CHAPITRE 2 - Partie 1

5 0 0
                                    

                                                    ***1***

Alors que le soleil se lève à peine, InHo, essoufflé, s'arrêta un instant sur bas côté piétinant les brins d'herbe couverts de rosée fraiche. Ses baskets fluo et sa veste fine en coupe-vent bleue lui donnaient un air de sportif confirmé. Alors qu'il se baissa pour renouer ses lacets un vent frais parcourra sa nuque et remua sa crinière noire, faisant s'hérisser les poils découverts de ses jambes. Malgré l'heure matinale de son footing il avait croisé des dizaines de personnes,des vieux promenant leur chien aux fêtards de la veille qui n'avaient pas su retrouver le chemin de leur maison. Il venait d'ailleurs de s'arrêter près d'un homme en costume affalé dans l'herbe, encore endormi et empestant le soju bon marché, un miracle qu'il n'ait pas fini sa route dans la rivière pensa-t-il. Après avoir repris son souffle il jeta un coup d'œil rapide à sa montre connectée, elle indiquait 7 kilomètres, il lui restait donc 3petits kilomètres pour finir le parcours qu'il s'était fixé. Cela lui plaisait de faire ça de temps en temps, courir. Enfaite il devait évacuer son stress avant le concert de ce soir, cela fait longtemps qu'il n'a pas joué devant son professeur et il ne veut pas le décevoir. Au bord de la rivière Han le chemin était agréable,on pouvait parfois y apercevoir des cygnes ou des pédalos, la seule vision de cette étendu d'eau suffisait à apaiser et à oublier la vitesse à laquelle la capitale tourne. Le dernier kilomètre fut un peu laborieux, si bien qu'une fois arrivé à la station de métro il décida que finalement il ne rentrerait pas à pied comme il l'avait prévu. Cette fois tu ne t'endors pas s'ordonna-t-il intérieurement, tiens, tu va rester debout comme ça tu ne pourra pas te retrouver dans la même situation embarrassante qu'il y à deux jours...

En arrivant devant son immeuble il franchit la grande porte d'entrée et se dirigeât vers le fond du hall, là où sont entreposées les boites à lettres de tous les résidents. Il y en avait un centaine, le premier jour il avait du passer presque dix minutes à toutes les scruter pour trouver la sienne. Finalement elle se trouvait dans la deuxième rangée vers le bas près du mur du fond, y figurait son nom en lettres noires majuscules: CHOI IN HO. Depuis son déménagement il avait l'habitude de recevoir un paquet de pub quotidien qu'il jetait directement à la poubelle avant de remonter son courrier, alors il s'adonna une fois de plus à ce nouveau rituel. Comme il allait être en retard pour la dernière répétition il pris l'ascenseur et fila dans son appartement prendre une douche. Il n'avait pas encore totalement déballé ses cartons et certains étaient entreposés à côté du canapé du salon. Il n'avait pas l'air bien pressé de les déballer à en voir le nombre d'objets qu'il avait posé dessus et que le courrier du jour venait de rejoindre. Les cheveux encore mouillés il se dirigeât vers la cuisine pour lancer un café, et d'une main attrapa le courrier qu'il avait laissé. Relevé de compte bancaire,facture de téléphone et, tiens, un prospectus, s'étonna-t-il, il adu m'échapper, coincé entre deux lettres. «Agence Sarang, vous aide à trouver le partenaire idéal! Retrouvez-nous au 5 Sowol-roHeohyeon-Dong, 2ème étage» Il eut un sourire ironique, une agence matrimoniale, c'est le comble! Il sirota son café enfin prêt et jeta le flyer à la poubelle avant d'aller enfiler des habits convenables. Il prit une chemise dans sa collection, une rouge à carreaux qui lui donnait un faux air de bucheron canadien, et attrapa un jean noir dans le tiroir du bas de l'armoire. Il ne ferait pas tâche au milieu des autres car tous venaient aux répétitions en tenue décontractée, ça leur enlevait de la crédibilité mais dès qu'ils se mettaient à jouer ils la retrouvaient entièrement.

Les locaux du conservatoire étaient prestigieux, un vrai bijou de modernité. Les lustres dorés pendant au plafond de l'entrée contrebalançaient le style épuré des murs et du mobilier tandis qu'un long tapis beige aux motifs foncés traversait la pièce, guidant les arrivants vers les différentes parties du bâtiment. In Ho avait l'habitude d'y venir tous les jours depuis dix ans, même lors de ses jours de repos où il se plaisait à venir s'entrainer dans ces pièces lumineuses et insonorisées. De toute façon c'était toujours difficile de le faire ailleurs sans déranger les gens ou sans être dérangé par le bruit. Il connaissait les lieux comme sa poche, il n'aurait eu aucun mal à en faire la visite guidée les yeux bandés. Le premier couloir à droite menait aux salles de réserve, on y trouvait toutes sortes d'instruments entreposés sur des étagères immenses et minutieusement couvertes. Les musiciens déposaient là leurs instruments endommagés ou désaccordés et les retrouvaient au même endroit, de nouveau en parfait état après un séjour plus au moins long entre les mains de professionnels dans les salles voisines. Le couloir de gauche rassemblait les bureaux administratifs et autres secrétariats puis aboutissait sur un escalier d'un beige imitation marbre menant aux salles de répétition de l'étage. En montant les premières marches l'on pouvait déjà apercevoir les premières salles de répétitions, vastes pièces remplies de chaises et de pupitres visibles depuis le couloir grâce à un mur en partie vitré.On retrouvait également des studio d'enregistrement un peu plus loin, quatre exactement, dans lesquels étaient enregistrés certains morceaux de musique classique pour des compilations musicales, le genre de chose que plus personne n'achète depuis des années. C'est dans cette première salle de répétition du premier étage qu'avait rendez-vous In Ho pour la répétition finale. Il s'était hâte devenir pensant qu'il serait en retard, mais en voyant la salle presque vide il eut un soupir de soulagement, il lui restait encore dix minutes à tuer. Il aurait pu rentrer pour s'installer et discuter avec les quelques personnes déjà arrivées mais il n'en avait pas très envie. Ici les gens ne semblaient pas ouvert à quelconque relation dépassant le domaine professionnel, alors avant l'heure officielle des répétitions les gens préféraient pianoter leur smartphone, en quête d'une notification ou d'un message qui les sortiraient de cette solitude embarrassante, et aussitôt le travail terminé chacun reprenait sa route parfois même sans un au revoir.L'envie de quitter cette atmosphère pesante était trop forte alors il se dirigeât vers la machine à café du couloir. Dieu merci elle remarche! s'exclama-t-il intérieurement. Mieux vaux prendre un second café pour faire passer le temps que de rester dans cette ambiance sordide pensa-t-il. Le café comme à son habitude était médiocre, mais les gens avaient l'habitude de le boire seulement pour s'occuper, non par soif ou par envie, alors cela ne dérangeait personne de boire du jus de chaussette.

