In extremis

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Minuit.

Minuit et je ne dormais toujours pas.

Je faisais les cents pas dans le couloir des cabines, mon cerveau tournait à plein régime.

Je me posais des questions, plus débiles les unes que les autres, elles fusaient.

Leur seul point commun était qu'elles étaient tous orientées vers Damien.

Je fermais les yeux en m'adossant contre le mur de bois. Je l'imaginais, je me le représentais. Il était grand, brun clair, une chemise blanche et un pantalon clair. Pour être honnête ça n'était pas les parties de son corps qui étaient les plus nettes dans mon esprit.

Son visage l'était bien plus, tellement que pendant un court instant j'ai cru qu'il était là, devant moi.

Mais la chose gravée dans ma mémoire, la chose que je m'étais forcé à imprimer pour la garder, c'était ses yeux.

Ils étaient si...bleus.

Ils avaient en même temps la couleur du ciel et celle de la mer.

Ils étaient magnifiques.

J'ouvris les miens.

En face de moi il y avait une petite vitre, qui avec la lumière d'une lanterne faisait office de miroir.

Quelque part je me disais qu'on était vraiment opposé.

J'étais petit, brun et mes yeux avaient la couleur de la suie.

Je comprenais pourquoi maintenant aucune femme ne s'était jamais vraiment intéressée à moi. J'étais trop banal, je n'avais rien d'exceptionnel, je ne devais certainement pas plaire.

Non pas que ça me dérange réellement mais, bref.

Une pensée idiote rejoignait les autres : est-ce que je lui plaisais à lui ?

Pensée qui sema encore plus le trouble qu'il n'était déjà présent dans ma tête.

« De toute façon je ne le saurais jamais....Je venais de murmurer »

Un long et lourd soupir franchît mes lèvres.

Alors ça allait vraiment se finir comme ça ? Il allait sauter, il se noiera si il ne se fait pas dévorer avant, et il allait horriblement me manquer.

Est-ce que je vais lui manquer ?

Je retomberai sûrement dans cette fameuse routine monotone, cette fameuse routine d'avant que je ne rencontre Cyril.

D'ailleurs il essayera sûrement de m'en défaire mais...

Un soupir, encore.

J'aurais bien voulu rester avec lui en bas mais je ne voulais pas le priver de sa dernière nuit.

J'aurais bien voulu encore pleurer mais toutes mes larmes étaient déjà tombées, elles imbibaient peut-être encore sa chemise au niveau de son épaule.

Est-ce qu'on était amis ?

Est-ce que quatre jours suffisent aux personnes pour se considérer comme amis ?

La Malédiction du Cobra's HookOù les histoires vivent. Découvrez maintenant