Chapitre 23 - Kathy

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Ce soir-là, dès que Marcus me laissa seule dans ma chambre, je m'employai à la fouiller.

Elle était simple, dotée d'une unique fenêtre qui donnait sur une large pelouse. Au loin se dressait des arbres et je pouvais y distinguer la clôture soi-disant protectrice se détacher dans le crépuscule.

J'ouvris et fermai les tiroirs de la commode, inspectai la penderie. Tout ce que je trouvai fut un minuscule miroir à main, sans doute oublié ici par une précédente résidente.

Il était petit, mais il ferait l'affaire.

Assise sur le lit, je m'appliquai à tordre le support qui encadrait le miroir. Quand je parvins à le détacher, je le pris précautionneusement entre mes mains et l'enfuis dans une des serviettes de bain que j'avais amenées avec moi. Ensuite, sans aucun état d'âme, je marchai dessus en m'assurant d'élancer mon poids sur un de ses coins.

Le miroir émit un petit craquement.

Quand je le déballai de la serviette, je vis avec satisfaction que j'avais pu le briser en plusieurs éclats, dont un qui faisait pratiquement cinq centimètres. Il était petit, mais en lui aménageant une poignée, j'aurais à ma disposition une arme équivalente à la lame d'un canif : coupante, discrète et, bien utilisée, elle pouvait même tuer.

Je passai l'heure suivante à aménager une poignée suffisamment solide pour pouvoir me servir sans danger de ma nouvelle lame. Je la conçus les sens en alerte, prête à tout dissimuler sous mes draps au cas où quelqu'un ouvrirait la porte.

Je sacrifiai à ma besogne une chemise en flanelle dont j'arrachai des lambeaux ainsi que ma brosse à dents qui m'assurait une bonne prise en main. Ils devaient sûrement être capables de m'en donner une de rechange, j'étais prête à parier que beaucoup de patients (ou d'élèves, comme l'était Anton) devaient fréquemment oublier d'emporter la leur avec eux.

J'eus beau repasser ma chambre au crible une fois de plus, je ne découvris rien de plus.

Derrière la porte, les autres jeunes filles avec lesquelles je partageais l'aile s'agitaient. Les cours étaient fini depuis longtemps, j'avais raté le repas du soir. Je n'avais aucune envie de les rencontrer. J'étais encore furieuse contre Carnegie et sa clique.

Et puis, il y avait eu cette note laissée sur mon lit. Qui avait bien pu l'écrire ?

Était-ce un message qui m'était adressé directement ou un mot qu'une bonne âme laissait à l'intention de chaque nouvel arrivant ?

Je me laissai tomber sur le matelas, mes paupières brûlaient tant je me sentais épuisée par les derniers événements.

Ce fut le trou noir.

Je ne fus réveillée que le lendemain matin par des coups secs frappés à ma porte.

Ils me firent sursauter, en un rien de temps, je fus debout, me demandant où je me trouvais avant de me rappeler par bribes ma journée d'hier.

Pour la première fois depuis des semaines, j'avais dormi d'une traite, sans faire de cauchemars.

Sans doute parce que maintenant, je me trouvais dans un cauchemar, mais bien réel celui-là.

A nouveau, les coups résonnèrent. Je me traînai hors du lit, non sans saisir au passage la lampe qui ornait ma table de chevet et entrouvris prudemment la porte.

Une jeune fille rousse me faisait face, petite, filiforme, souriante. On aurait dit une fée ou un elfe.

- Salut !

- Heu... Salut.

Je n'étais toujours pas décidée à ouvrir plus grand la porte ni à lâcher ma lampe.

- Je suis Kathy. J'occupe une des chambres de cette partie. Nous ne t'avons pas vue hier soir, nous voulions te souhaiter la bienvenue.

Je fronçai les sourcils.

Elle resta à attendre, le sourire aux lèvres alors que je ne savais pas quoi dire.

Aussi, elle reprit :

- Tu veux venir avec nous pour le petit déjeuner ? D'habitude, tout le monde y va en groupe.

Puis, tout me revint à la figure. Jennifer, la compétition, le chantage dont je faisais l'objet. Je soupesai le pour et le contre. Après tout, avoir quelques alliés ici ne me ferait pas de mal. Et puis, peut-être était-ce une de ces filles qui avait laissé ce mot de mise en garde à mon attention

Je me détendis :

- D'accord, laissez-moi dix minutes.

Et je lui claquai la porte au nez.

Aleisha Grey - Démons intérieurs - Tome 1 - Wattys2019Où les histoires vivent. Découvrez maintenant