constata-t-il à sa hauteur, Pourquoi est-il si sérieux ?

À la grande surprise du brun, le joker s'asseyait sur lui, comme si de rien était, son torse délicatement collé au sien tandis que les doigts du clown tripotaient ses joues:

—Devrais-je y graver un sourire ?

Make me smileOù les histoires vivent. Découvrez maintenant