La tête roule doucement au gré de la mélodie, oscillant à gauche avant de revenir brusquement à droite sous le revirement de la musique. Il y a désormais une barrière entre lui et le monde, échafaudée par une focalisation quasi-autistique et une surdité plus présente chaque jour. Derrière ce front ridé par l'âge et la réflexion, les idées prennent beaucoup de place. Doucement, les doigts ne s'enfoncent plus que de moitié et la mélodie prend fin.Le corps redevient immédiatement immobile, les muscles tendus se ramollissent et le dos se courbe comme une parenthèse. L'heure du dîner a sonné. Le vieil homme s'installe à table avec sa femme dans la pièce désormais silencieuse. Il parcourt les plats d'un regard terne. Cela fait presque 80 ans qu'il vit dans une bulle protectrice, toute sensibilité dévolue sans concession à ses deux passions : la musique et la physique quantique. Le reste du temps, ce n'est qu'une coquille vide qui se nourrit et dort. Il est bien de vibrer dans son monde, mais attention de ne pas y limiter sa sensibilité, on perd facilement pied avec ce qui nous entoure.
YOU ARE READING
Étécriture 2019
RandomRecueil de textes liés au défi quotidien lancé par le compte @exercices-plumesques.