L'inconnue au piano- Apollo Justice x OC (FRENCH)

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Il y avait un petit parc, perdu dans la grande ville de Los Angeles. Un tout petit parc, avec rien que des petits bancs, un petit étang, de petits arbres et une petite gloriette blanche. Oui, tout était petit dans ce parc.

Et c'était dans ce petit parc qu'un jeune homme passait de petits moments de calme après une dure journée de travail. Il s'y rendait presque tous les soirs, pour gouter au frais de la brise, au friselis des feuilles et aux barbotements des canards. Cela ne lui ressemblait pourtant pas vraiment le calme, lui qui était vu comme un garçon bruyant et énergique, aux cordes vocales d'acier ; et pourtant il était là, assit sur un vieux banc de bois qui craquait à chaque mouvement.

Mais ce soir-là n'était pas un soir comme les autres. Quelque chose avait changé dans le petit parc d'Apollo. Dans la gloriette auparavant vide, trônait fièrement un vieux piano à queue. Il allait surement terminer ici sa vie, après avoir sans doute vu passer plusieurs propriétaires, virtuoses ou amateurs. Ses touches d'ivoire témoignaient de longues années de bons et loyaux services, les doigts des pianistes y ayant laissé des creux. Ses quatre pieds bancals semblaient vouloir se dérober sur eux-mêmes, alors que la béquille soutenait péniblement le couvercle immaculé.

Le jeune homme n'y prêta pas plus d'attention et reposa ses yeux sur l'étang dans lequel batifolaient un couple de canards.

Malheureusement, quelque chose ou plutôt quelqu'un dérangea à nouveau le calme du lieu : les pas presque imperceptibles d'une jeune femme. Ses cheveux châtains que l'on devinait longs étaient attachés en un chignon impeccable, laissant découvrir un cou long et fin ainsi qu'une peau blanche, presque translucide, et ses ballerines noires claquaient sur le pavé de pierres moussues. Elle semblait se diriger vers la gloriette, ou plus précisément, le piano sous la gloriette. Apollo la suivit discrètement du regard, alors qu'elle passait silencieusement à quelques mètres de lui, sans le remarquer.

Finalement, elle prit place sur le banc devant l'instrument, faisant craquer les pieds et tachant légèrement son pantalon noir de poussière ; et avec la délicatesse d'une mère avec son enfant, elle épousseta le clavier. Elle prit le temps de remonter les manches de sa chemise blanche, d'étirer lentement ses doigts et de battre plusieurs fois des paupières avant de produire la première note. Un sol.

« Parfait, murmura-t-elle alors qu'elle appréciait le fait de ne pas avoir à accorder le vieil instrument »

Alors elle joua. La mélodie était calme, évoquant une soirée dans un vieux bar au son d'un jazz qui avait fait son temps. Elle transportait avec équité la joie et une certaine mélancolie, un rappel triste d'années révolues où l'on sortait l'après-midi pour danser.

Le jeune homme en costume rouge écoutait d'une oreille distraite, étant plus intéressé par les mains de la mystérieuse pianiste, qui semblaient danser sur le clavier. L'expérience et la dextérité de la jeune femme étaient évidentes, au un point qu'Apollo se demanda si elle n'était pas pianiste de métier.

Les muscles puissants de son dos que l'on pouvait deviner sous le tissu se relâchaient et se contractaient à intervalles réguliers, alors que sa tête dodelinait au rythme de la mélodie.

Le piano n'avait jamais réellement été la tasse de thé de l'avocat en herbe, mais il se trouvait à apprécier la chanson de l'inconnue. L'air lui était vaguement connu et pourtant, la façon qu'elle avait de jouer le rendait presque nouveau, appréciable. Alors il ferma les yeux et écouta. Il se laissa porter par les accords et la douce cadence de la mélodie, sur un fond de bruissement de feuilles.


La dernière note retentit, et la rêverie du garçon aux cheveux dressés se termina en même temps que l'ariette. Il aurait voulu que l'inconnue continue sa mélodie, mais malheureusement, elle se leva et referma le couvercle après un seul morceau. Elle posa ses yeux verts sur le piano et lui murmura sur un ton de confidence qu'elle reviendrait demain.

Letter to my loversWhere stories live. Discover now