Amateur de café à ce que je vois, s'exclama une voix rieuse derrière lui. C'était Hannah,violoncelliste numéro deux de l'orchestre, aussi la personne avec qui il s'entendait le mieux ici. C'était une très belle jeune femme, d'un an son ainée, très talentueuse bien qu'elle le fut moins que lui. Elle non plus ne supportait pas l'air hautain de tous leurs collègues, alors elle était bien contente de l'avoir trouvé,même si leur position dans l'orchestre les éloignaient de plusieurs mètres. C'était un soulagement de la voir enfin, ces dix minutes seraient désormais beaucoup moins longue en sa présence. Ils décidèrent de s'installer dans le fond de la salle le temps que le chef d'orchestre arrive, et ils se mirent à discuter à voix basse.In Ho lui raconta les frasques de sa mère qui avait cru fin d'envoyer son professeur comme messager pour le hâter de se marier, ce qui décrocha un petit rire à la jeune femme. Tu sais, mes parents sont pareils lui avoua-t-elle, dès que je suis sortie avec Jae ils ont tout de suite insisté pour le rencontrer, et quand j'ai finalement cédé à leur requête ils lui ont parlé de mariage au bout de trente minutes, j'étais rouge de honte!

Hannah s'était mariée l'été dernier après trois ans de relation. Son mari était officier de police, un homme très gentil et droit, ils formaient un couple merveilleux.

Tu sais, ajouta-t-elle, au fond ils sont chiants mais c'est parce qu'ils s'inquiètent pour nous, tu verra ça leur passera. Tu n'as personne en vue en ce moment?

Il avait vraiment l'impression d'être encore un enfant à côté d'elle, il se senti très nul un instant.

Non murmura-t-il, personne.

Elle réfléchit un instant,l'index en suspends au dessus des lèvres. Je ne vois plus qu'une chose, essaye un de ces speed-dating que de nombreux cafés proposent en après-midi. En voyant son sourire crispé elle essaya de le rassurer : Ne t'en fais pas, presque tout le monde est déjà passé par la, c'est très courant, pas de honte à avoir, tu verra ça va bien se passer.

Il n'eut pas le temps de répliquer que le chef d'orchestre entra en trombe dans la salle,s'excusant de ses quelques minutes de retard et invitant chacun à reprendre place.


L'horloge venait de sonner20heures et la salle affichait comme souvent complet. Monsieur Jang avait prit soin de s'asseoir au premier rang légèrement sur la droite, juste en face de la place qu'il savait qu'In Ho occuperait.Alors que la salle était plongée dans un silence profond les musiciens se mirent en place, puis arriva In Ho le violon principal de la soirée en smoking noir à nœud papillon. Ses cheveux noirs plaqués vers l'arrière lui donnaient un air noble terriblement séduisant. Il s'avança d'un pas assuré sur le devant de la scène et s'inclina machinalement devant le public. Au moment de redresser le buste son regard croisa celui de son professeur, confortablement installé dans son fauteuil au revêtement de popeline et appréciant la vue qui s'offrait à lui. Il fut décontenancé de le voir si près, quelle pression était sur ses épaules! Il ne put quand même s'empêcher de sourire à sa vue, quelle fripouille tout de même pensa-t-il. Le chef d'orchestre fit son entrée et le concert commença pour de bon. Pendant deux longues heures InHo du se concentrer pour faire abstraction du regard intimidant de son mentor,sa présence le rendant particulièrement nerveux. Une fois les dernières notes jouées il prit une grande inspiration, quel soulagement que tout se soit bien passé! Il jeta un regard vers son vieux professeur, comme s'il attendait le verdict final, une sorte d'approbation de sa part, et ses yeux s'enveloppèrent d'une couche humide en le voyant se lever pour l'applaudir. Monsieur Jang était à l'évidence très fier de lui, comme un père qui verrait son fils grandir. Il avait une envie folle de l'étreindre, de le féliciter et de monter sur scène pour montrer à la foule qu'il était son fils de cœur, mais ne le pouvant pas il continua de le couvrir d'applaudissements de plus en plus puissants. In Ho avait aussi cette envie, mais il avait un protocole à respecter alors il se contenta de soutenir le regard cerné mais vif de son spectateur, toujours une larme au coin de l'œil. Un lien invisible et pourtant si fort semblait lier les deux hommes en cet instant.

// Cette partie s'achève ici, n'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé, je serai ravie d'en discuter avec vous! N'oubliez pas qu'une nouvelle partie est postée chaque dimanche soir à 18h! //

Double JeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant