L'Herboriste - Les Thaumaturges I

Fols Masqués (9) - Renwyck

Renwyck et ses compagnons s'avancèrent dans la salle du trône remplie de visiteurs. On aurait dit une église. De hauts piliers de marbre blanc soutenaient une voûte ornée de motifs célestes. Le mur de gauche était percé de longs vitraux qui laissaient entrer une lumière colorée. À droite, trois tentures arboraient des armes que Renwyck put identifier. La tête de cerf jaune sur fond bleu représentait le royaume, le château blanc sur fond bleu symbolisait le Val de Nacre et enfin, l'épervier rouge sur fond jaune appartenait à la famille royale.

Ils remontèrent en silence une allée tracée entre les colonnes. Au bout se dressait une estrade et sur celle-ci siégeait la reine Selma. Elle portait une robe bleue aux motifs floraux. Un diadème d'or et de gemmes était posé sur sa chevelure grise. Les événements des derniers jours avaient exigé d'elle un lourd tribut. De lourds cernes assombrissaient son regard.

Dagarkin était assis à sa droite. Tout autour d'eux se tenait une foule d'inconnus. Certains portaient les couleurs du Culte. D'autres devaient être des notables et de hauts dignitaires de la cour. Renwyck reconnut quelques participants du premier jour du procès, mais beaucoup d'autres étaient de nouveaux visages. Il y avait tant de monde !

Au pied de l'estrade, un scribe était installé pour garder trace de tout ce qui serait dit. Ni le prince Tarlon ni le Grand Prêtre Zanamros ne faisaient partie de l'assemblée. Renwyck espéra que c'était de bon augure. Le scribe se leva et annonça d'une voix forte :

— Agenouillez-vous devant Selma, troisième du nom, de la maison Valier, reine sur le fleuve et dans les monts, souveraine du Royaume d'Ael.

Renwyck et ses compagnons s'exécutèrent. Tout autour d'eux, la cour s'inclinait également dans une révérence pleine de chuchotements. Renwyck attendit que la reine les interpelât, mais ce fut Dagarkin qui les invita à se relever.

— Soyez les bienvenus, leur dit-il.

Son attitude était bienveillante, son sourire franc et chaleureux. Renwyck eut le sentiment qu'ils pouvaient lui accorder leur confiance. Il ne paraissait pas mal intentionné à leur égard. On reconnaissait en lui les traits de sa mère : un visage digne et volontaire aux yeux perçants.

— Je pense vous devoir quelques excuses, continua le prince. Tout d'abord, pour ne pas vous avoir remerciés plus tôt, mais aussi, et les deux sont intimement liés, pour vous avoir gardés ici contre votre gré. J'ose espérer que vous avez été bien traités, mais je conçois qu'il dut être pénible pour vous d'être ainsi privés de votre liberté. Je craignais de ne jamais vous retrouver si je vous laissais partir. Des sujets de la plus haute importance m'ont accaparé ces derniers jours, aussi cette audience a-t-elle été retardée. Mais prenez la parole et présentez-vous ! Dites à la cour à qui je dois la vie.

Tous les regards se dardèrent vers Renwyck, Lasica, Akhbar et Arashi. On découvrait les visages de ceux qui avaient sauvé la vie du prince. Les chuchotements ne se calmèrent pas malgré les rappels à l'ordre du scribe.

— Nous avons reçu de l'aide, Votre Altesse, répondit Akhbar avec autant de déférence qu'il pouvait en montrer. Beaucoup devraient être remerciés et resteront pour toujours anonymes. Mais nuls n'ont agi pour la gloire. Quant à nous, Votre Altesse, je suis Akhbar fils d'Uskin, d'Untère, et voici mes compagnons : Lasica, fille de Bjorn, faz Arashi Oros que vous connaissez, et enfin Renwyck...

— Renwyck l'Herboriste, coupa ce dernier le cœur battant.

Il ne fallait pas qu'Akhbar mentionnât le nom de sa mère, ni celui de Rivebois. Si Renwyck ne doutait pas de la sincérité des remerciements de Dagarkin, il n'était pas certain que toute l'assemblée les vît d'un œil positif. Il était hors de question d'attirer l'attention et donc des ennuis à sa mère. Mieux valait pour elle de rester anonyme. Du reste, ils avaient envoyé Erigone à Rivebois pour la mettre en sûreté. Ce n'était pas le moment de placer le village au centre de l'attention.